vendredi 27 février 2009

Compte-rendu de la XXIXe République des blogs.

Voici donc le moment venu de te raconter, cher lecteur, mes aventures de mercredi soir, à la République des Blogs parisienne. L’événement suscite toujours chez moi un certain plaisir. D’abord, je ne crache jamais sur la possibilité de boire un verre avec des gens sympas, et ensuite, je suis toujours très intéressé par le fait de mettre des visages sur des plumes, de toutes les obédiences. Souvent, je m’étonne d’ailleurs du décalage entre ce que les blogueurs sont en vrai et ce qu’ils montrent d’eux-mêmes sur leurs blogs. Il y aurait de quoi faire des thèses de sociologie et/ou de psychologie.

La RDB était marquée, ce mois-ci, par la présence de Benoît Hamon. Dès le départ, j’ai éprouvé une certaine gène devant cette intervention. Hamon était installé au fond de l’espace dédié. Des micros étaient en fonction pour permettre à tout le monde de profiter de la parole. Jules animait le débat. Une caméra de télévision est là, éblouissant tout le monde de manière très désagréable en permanence. Cependant, au début, seuls trois blogueurs spécialistes de l’Europe, que je ne connaissais pas par ailleurs, avaient la possibilité de poser des questions au politique. De plus, les questions devaient se cantonner à l’Europe, interdisant les interrogations potentiellement gênantes sur le PS par exemple. Sans critiquer les organisateurs de la RDB, on perd tout de même ce qui fait l’essence du blog, c’est-à-dire un espace de débat totalement libre, les commentaires ne devant normalement pas être contrôlés. Il est dommage qu’il ne soit pas possible d’avoir cette même liberté avec nos politiciens.

Il était aussi assez amusant de voir comment les blogueurs s'étaient répartis dans la salle. Toute la modemosphère s'était installée sur un rang unique, entourant Quitterie Delmas. Les autres tendances étaient plus dispersées, Authueil hésitait entre écouter et sortir de la pièce, certains commençaient des discussions dans les coins, les libéraux ne sont pas restés pour écouter. Personnellement, j’ai tiqué lorsque Hamon a commencé à nous dire que nous étions un média auquel il fallait s’adresser, comme à un autre média. Je me suis dis alors que, si Hamon fixait les mêmes conditions aux autres médias, on pouvait expliquer la vacuité d’une partie de l’information.

Après le départ de la star, la RDB a repris son tempo habituel (on picole, on papote et on mange un morceau). J’ai rencontré beaucoup de monde durant cette soirée, ce qui m’amènerait à faire une trentaine de liens, qui ferait tomber ce billet dans la catégorie des buzz éliminés par Wikio. Aussi, je vais me cantonner aux rencontres les plus marquantes.

Tout d’abord, j’ai eu la joie de rencontrer Marie-Georges Profonde, avec qui j’ai passé un bon moment, et qui m’a permis de me présenter à Olympe et à CC un peu plus tard dans la soirée. A l’inverse, j’ai joué à l’entremetteur pour l’introduire auprès de la leftblogosphère, très accrochée au bar.

Ensuite, j’ai eu un échange assez intéressant avec Authueil sur l’importance de la provocation dans le blog. Le sympathique attaché parlementaire semble être rôdé à cet exercice. Finalement, après 20 mn de discussion, je ne suis toujours pas sûr de son véritable attachement aux Tibéri ou du côté provoquant du billet.

A la fin de la soirée, je me suis retrouvé à une tablée qui réunissait les stars du Wikio : Martin P., CC, Nick Carraway, Dagrouik, Éric Mainville, le Pavé, Olympe, Vogelsong, le Stétoscope, l’Alcidé, Marie-Georges. Dans la soirée, Jacques Rosselin et Maud Etienne, qui venaient de boucler le Vendredi qui doit sortir aujourd’hui, nous ont rejoints : Jacques était euphorique puisqu’il a essayé de nous convaincre qu’Alain Minc était un type sympa, et qu’il serait bien que Jean-Michel Apathie soit le prochain invité de la RDB, ce qui susciterait davantage de questions (ce dont je ne doute pas…). Je dois admettre que l’humour de Dagrouik est assez ravageur après quelques bières… Je n’ai pas pu entendre les explications de Martin sur la vie de Jospin. Par contre, j’ai longuement, avec Marie-Georges, tenté de comprendre le système que Cratyle et ses proches lancent ces jours-ci, Pearltrees, mais je crois que la vision du site lui-même sera plus efficace.

A la fin de la soirée, j’ai eu la joie de découvrir un peu Vogelsong : une longue discussion sur l’action politique de la gauche actuelle, sur notre dynamisme idéologique, sur les stratégies à adopter pour l’avenir, discussion à la fois très optimiste et en même temps assez pessimiste pour 2012. Qui sait ?

J’ai rencontré beaucoup d’autres personnes, et n’ai pas eu le temps de voir LOmiG, avec qui je voulais discuter. Tant pis, ce sera pour la prochaine fois.

PS : ma tablée m’a fortement conseillé d’aller voir le blog de Sébastien Fontenelle, star montante de la blogosphère. J’ai suivi ce conseil, avec beaucoup d’intérêt je dois dire. Faites-vous votre idée, cher lecteur !

PS' : bon, ce compte-rendu était un peu long, mais il vise aussi à amener Manuel et Fabrice à faire le déplacement un jour...

Les ados d'aujourd'hui : des drogués du sexe ?

Depuis ce matin, il y a un fait divers qui a un peu fait réagir la blogosphère. Le 13 février, deux gamins de 12 ans auraient violé, apparemment à deux reprises, une élève de 13 ans, dans un collège d’Arras. L’affaire, si elle peut être choquante, ne semble pas avoir, à priori, d’impact politique particulier.

Pourtant, j’ai été linké par Homer qui, dans ce billet, s’interroge sur le rôle de la sexualité chez les jeunes et sur la possibilité, dans un collège, qu’un viol puisse se reproduire deux fois. Quelques heures plus tard, le Chafouin s’est lancé aussi sur ce thème, impliquant cette fois la pornographie accessible à tous dans notre société, par différents moyens, et influençait les gamins. Son billet a suscité un débat assez intense que je t'invite à consulter.

J’admets avoir été assez étonné par ces deux billets. Évidemment, je ne vais pas aller me prononcer sur cette affaire, mais, travaillant tous les jours dans l’éducation, je sais que les affaires de viol entre élèves sont d’une grande rareté. Certes, lorsque cela arrive, c’est impressionnant, mais c’est souvent davantage lié à des cas très particuliers (familles décomposées, situations sociales complexes, souffrances du criminel…) qu’à une situation globale et incitative au viol de notre société.

Peut-on penser que les jeunes d’aujourd’hui sont plus portés sur le sexe à cause de la pornographie qui serait ambiante ? Franchement, cher lecteur, moi qui fréquente des ados tous les jours, je n’ai pas le sentiment qu’ils soient tous devenus des dingues du sexe depuis 15 ans. Les états d’âme de l’adolescent ont l’air d’être très identiques à ce que j’ai moi-même connu à leur âge. Si la pornographie a un impact, c’est sûrement dans les premiers ébats sexuels, mais chez la plupart des gamins, cela doit se réduire à quelques échecs avant de se découvrir un peu mieux.

Nos deux blogueurs proposent des solutions pour tenter de cadrer mieux la pornographie accessible aux jeunes. Homer invite au retour de l’uniforme dans les écoles, pour éviter les vêtements provocateurs. Si cela réglerait le cas des signes religieux et politiques distinctifs, je ne pense pas du tout qu’un uniforme diminuerait la libido de nos élèves. De même, dire qu’un uniforme effacerait les inégalités sociales est très illusoire : tout le monde sait d’où vous venez, uniforme identique ou pas.

Le Chafouin s’inquiète lui de l’influence sur les esprits faibles du porno. Le terme d’esprit faible est central, car les gamins influencés par ces conneries sont justement déjà des gamins fragiles. Le porno peut être un catalyseur, mais ces gosses en trouveraient d’autres s’ils n’avaient accès au porno.

Attention, chers camarades blogueurs, à ne pas utiliser un fait divers absolument pas significatif pour en profiter pour mener une campagne réactionnaire visant à restreindre nos libertés. Je ne suis pas plus que cela fan de la pornographie, mais la censure de la sensualité n’apporte pas forcément de bonnes choses non plus. Dans ce cas, je préfère quand même la liberté. Il faut protéger les mineurs, mais la loi le fait déjà. Appliquons-là.

Ce qui est davantage questionnant, c’est d’abord de savoir pourquoi l’Éducation ne détecte pas ces gosses en souffrance, et pourquoi un viol peut se reproduire deux fois dans un bahut, le même jour. Dans un établissement scolaire, je ne dirais jamais assez à quel point l’encadrement humain par des adultes compétents est important. Homer le souligne d’ailleurs : la diminution des effectifs dans les établissements est un vrai problème et un non-sens dans l’Éducation.

Par contre, le Chafouin souligne l’utilisation dégradante de l’image féminine dans les médias actuels. Là, je ne peux que le rejoindre, et espérer que les choses évoluent.

jeudi 26 février 2009

Les trolls quittent les blogs et investissent les bistros.

Cher lecteur, je vais te raconter une petite histoire qui m’est arrivée ce matin. Bon, je sais que tu attends avec une grande impatience mon compte-rendu de la République des Blogs, mais il viendra un peu plus tard.

Je me suis réveillé totalement épuisé. Certes, je n’avais dormi que sept heures, mais d’habitude, cela ne m’empêche pas de fonctionner à peu près correctement. Peut-être la lassitude des vacances aidant, mon cerveau avait décidé de se manifester par un léger mal de tête avec système de pulsation intégré. Tu sais, cher lecteur, ce type de maux de tête qui ont l’air de battre un rythme en permanence contre ta paroi crânienne.

Or, moment dramatique, j’avais normalement décidé de corriger un paquet de copies en souffrance qui traînait nonchalamment sur mon bureau depuis le début des vacances. A chaque fois, je me dis que je vais me corriger ces paquets au début des vacances, histoire de me débarrasser. Et puis, la fatigue aidant, je laisse traîner. En général, je corrige ça le dimanche après-midi avant la rentrée, mais là, j’avais quand même décidé de m’avancer.

Vu mon état, je décide d’aller corriger dans un bistro, histoire de ne pas passer mon temps à bloguer en douce. J’aime bien bosser dans les bistros. Entre chaque copie, j’en profite pour regarder un peu le monde tourner autour de moi, je laisse traîner une oreille en écoutant ce que se racontent mes voisins, je bois un bon café crème chaud : je profite tout simplement de la vie…

Cela faisait à peu près une heure que je m’étais installé, quand une dame, âgée d’une soixantaine d’années, se pose à la table à côté, commande un verre de Côtes-du-Rhône et entame son Parisien (qui titrait sur une nouvelle aide aux propriétaires). Elle se met à soupirer, puis à grignoter frénétiquement des cacahuètes, avant de dire au barman, qui se battait avec sa vaisselle : « qu’est-ce qu’on s’emmerde, non ? »

Brusquement, elle me remarque et se met à me fixer intensément. Puis, sans se départir de sa fixette, m’alpague : « Vous êtes prof ? » Je me tourne avec l’air méprisant du type qui se demande pourquoi on demande à un gars qui a un stylo rouge en main et un paquet de feuilles grands carreaux grand format devant lui s’il est prof et je réponds par l’affirmative.

« Et vous n’êtes pas en train de travailler ? Forcément, les profs, vous êtes un peu fainéant… »

Évidemment, le fait de bosser dans un café n’est pas une évidence pour tout le monde, mais enfin… Je me décide donc à expliquer à la dame, avec un ton professoral qui s’adaptait bien au moment et à ma fonction, que nous sommes en période de congés scolaires, ce qui correspond à un chômage technique pour nous, et qu’en plus, je suis justement en train de travailler.

« Mouais, enfin, travailler dans un café, hein, à part le serveur, j’vois pas trop qui peut travailler dans un café… et encore, le serveur, hein… » (en regardant le barman qui astiquait son bar)

J’ai failli lui dire que le numéro un de la blogosphère politique faisait des billets depuis un bistro, mais j’ai décidé de baisser la tête vers mon paquet de copies et de laisser tomber.

Semblant se rendre compte de ce que j’étais en train de faire, et sans se démonter, la dame me reprend et me lance :

« Bon, soyez pas trop sévère, hein, parce qu’après, vous allez dire à vos gosses que c’est à cause de moi que vous les avez mal notés. Et moi, j’ai rien fait… »

Aimable, je lui ai juste répondu que j’essayais d’être impartial dans ma notation, et qu’en l’occurrence, ce paquet n’était pas mauvais pour le moment, et qu'il y avait peu de chances que mes élèves entendent un jour parler d'elle. Rassérénée, la dame est repartie dans son Parisien, en soupirant, et en répétant régulièrement « qu’est-ce qu’on s’emmerde, putain… »

Chers camarades blogueurs, le troll n’est plus réservé au blog. On le trouve même dans les bistros.

mercredi 25 février 2009

Liberté de jouissance des revenus et dépenses contraintes : les omissions des conservateurs.

Cher lecteur, il y a des gens qui argumentent avec cohérence et d’autres qui sont prêts à émettre de coupables omissions pour faire passer leurs idées et leurs valeurs.

C’est le cas, ce matin, du journaliste du Figaro Ivan Rioufol. Revenant sur les négociations en cours en Guadeloupe pour obtenir une hausse de salaire de 200 €, Rioufol nous explique que les acteurs sont en train de parvenir à un système tripartite : le patronat mettrait 50 €, les collectivités territoriales 50 € et l’État 100 €. Bizarrement, Rioufol ne semble pas s’offusquer du système proposé : au total, si on regarde bien, 50 € de cette soi-disant hausse vont être fournis par l’impôt (que les Guadeloupéens devront payer par eux-mêmes) et 100 € vont être supportés par les contributions sociales des autres citoyens. On pourrait entièrement comprendre que la solidarité républicaine s’exerce pour un territoire en difficulté, mais on ne peut que voir que le salaire est en fait augmenté de 50 €. Quand on pense à 35 jours de grève pour arracher au patronat guadeloupéen une hausse de 50 €, il y a de quoi piquer de vraies colères.

Et, au passage, encore 100 € de recettes qui sont jetés en l’air par le gouvernement. On ne change pas une recette qu’on maîtrise.

Par contre, Rioufol utilise cette affaire pour dénoncer le scandale des charges sociales scandaleuses qui pèsent sur les salaires. Une phrase m’a particulièrement fait sourire :

« Pour autant, la négociation met le doigt sur l'un des non-dits les mieux protégés : le coût exorbitant des charges sociales supportées par le salarié, qui ne jouit en réalité que d'une partie des fruits de son travail. »


Ce qui Rioufol ne dit pas, c’est que ces cotisations correspondent à des dépenses totalement contraintes que les citoyens ont forcément à assumer à un moment ou à un autre : le chômage, la santé, l’accident du travail, la retraite, la parentalité… Si on supprimait les charges sur les salaires, cela signifierait qu’on s’attendrait à ce que le citoyen contribue de lui-même à tous ces risques. Soit il économise tout seul et prie que rien ne lui arrive de trop grave, soit le citoyen souscrit à des assurances privées pour sauver les meubles en cas de problème. Globalement, quand on voit les deux choix, soit le citoyen est un irresponsable et préfère dépenser tout son argent à consommer, réduisant nettement son espérance de vie, soit il est responsable et il s’assure.

Dans ce cas précis, à performance équivalente, l’assurance privée est forcément plus coûteuse, car les actionnaires réclament logiquement leurs dividendes. La santé étant par nature une activité à perte, les assurances sont obligées de limer les coûts au maximum pour survivre et verser des dividendes. Au total, cette soi-disant libération des revenus va entraîner une hausse réelle du coût de la protection sociale pour les citoyens avec sans doute une qualité moindre. N’oublions pas que nos amis américains ont un système de santé qui leur coûte 3 points de PIB de plus pour une efficacité moindre, et que les retraités de ce pays ont une qualité de vie plus basse par rapport aux nôtres…

Ce système n’est réellement intéressant que lorsqu’on a des revenus confortables. Étonnant que ce soit ces milieux-là qui prônent ce type de programme…

Ces débats me fascinent toujours autant, car nous avons tout de même connu, dans le système capitaliste, une époque pas si lointaine durant laquelle la Sécurité sociale n'existait pas. C'était avant 1945...

PS : je te signale au passage ce jeune blog, découvert aujourd'hui. Bonne lecture.

La chaîne de la photo...

Manuel a vraiment du temps à perdre. Plutôt que de se consacrer à la vraie politique, il répond à une chaîne venant de Rubin. Et en plus, après, il me désigne pour continuer.

Il s'agit de mettre sur son blog la sixième photographie de son album photo le plus récent.



Cette photographie a été prise à Meung-sur-Loire, dans le vieux centre. Il s'agit d'un bras des Mauves, l'un des plus petits affluents de la Loire. Elle a été prise par ma conjointe lundi après-midi.

Désolé, Manuel, cette photo est moins sexy que la tienne...

Maintenant, la règle impose de tagger quelques blogueurs émérites : je tagge Homer, Marie-Georges, Gaël, Framboise et Christie.

En attendant, à ce soir pour ceux qui vont fréquenter la RDB parisienne. Apparemment, il y aura du beau linge...

Les aventures du privilégié en vacances : le managment dans les chaînes hôtelières à bas-prix.

Durant mes courtes vacances de privilégié, nous nous sommes trouvés, avec ma conjointe, dans une grande chaîne d’hôtellerie du groupe Accor. Il s’agit de la pas chère mais dans laquelle on a des toilettes et une douche personnelle. Évidemment, ce type d’hébergement est assez spartiate, mais quand on a un pouvoir d’achat en baisse ou stagnant, cela permet quand même de partir un peu en vacances.

Déjà (je ne m’en étais jamais rendu compte), on paie en arrivant, ce qui signifie qu’on peut difficilement contester après si on trouve un truc absolument infâme dans la chambre. Ensuite, lorsqu’on arrive devant le seuil de sa porte, se trouve posée sur la porte une sorte de scellée sur laquelle se trouve inscrit un laïus sur la propreté remarquable de la chambre, la date du dernier nettoyage et le prénom de la gentille personne qui a été payée pour nettoyer les saletés du client précédent.

Sur le moment, on se dit, malgré le prix finalement assez dérisoire par rapport à l’hôtel familial du coin, qu’on est quand même bien traité. Et puis, une fois qu’on est installé, on réfléchit un peu.

D’abord, sur la scellée, se trouve inscrit une recommandation : si on est pas content, on peut aller se plaindre auprès de la réception. Évidemment, je suppose que le client de base, mécontent de l’énorme trace de moisi qui subsiste dans son bac de douche, se rue à la réception et gueule en disant : « Putain, xxx (xxx étant le prénom inscrit sur la scellée) est vraiment une idiote ! Il y a une énorme trace de moisissure dans mon bac de douche !!! »

Vois-tu le processus, cher lecteur ? Dans un hôtel classique, lorsque tu es mécontent, tu as envie de t’en prendre à la direction. C’est assez normal finalement : lorsqu’un directeur fait mal son travail, les employés font n’importe quoi. De plus, il peut sembler assez cohérent que le directeur de l’hôtel vérifie par lui-même la qualité du travail effectué. Voilà un nouvel exemple d’un transfert de charge du travail de l’employeur vers le client. Le client est maintenant un agent de contrôle quasiment institué.

Encore plus pervers, nous avons le nom de la femme de ménage (c’était une femme ici), ce qui fait que nous allons en vouloir, d’un premier réflexe, non pas au directeur de l’hôtel qui met une chambre sale à disposition des clients, mais à la femme de ménage qui ne sait pas bosser. En plus d’un transfert de charge, voilà que se produit un transfert de responsabilité : c’est le salarié de base qui est responsable, et plus le directeur. Finalement, c’est celui qui gère la boite qui n’est plus responsable de rien et qui a été déchargé d’une partie de son travail.

Deux questions restent alors pendantes : est-ce que ce transfert de charge sur le client a été impacté sur le prix ? Est-ce que le transfert de responsabilité sur l’employé a été impacté sur le salaire ?

lundi 23 février 2009

Deux jours d'absence et 29ème République des blogs.

Cher lecteur, comme tu le sais, mon statut de privilégié m’a amené au chômage technique en ce moment, puisque l’État, cette feignasse, a encore décidé de mettre en vacances les gamins pour complaire aux lobbies des stations de ski. Apparemment, elles en profitent plutôt bien.

Donc, jusqu’à mercredi après-midi, je serai inactif sur ce blog, ainsi que sur l’autre. Heureusement, Manuel et Fabrice vont continuer à s’activer là-bas. Ici, les trolls ont deux jours de liberté.

Cependant, pour me rattraper, dès mercredi soir, je serai à la République des blogs. Comme les fois précédentes, elle se déroulera au café le Pachyderme, situé juste à côté de la place de la République, au 2bis boulevard Saint-Martin. Authueil prétend que nous aurons peut-être de la visite, du fait de la campagne européenne qui préchauffe. Qui sait ?

En attendant, cet événement attendu de tous est ouvert à tous les blogueurs politiques et à tous nos concitoyens intéressés par la blogosphère politique. Ne vous inquiétez pas, il n’y aura pas que moi…

PS : Fabrice ne sera (encore…) pas présent. N’étant pourtant pas privilégié, il a pris des vacances…

PS’ : je doute de pouvoir convaincre Didier Goux et Nicolas de repasser cette fois-ci. Cependant, je jette cette bouteille sur la toile.

PS'' : comme tu vas t'ennuyer pendant deux jours, je te conseille cet article d'Éric, concernant le dernier bouquin de Laurent Joffrin, ce billet de Vogelsong sur le camarade Chérèque, le billet du jour de Sarkofrance et cette tirade touchante du Faucon de Roquemaure. Il y a aussi cet OVNI, (re)posté par Homer, que je te conseille de regarder.

dimanche 22 février 2009

Les petits pays de l'Union Européenne vont-ils faire faillite ?

La presse d’aujourd’hui s’inquiète fortement des situations financières des pays d’Europe de l’Est. Cela fait plusieurs jours que les rumeurs bruissent dans les journaux : la crise pourrait avoir un impact extrêmement violent sur les petits pays européens, qui seraient obligé de suivre le modèle islandais assez rapidement.

D’après les journaux, la situation est simple. Les pays d’Europe de l’Est se sont convertis au capitalisme au tout début des années 1990, avec certes des populations qualifiées, mais avec des infrastructures faibles et des capitaux peu importants. Pour doper l’ensemble, ces pays ont largement fait appel à des capitaux étrangers, et particulièrement européens. L’entrée d’une partie d’entre eux dans l’UE en 2004 puis 2007 a accru la dépendance de ces zones au soutien des pays riches de l’Ouest.

Or, avec la crise, les investisseurs des États les plus riches sont en train de rapatrier en catastrophe leurs capitaux. De même, les banques resserrent considérablement leurs conditions de prêt. Aujourd’hui, lors de la réunion du G4, les pays les plus riches ont évoqué la nécessité de faire jouer la solidarité, mais se sont inquiétés des menaces de faillite pesant sur d’autres pays comme les pays d’Europe du Sud et l’Irlande. C’est marrant d’ailleurs, parce que, dans mes ouvrages de géographie, ces pays étaient présentés comme des dragons qui allaient bientôt nous en faire voir de toutes les couleurs.

Cette situation m’a rappelé un vieil épisode que je ressasse régulièrement à mes élèves, suivant les programmes. Au tout début des années 1930, les banques américaines, frappés de plein fouet par la crise, rapatrient en catastrophe les capitaux qu’elles avaient massivement investis en Europe. Le pays le plus touché est l’Allemagne. La puissance allemande s’était relancée après-guerre grâce aux investissements américains. Le gouvernement américain avait eu peur que l’Allemagne redevienne une menace pour ses alliés si elle ne retrouvait pas la prospérité. Pour pouvoir survivre, les gouvernements allemands successifs, très successifs même à ce moment-là, font jouer la planche à billet, mais ne peuvent empêcher la hausse massive du chômage et de la pauvreté. Très vite, les nazis et les communistes remportent des succès électoraux importants. On sait ce qu’il est advenu ensuite.

Cela fait peur, non ? Nous devons vraiment faire très attention. En acceptant ces pays dans l’UE, nous nous sommes liés avec eux. On peut totalement comprendre que les pays riches soient tous concentrés sur leurs difficultés propres, mais l’effondrement financier des deux-tiers des pays d’Europe est une menace sérieuse, à la fois pour l’UE mais aussi pour le bien-être et la sécurité de l’ensemble du continent.

samedi 21 février 2009

La chaîne des sept blogs.

Cher lecteur, j’ai la chance aujourd’hui de me faire taguer par PMA qui veut que je vous livre 7 blogs que j’aime.

Cette chaîne tombe à point nommé. Hier soir, je suis, avec ma conjointe, allé voir mon beau-frère, et nous avons dîné dans un restaurant chinois de Belleville. Je poursuivais donc ma volonté d’ouverture culturelle.

J’ai malheureusement été victime d’une attaque de ces étrangers qui ne veulent pas s’intégrer. Apparemment, le menu vapeur est très mal passé : j’ai occupé mes toilettes une bonne partie de la nuit, j’ai fait un malaise, et, depuis 10h du matin, j’ai 38,5° de fièvre. Ma conjointe a osé insinuer que ce rejet alimentaire pouvait aussi avoir été aggravé par la petite chartreuse que mon beauf m’a fait déguster, mais je ne peux impliquer ce bon produit français.

Je ne risque pas de pouvoir écrire aujourd’hui un billet trop sérieux.

D’ailleurs, il faudrait que je m’intéresse un jour aux enseignants qui parviennent systématiquement à tomber malade uniquement durant les vacances. C’est totalement mon cas : depuis quatre ans, je n’ai eu que deux journées d’arrêts-maladies, mais pas moins de six maladies m’obligeant à garder le lit. Après, certains blogueurs s’étonnent que je suive les mouvements de grève : il faut bien que je compense…

Alors, pour mes sept blogs, je dois te dire que je suis quand même encore assez novice dans la blogosphère, et je me suis globalement consacré aux réseaux des blogueurs que j’ai suivis au début. Je ne peux donc pas te donner une liste de jeunes blogueurs qui n’en veulent, parce que je n’en suis pas capable. Je ne vais pas vous faire le coup de recommander mon blog collectif, même si je trouve qu’il progresse chaque jour et que notre expérience, très hasardeuse, fait école, avec quelques copieurs de talent. Voici donc la liste des blogs que je lis systématiquement en premier, dès que j’ouvre mon Netvibes.

1. Évidemment, je suis un fanatique de tous les blogs de Nicolas, et particulièrement de PMA. Le taulier est beaucoup critiqué pour ses stratégies visant à monter dans le Wikio, mais ces blogs sont bons, même le tout dernier. Allez donc y faire un tour.

2. Je ne peux que m’incliner devant Sarkofrance et ses coulisses. Certes, l’information est orientée (l’auteur ne le cache pas) mais elle est extrêmement fouillée et surtout, régulière. Je n’ai pas pu savoir, à la dernière RDB, sa profession et n’ai pas été convaincu par ses explications. J’aurai sans doute l’occasion de le recroiser.

3. Depuis quelques jours, Peuples est en pleine explosion. Ses articles sont vraiment intéressants. Des analyses percutantes et claires.

4. Je suis aussi très impressionné par Vogelsong, qui, certes, écrit moins souvent, mais vu les billets, on lui pardonne.

5. Il y a ensuite des blogs d’autres opinions que les miennes, que je lis pourtant assidûment, en particulier les blogs de LHC, mais je vous recommande particulièrement Rubin, un des seuls vrais libéraux que j’ai pu repérer à ce jour, et l’Hérétique.

6. Je vous conseille enfin de lire quelques blogs Modem, très dynamiques en ce moment. Hypos est ma préférée. Si vous voulez aussi vous faire une idée des blogs féminins, allez lire les femmes engagées.

7. Enfin, je signale que Marie-Georges Profonde vient de relancer ses blogs.

Bon, je n’ai pas vraiment respecté le contrat, mais enfin… Pour finir, je tague Manuel, Fabrice (qui est en vacances et qui va donc pouvoir bloguer plus pour gagner plus), Hypos, Vogelsong et Le Coucou (que je n'ai pas cité au-dessus, car pour moi, son blog est une respiration. Et puis, comme je suis taquin, j’y ajoute Didier Goux, quand il rentrera de week-end dans les Ardennes. J’espère qu’il aura la joie de manger un pâté ardennais, un boudin blanc de Rethel ou une tarte au Maroilles…

vendredi 20 février 2009

Une chicha ? Chiche !

Cher lecteur, comme tu ne le sais sans doute pas, le billet que j’avais publié sur l’islamisme la semaine dernière a provoqué une tempête blogosphérique, alors que ce n’était pas du tout l’objectif.

Conscient de ce fait, mais ayant aussi la volonté de travailler mon ouverture culturelle, j’ai réalisé un acte fort que je n’avais pas fait depuis longtemps.

Mercredi soir, je suis allé dîner avec un ami dans Paris. Nous avons l’habitude, quand nous n’avons pas particulièrement envie de picoler, de nous rendre, après le repas, dans un bar à chicha qui se trouve un peu plus haut dans sa rue. Là, nous fumons un peu et buvons un thé à la menthe, parfois avec quelques pignons. Personnellement, je ne suis absolument pas fumeur, mais j’aime bien la chicha : je suppose que le fait de faire des bulles avec l’aspiration de la fumée m’amuse beaucoup.

Je n’étais pas retourné dans ce bar depuis l’entrée en vigueur de la nouvelle loi sur le tabac dans les lieux publics. A l’époque, ce cas particulier des bars à narguilés avait été un peu évoqué par la presse. On avait d’ailleurs entendu des policiers dire qu’ils avaient des ordres de fermeté à l’égard de ces lieux. J’étais moi-même persuadé que la plupart d’entre eux avaient fermé.

Mon pote m’a alors rassuré : « non, notre bar est toujours ouvert ! » Lorsque nous entrons, je découvre qu’une cloison a été construite, coupant le lieu en deux, et qu’un énorme système de ventilation trône, accroché dans un coin de la pièce. Le serveur nous fait entrer et nous installe sur les douillets canapés. Au passage, le bar est moins agréable et a perdu une partie de sa surface. On a la nette impression d’être enfermé dans un aquarium

Ce soir-là, le café est plein. Tous les fauteuils sont occupés, et une douzaine de narguilés tournent à plein régime. Très vite, nous sommes pris à la gorge par la fumée qui flotte au-dessus de nous. Après une demi-heure, le serveur vient ouvrir la porte, entraînant la fumée vers la zone non-fumeur, ce qui nous permet de respirer, mais enfume tout le reste du café. En clair, j’ai absorbé plus de nicotine que je n’en avais jamais prise à cet endroit.

Lorsqu’on va dans un café de ce type, cher lecteur, c’est pour fumer, pas pour autre chose. Il y a là une différence fondamentale avec les autres bars, qui sont dédiés à la boisson. A l’époque, les consommateurs et les patrons de ces cafés avaient argué de cette différence, mais l’État a refusé de revenir dessus, entraînant tout de même la fermeture de la majorité d’entre eux et des travaux très lourds chez les autres.

Je me demande si les pratiquants du narguilé, souvent issus de l’immigration nord-africaine, n’ont pas pris cette obstination comme une nouvelle forme de discrimination fait à une pratique culturelle qui ne fait finalement de mal à personne…

En Guadeloupe, on ne sabre pas trop les recettes de l'Etat, mais on annonce pas grand-chose non plus...

Nicolas Sarkozy s’est donc exprimé sur la Guadeloupe, après plusieurs semaines de lutte et un mort il y a deux jours. Appliquant sa volonté de séparer les problèmes de la métropole et ceux des DOM pour éviter une connexion des mouvements sociaux, le président a annoncé une nouvelle série de mesurettes dont il faut bien admettre qu’on peine à en voir les objectifs.

D’abord, je voudrais tout de même attribuer un bon point au président : apparemment, Nicolas Sarkozy devrait se rendre sur place pour ouvrir des états généraux en Guadeloupe, une fois le « calme revenu. » Je pense que ce déplacement est nécessaire, et je l’avais moi-même réclamé.

Sur le reste, Sarkozy poursuit dans la même veine qu’hier concernant le pouvoir d’achat en France. Il est bien évidemment hors de question de pousser une hausse des salaires sur un territoire où les richesses sont très inégalement réparties et où les prix sont très élevés. Seuls les fonctionnaires vont donc continuer à bénéficier de la prime des 40%, laissant les salariés du privé dans la même situation qu’auparavant.

Certes, des investissements sont prévus (150 millions d’euros) et une mise en place rapide du Revenu de Solidarité Active pour 250 millions d’euros.

Mais l’annonce-phare n’est pas là. La grosse proposition est d’entamer des négociations avec la grande distribution pour obtenir une baisse des prix. Au moins, voilà une mesure qui ne mange pas de pain pour l’État. Cependant, si je peux parfaitement admettre que les grands distributeurs font sûrement un peu de marge dans les DOM, il est aussi évident que l’installation dans ces territoires, où les productions locales sont faibles, suscite des coûts supplémentaires. Il est à craindre que les grands distributeurs ne cèdent rien ou demandent des subventions. Encore de la dette en perspective…

Pour finir, je dois te dire, cher lecteur, qu’il me semble assez incohérent de dire aux Antillais qu’on prend conscience de leur sentiment d’injustice, et, en même temps, de s’adresser à eux séparément, sur une chaîne que les Métropolitains ne reçoivent pas tous, loin de là. Il me semble que les Métropolitains sont tout aussi concernés par ce qui se passe dans les DOM : il s'agit aussi de nos concitoyens et de nos impôts, et nous avons droit d'être directement informés par le chef de l'État.

jeudi 19 février 2009

Et on continue à sabrer les recettes de l'Etat pour répondre à la crise économique...

Après le discours de Sarkozy d’hier, les réactions, multiples, vont toutes dans le même sens. Les journaux, les syndicats, le MEDEF, le PS, les blogueurs de droite comme de gauche, estiment que le président s’est contenté de mesurettes coûteuses et sans grand impact sur l’économie. Personnellement, suite à mon billet d’hier, je suis entré dans une colère noire (sans jeu de mots vaseux), vu le peu de temps accordé, à la toute fin du discours, à la situation de la Guadeloupe. Il n’y a bien que le blog collectif qui a bénéficié du discours du président.

Ce qui est sûr, après m’être calmé et avoir un peu regardé le catalogue de propositions sarkozyennes, c’est que le grand flou artistique domine les annonces présidentielles, saupoudrant ici et là quelques euros, annulant une partie de l’impôt sur le revenu, donnant quelques allocations, un chèque emploi-service… Dans l’ensemble, des petites sommes qui vont avoir un impact assez modéré durant les prochains mois.

Pour agir, le président joue sur une politique de dépenses publiques. Cependant, comme il en a l’habitude depuis qu’il est président, il en profite pour continuer à sabrer les recettes par la même occasion, en privant l’État de 1,1 milliards d’euros par la réduction de l'impôt sur le revenu.

Ce type de politique peut être cohérent en période de crise, mais les mesures prises ne sont pas durables, vont nous attirer les critiques de l’UE et ne serviront probablement pas à grand-chose. En plus, comme on ne peut pas lisser la dette, il faudra la payer plus tard.

Malgré le cirque médiatique de Laurence Parisot hier, il est évident que Sarkozy ne souhaite pas rompre avec le patronat pour autant. Je vois sa stratégie de la manière suivante :

  • Conformément aux souhaits du MEDEF, le président ne pousse pas à l’augmentation durable des salaires, malgré la diminution régulière de ceux-ci dans la répartition du PIB depuis 1983. Certes, il nous a servi hier un discours gauchiste, mais je vois mal le président affronter directement les patrons qui constituent une de ses bases électorales. Il s’accroche au dogme, installé par les néolibéraux, de la nocivité de l’augmentation des salaires quand le marché n’y pousse pas (ce qui ne peut arriver qu’en période de plein-emploi). C’est dommage, car la hausse des salaires maintient la consommation, évite la prise du crédit à outrance qui nous fait beaucoup de mal en ce moment, et permet aussi la hausse des recettes fiscales.
  • D’un autre côté, le président craint un mouvement social d’ampleur, lié à la grève du 29 janvier et au mouvement des DOM, et qui pourrait se cristalliser le 19 mars prochain. D’où les mesurettes d’hier qui creusent encore les déficits publics mais qui visent à redorer l’image du président.

Pour affronter la crise, il est important, cher lecteur, de rendre à l’État un peu de marge de manœuvre. Personnellement, je n’aurai pas suspendu l’impôt sur le revenu, car il n’y a pas d’aide ici pour les 50% de Français qui ne le paient pas et parce que cela dédouane les employeurs, État compris, de jouer sur les salaires. Par contre, le cadeau du bouclier fiscal, qui a coûté 6 milliards d’euros au budget sans efficacité et pour une très petite minorité de la population qui n'en a pas besoin, et la défiscalisation des heures supplémentaires, qui a affaibli la Sécurité sociale et qui a maintenant un effet pervers sur le maintien de l’emploi, pourraient être des bons moyens de retrouver un peu de recettes et d’investir dans l’avenir.

Évidemment, il faudrait que le président revienne sur une de ses promesses-phares de 2007. Je sais qu’il nous promettait la rupture avec ces pratiques, mais le contexte le justifie quand même.

mercredi 18 février 2009

Joue-t-on le pourrissement en Guadeloupe ?

Je n’ai pas l’habitude, cher lecteur, de réagir à chaud sur un événement politique, quel qu’il soit. Comme tu as pu le voir hier sur le congé parental, j’ai attendu plusieurs jours avant de me positionner sur cette question.

Or, aujourd’hui, l’évolution de la situation en Guadeloupe me pousse à intervenir.

Comme tu le sais sans doute, un syndicaliste a été tué aujourd'hui, après une série de coups de feu perpétrée par une bande de jeunes casseurs. Les trois policiers qui ont tenté de secourir la victime ont eux aussi été blessés.

Dans un mouvement social, le danger du dérapage est permanent. Comme tu le sais, je suis un pratiquant assez éprouvé des manifestations, et j’ai parfois vu des problèmes survenir. Dans certains cas, les manifestants ou les forces de l’ordre cherchent la provocation, la violence pouvant être une voie de casse d’un mouvement social pour le gouvernement, ou un moyen de forcer la décision du pouvoir pour les manifestants. Régulièrement, des groupes s’introduisent aussi dans les cortèges pour en profiter pour piller les magasins alentours, pour commettre quelques larcins ou pour se castagner avec les flics. J’ai personnellement vu ces bandes opérer durant les manifestations du CPE (où j’ai en mémoire l’intervention très musclée du service d’ordre de la CGT, avec ses ouvriers gros bras, contre une bande de casseurs) et lors des manifestations lycéennes de l’an dernier.

Le problème d’une grève et de manifestations, et surtout quand elles durent, est la tension forte qui s’insinue chez l’ensemble des acteurs, et qui peut, à tout moment, dégénérer. C’est le risque principal du mouvement social. Souvent, les casseurs n’ont qu’un impact finalement modéré là-dessus, sauf quand l’affrontement principal désorganise les services de sécurité.

Apparemment, c’est le cas en ce moment en Guadeloupe. La grève s’éternise, l’aéroport est fermé, les services publics sont désorganisés, et les policiers sûrement totalement débordés. Dans ce cadre, les casseurs peuvent se permettre des choses qu’ils ne risqueraient pas par ailleurs. En plus, en cas de violence, le risque d’embrasement, dans une situation tendue comme celle-là, est réel, même si les violences d’origine n’ont aucun lien.

Dans cette affaire, sans revenir sur les motifs du conflit en lui-même, pour éviter que tout dérape, il faut que les acteurs acceptent de discuter, et de trouver une voie de sortie honorable qui satisfait tout le monde. Tous les processus de conflits sociaux (pétitions, grèves, manifestations, occupations d’usine ou de lieux de travail), ce que j’ai souvent dit, ont pour objectif clair d’éviter la violence. Certes, beaucoup affirment que les Guadeloupéens n’ont pas de motifs cohérents de se plaindre, voire que les problèmes sont structurels et qu’on ne peut rien y faire. Ces arguments ne sont pas des réponses à des gens qui sont en crise : quand on décide de perdre un mois de revenus, c’est qu’on a des choses à dire, et qu’on doit être entendu.

Ce soir, Sarkozy s’exprime. Le 5 février, il n’avait même pas évoqué la Guadeloupe. Je sais qu’il est plus intéressé en ce moment par ses annonces sociales, mais je ne saurais trop lui conseiller, si je puis me permettre, de dire quelque chose. Il faudrait ensuite qu’il se rende sur place. On ne peut pas laisser des gens faire grève pendant un mois sans rien dire ni rien faire, quand on est le chef de l’État.

Si le président continue à être aussi léger, je ne donne pas cher de la tranquillité de la Guadeloupe ces prochains jours…

Je n’oserai croire que le président joue le pourrissement pour renverser l’opinion métropolitaine, ce serait vraiment trop irresponsable…

PS : dans le genre des bêtises du jour, je te conseille cet article publié sur le Causeur, où un journaliste s’extasie devant la disparition de la gauche et essaie de nous convaincre que nous sommes tous de droite, alors que le contexte donne un sacré coup de fouet à nos idées. Franchement, à droite, ils ne savent plus quoi trouver pour tenter de sauver la baraque.

mardi 17 février 2009

La remise en cause du congé parental ou comment appliquer le travailler plus pour gagner plus aux jeunes mères de famille.

Comme beaucoup, je suis assez curieux de savoir ce qu’il va se passer demain, lorsque notre président adoré recevra les grands responsables syndicaux. A priori, il a déjà dit que rien n’en sortirait, mais le contexte a un peu changé. Hier, des violences ont commencé en Guadeloupe. Après de nombreux autres territoires d’Outre-Mer, c’est en Guyane que l’on semble se diriger vers une mobilisation. A cela s’ajoutent les nouvelles économiques toujours plus mauvaises et la perspective de la grève du 19 mars en France, qui ne doit pas rassurer outre-mesure au palais.

Malgré ce contexte totalement désastreux, Sarkozy est encore parvenu à faire parler de lui avec quelques réflexions sur le congé parental. La blogosphère s’est enflammée sur ce sujet, à travers, d’ailleurs, des conflits de sexe assez stériles sur ces questions.

Qu’est-ce que le congé parental ? En soit, contrairement à ce qu’affirment certaines blogueuses, cette mesure n’est à priori pas féministe au départ. Ce congé permet à l’un des deux membres du couple de cesser ou de diminuer son activité professionnelle, de la naissance du bébé jusqu’au troisième anniversaire de l’enfant. L’objectif est de permettre aux parents de se consacrer pleinement à l’éducation de leur enfant. Certes, les femmes le prennent plus souvent que les hommes, preuve du machisme toujours latent de la société française. Si vous remplissez les conditions, la CAF vous verse une allocation pour vous permettre de survivre, mais qui ne dépasse jamais 552 € par mois. Durant cette période, votre emploi est préservé, mais il est sans doute plus facile de prendre ce congé dans le public que dans le privé. De plus, vous cotisez beaucoup moins pour votre retraite, de fait.

Le président a attaqué cette mesure en s’appuyant sur l’idée que les femmes (on ne parle pas des hommes dans cette affaire) coupaient leurs carrières professionnelles et remettaient en cause leur avenir. En fait, l’enfantement a toujours provoqué, depuis que les femmes peuvent travailler librement, ce type de situation, qui s’illustrent à la fois dans la différence salariale entre hommes et femmes et dans les régulières affaires de femmes abusivement licenciées dans le privé.

Que propose le président ? L’idée est de remettre en cause ce congé et de ramener les femmes sur le marché du travail, tout en bâtissant, à côté, des crèches pour accueillir 200 000 enfants supplémentaires. Encore une belle illustration du « travailler plus pour gagner plus. »

Quand on réfléchit un peu, on peut quand même s’étonner de la réaction sarkozyenne, et ce sur trois points très simples.

D’abord, Sarkozy remet en cause, de fait, la politique familiale française. Avec les allocations familiales, l’existence des crèches et la scolarisation précoce, le congé parental fait partie des actions publiques qui tiennent notre natalité. N’oublions pas que la France maintient, contre vents et marées, la deuxième natalité du monde développé. Sarkozy semble en avoir conscience, puisqu’il annonce, pour compenser cela, la création de places de crèches.

Là, il y a une deuxième série de réflexions possibles. D’abord, ces crèches sont payées par les collectivités territoriales, qui devraient perdre la taxe professionnelle prochainement : encore un beau transfert de charges ! De plus, si cela peut permettre à de nombreuses mères de travailler, et je ne peux que saluer la proposition de créer des crèches, les femmes, lorsqu’elles ont peu de moyens, vont être obligées de choisir la crèche, ce qui réduit le libre-choix des citoyens. Enfin, il me semble que la construction et l’entretien de crèches sont finalement plus coûteux que le fait de laisser des femmes ou des hommes, peu payés, chez eux à gérer leurs enfants. On aura sans doute une baisse des cotisations sociales, mais une belle hausse des impôts locaux par un effet de second tour. Il n’est pas dit non plus qu’il ne soit pas plus mauvais de laisser des très jeunes enfants avec des inconnus à la crèche que de leur permettre de vivre cette période avec leurs parents.

Enfin, dernière analyse, et pas la moindre, Sarkozy se plaint que 800 000 femmes restent hors du marché du travail. D’abord, il s’agit d’un choix, qui retire peut-être un peu de force de travail au pays, mais qui épanouit aussi des centaines de milliers de familles et d’enfants. Surtout, cher lecteur, est-il bon, dans le contexte actuel, de ramener de force 800 000 personnes sur le marché du travail alors que nous sommes en pleine crise économique et que le chômage est en pleine croissance ? Le congé parental peut aussi être une autre manière de gérer des personnes, qui seraient sans-emploi en ce moment, et de leur permettre de faire quelque chose d’utile pour elles, pour leurs enfants et pour la société.

En clair, encore une belle idée présentée sous des aspects très positifs, mais qui me semble être une belle bêtise économique et sociale. Attendons maintenant d’en voir la réalisation…

En plus, le président se contredit : lui qui vient d'accorder un congé parental à Rachida Dati...

Nicolas ouvre un 53ème blog, histoire de lier de nouvelles relations.

Nicolas est vraiment incroyable.

Il y a quelques semaines, le Coucou a ouvert un blog parodique visant à se moquer, avec talent et bienveillance, du numéro 1 de la blogosphère politique. Quelques temps plus tard, celui-ci a obtenu les clés de la maison.

Eh bien, cela n'a pas raté : Nicolas s'est lancé dans la production de billets en masse, avec pleins de liens vers sa multitude de blogs dedans.

Quel blogueur, crénom, quel blogueur !

Jamais il ne me viendrait à l'idée de monter ce genre de stratégie...

Les militants de droite commencent à se plaindre. Attention, Nicolas...

" Les Parents d’Elèves de l’Enseignement Agricole Public entendent dénoncer et s’indigner que la deuxième et plus historique des 5 missions de l’enseignement agricole : « Mission d’animation et de développement du territoire » soit bafouée. Dans nombre de territoires ruraux, l’antenne d’un lycée agricole est le centre de vie du village, en accueillant les élèves souvent dès la 4ème, en participant à l’animation culturelle et économique de ce territoire. Si aujourd’hui une antenne ferme, demain un lycée disparaîtra !"


Ah, cher lecteur, tu vas me dire que je me mets maintenant à diffuser les brûlots de la FCPE, la fédération des parents d’élèves majoritaire dans l’Éducation nationale, assez marquée à gauche.

Mais non, cher lecteur, mais non, ce texte, trouvé ici, a été diffusé par la Peep, la fédération de parents de droite qui dit toujours « Amen » à tout ce que dit un gouvernement quand il est de droite.

Hier, un blogueur s’étonnait, sous Twitter, que les lecteurs du Figaro soient très remontés contre des propositions de Sarkozy. De mon côté, je peux t’assurer que si la Peep commence à renâcler, ça sent le roussi.

lundi 16 février 2009

Le devoir de mémoire pose parfois problème : le Canada et la bataille des plaines d'Abraham.

Le Canada continue de bruisser du scandale de la bataille des plaines d’Abraham. La presse canadienne du jour, autant francophone qu’anglophone, semble annoncer que la Commission des Champs de Bataille Nationaux va prochainement reculer sur la reconstitution militaire de la bataille. Des cérémonies devraient pourtant avoir lieues autour de ce 250ème anniversaire.

Pourquoi est-ce que je t’embête avec cette bataille lointaine, cher lecteur ? Toute l’histoire du Canada s’est jouée durant cette journée de 1759.

Cela fait trois ans que la France et l’Angleterre se disputent le contrôle de l’Amérique du Nord. La guerre, d’abord avantageuse pour la France, a commencé à mal tourner avec l’arrivée en Nouvelle-Angleterre de renforts militaires britanniques très importants. La France, elle, se concentre plutôt sur la guerre en Europe et ne dispose pas des moyens maritimes pour déplacer de grands régiments. La Royal Navy bloque assez efficacement les ports français.

En juin 1759, la marine britannique s’installe dans le Saint-Laurent et y navigue tout au long de l’été. Au début du mois de septembre, les Britanniques débarquent à Québec et y mettent le siège. Le 13 septembre, l’armée française fait une sortie et les deux généraux commandant les deux forces sont tués. Cependant, le choc est fort côté français, et devant l’absence de renforts, Québec capitule le 18 septembre. Coupée ainsi de la France, le reste de la colonie canadienne ne tarde pas à céder. Montréal chute en 1760.

Ainsi est né le Canada : une colonie anglaise, dans laquelle la population anglaise devient progressivement majoritaire (en particulier avec l’arrivée des colons anglais opposés à l’indépendance des États-Unis quelques années plus tard) mais avec une communauté francophone très importante, qui compose encore quelques 25% de la population du pays, concentrée dans certains territoires comme le Québec et le Nouveau-Brunswick, et des touts petits espaces ailleurs (Manitoba, Ontario, Nouvelle-Écosse...)

Pour les Québécois, cette bataille est évidemment un crève-cœur. Ils ont perdu cette guerre, puis ont été abandonnés par la France qui n’a pas souhaité, lors des négociations du Traité de Paris qui ont suivi, récupérer le Canada en échange d’Haïti, deal proposé à l’époque par le Royaume-Uni. Pour les Anglophones, cette bataille marque enfin leur victoire sur la France, qui leur avait pourri l’existence depuis le début du XVIIe siècle, et la fondation de ce nouveau pays qu’est le Canada.

Aujourd’hui, les souverainistes québécois combattent pour faire annuler toute commémoration, au grand dam des Anglophones qui souhaitent marquer leur attachement à cette histoire.

En tant que bon « maudit Français », je ne prendrais bien sûr pas position. Cependant, l’âpreté de cette querelle illustre toujours le fait que l’existence du Canada en tant que nation, dont rêvait Trudeau dans le passé, est toujours un rêve...

Voilà pourquoi Sarkozy ferait bien de faire attention lorsqu’il se mêle des affaires des autres…

dimanche 15 février 2009

Facebook permet-il de maîtriser ses données ?

Facebook est vraiment un outil fascinant, à de multiples égards. Quand on regarde ce site, qu’on en est membre, et qu’on essaie de comprendre à quoi cela sert, on tombe sur une terrible évidence : Facebook ne sert à priori à rien. En tout cas, chacun en fait ce qu’il veut.

Personnellement, je l’utilise maintenant quasiment uniquement pour attirer quelques lecteurs sur mes blogs, et pour garder contact avec les quelques anciens élèves qui m’ont trouvé par ce biais. Cependant, contrairement à d’autres blogueurs influents, je n’ai pas ouvert mon profil au grand public, parce que j’ai un nombre considérable d’élèves qui y naviguent. C’est d’ailleurs assez mystérieux de constater que nos élèves tapent régulièrement le nom de leurs enseignants sur internet (sûrement sur Google) pour voir ce qui ressort. L’autre jour, une élève de seconde m’a alpagué dans l’escalier du lycée, en me disant, apparemment inquiète : « Monsieur, vous êtes sur Facebook ??? » Elle semblait éberluée, et avait l’air de croire que quelqu’un m’y avait inscrit sans que je le sache.

Je sais aussi que certains de mes proches, nobles travailleurs du secteur privé, m’ont affirmé que des employeurs et recruteurs fouillaient scrupuleusement Facebook pour tout savoir de leurs futurs salariés. Certes, ce type de pratique est moralement condamnable. Cependant, il faut aussi réfléchir un peu lorsqu’on colle sa vie privée en domaine public sur le web. Je sais par exemple que ma hiérarchie pourrait très facilement dégotter ce blog et me retracer, surtout depuis que mon classement Wikio est élevé. Je fais toujours très attention à rester dans le domaine de l’acceptable à cause de cela, et je préserve l’anonymat, même s’il est très formel, pour éviter que mes élèves ne pensent que mes cours sont orientés, ce qu’ils ne sont pas.

Or, il y a un problème important dans Facebook, à mon sens. Tu peux finalement entièrement décider de ce que tu inscris sur Facebook et de ce que tu n’y inscris pas, de ce que tu rends public et de ce que tu protèges, à qui tu donnes accès à tes informations. L’intimité est du ressort de chacun : Gaël, par exemple, m’avait tagué dans une chaîne visant à diffuser sa playlist musicale préférée, ce que je me suis refusé à faire. J’ai estimé la musique trop intime et trop personnelle.

Par contre, tu ne disposes absolument d’aucun contrôle sur ce que font les autres membres du réseau. Cela est net avec les photographies et les vidéos. Lorsqu’une personne publie une photo sur laquelle tu te trouves, il peut t’en avertir en mettant ton nom sur la photographie. A ce moment-là, libre à toi de hurler sur ton pote pour qu’il retire cet infâme cliché si tu estimes que cela n’en vaut pas la peine.

Par contre, il peut aussi ne rien te dire et ne pas inscrire ton nom. La chose est encore plus probable si la personne qui publie la photo ne sait pas que tu te trouves sur Facebook. Imaginons alors que son profil soit public, et voilà un beau désordre en perspective.

En clair, sur Facebook, cher lecteur, on ne maîtrise rien, pas un seul instant. On a l’impression de contrôler son droit à l’image, mais rien n’est plus faux. Je ne sais pas s’il y a déjà eu des procès lancés contre le site, mais il me semble que les failles sont nombreuses et risquent bien, à un moment ou à un autre, d’en susciter.

Pour se protéger vraiment, une seule solution, ne pas y être !

En attendant, je file mettre le lien vers ce billet sur mon statut Facebook, histoire d’attirer quelques visiteurs…

Sous la pression du regard de l'autre.

Hier soir, cher lecteur, j’ai eu l’occasion d’entendre un morceau de l’excellente émission de Zoé Varier, « Nous autres », qui était consacrée au stress des cadres, et particulièrement à l’open space. Une bonne partie du programme se ciblait sur la pression que l’open space inflige aux cadres, toujours sous la surveillance des collègues et de la hiérarchie.

Bizarrement, en cette soirée de début de vacances, c’est mon métier qui m’est revenu en me baignant dans l’open space.

Pas si bizarrement que cela finalement. Lorsqu’on est enseignant, on passe toute sa vie sous le regard des autres, en permanence, dès le moment où l’on franchit la grille de l'établissement.

Je me souviens, cher lecteur, de mon tout premier cours, le moment où j’ai senti le poids du regard de l’autre, des autres, de mes élèves. C’était le vendredi 5 septembre 2001, devant une classe de seconde. Dans ma tête, jeune agrégé plein de connaissances et très sûr de lui, j’étais encore un étudiant. Je pensais à toute une série de références bibliographiques, à des connaissances pointues et denses. J’avais bossé ce premier cours de nombreuses heures : il était consacré à la citoyenneté à Athènes au Ve siècle avant J.-C.

J’ai ouvert la porte de la salle de cours à mes élèves, qui sont entrés et se sont installés. Je me suis mis à l’avant de la salle. Ils me fixaient tous, comme des gamins qui découvrent un nouveau professeur et qui se demande déjà à quelle sauce ils vont être mangés. Pendant quelques instants, j’ai flotté, et là, brusquement, je n’étais plus un étudiant en histoire, j’étais un enseignant, un adulte, qui allait transmettre des choses et mettre en œuvre son apprentissage pour former des jeunes. Là, j’ai commencé à parler, et j’ai passé la barre.

Depuis, le regard des autres est permanent. Lorsqu’on arrive au bahut, on est d’abord confronté à ses collègues et à ses supérieurs hiérarchiques, qui sont à la porte pour voir si tout se passe bien. Ensuite, dès que l’on sort de la salle des professeurs, au moment de la sonnerie, les élèves sont là et vous fixent. Dès que vous faites la moindre bêtise, le moindre faux pas, les élèves vous regardent, se moquent, jugent et papotent. En cours, on est au centre de l’attention en permanence. Quant on est intéressant, c’est positif, mais sinon, c’est pénible, très pénible… L’enseignant est un peu un acteur, toujours en train de jouer à l’enseignant, face à des élèves qui jouent aux élèves. On a aussi droit aux parents d’élèves, toujours critiques, à bon escient ou non. Et puis, une fois de temps en temps, l’inspecteur, qui essaie de vous jauger.

Cette idée d’être un acteur qui s’ignore… Lorsque j’étais en formation à l’IUFM (tu sais, cher lecteur, le machin que Sarkozy et Pécresse veulent supprimer), j’avais balancé cette image lors d’une de nos séances de brainstorming sur notre activité. Le formateur m’avait dit que nous n’étions absolument pas des acteurs. Dans le fond, il avait raison : nous ne sommes certainement pas des acteurs, nous sommes nous-mêmes face aux élèves, mais indéniablement, nous jouons un rôle.

En écoutant ces cadres raconter la pression de l’open space, j’ai repensé à la pression du regard des autres, permanente et lancinante. Nos vacances sont aussi un moment où nous échappons à ce regard, pendant quelques jours. Nous nous remettons, nous réfléchissons à nos cours, nous corrigeons quelques copies en souffrance, nous partons deux-trois jours en vacances, nous faisons un peu la fête.

Et nous revenons, quinze jours plus tard, prêt à se confronter, à nouveau, au regard des autres.

samedi 14 février 2009

Et pendant ce temps, le gouvernement tente de pourrir la grève de la Guadeloupe.

Cher lecteur, à force de rester silencieux, je me suis fait griller par Toréador qui, en quelques lignes bien sentis, a résumé ce que je pense depuis plusieurs jours.

Comme tu le sais peut-être (mais vu le traitement médiatique du sujet, je te pardonnerais si ce n’était pas le cas), la Guadeloupe est totalement paralysée depuis plusieurs semaines par une grève générale d’une ampleur inconnue jusque là. Il y a huit jours, la Martinique a embrayé et il semble que la Réunion ne tarde pas à sauter le pas. En effet, un préavis de grève a été déposé pour le 5 mars à la Réunion.

Soucieux d’éviter une contagion sur la métropole après la grève massive du 29 janvier, les médias français ne cessent de déblatérer sur les problèmes structurels que connaissent les DOM, sans pour autant faire le lien évident avec la crise générale des salaires que connaît l’ensemble des pays développés. D’ailleurs, on a même lancé un discours insinuant que tout est encore de la faute de l’État, à cause de la prime que touchent les fonctionnaires qui acceptent de venir travailler dans ces îles. Ces privilégiés sous statut tireraient les prix vers le haut, alors que les salaires du privé sont bien plus bas en moyenne.

Ce que je trouve délirant, c’est la légèreté du pouvoir dans cette affaire. Cela fait presque un mois que les Guadeloupéens ne travaillent pas. Réfléchis un peu à cela, cher lecteur : un mois de paie perdu, un gouffre financier pour des gens qui sont déjà assez mal payés. Face à cette impressionnante détermination, le gouvernement joue la montre : Yves Jégo attend deux semaines avant de daigner s’y rendre, et revient en catastrophe, vexant tout le monde sur place, pour y retourner puis revenir tout aussi vite. Sarkozy ne dit rien le 5 février sur ce conflit, pas un traître mot. On nomme enfin deux médiateurs qui sont délégitimés par le comportement antérieur des politiques.

Tout cela n’a qu’un seul sens : évitez que les Français adoptent en France le même moyen d’action. Là se niche ce discours permanent sur les spécificités locales. Je suis sûr qu’à l’Elysée et à Matignon, on prie pour que ces grèves ne rentrent pas en résonance avec le mouvement du 19 mars.

Je ne vois pas bien comment les Guadeloupéens vont sortir de ce conflit. S’ils perdent sans rien obtenir, l’humiliation va s’installer. Toute une population rabaissée, ce n’est pas bon pour la tranquillité de notre pays.

En m'attendant, quelques lectures.

Ces derniers jours, cher lecteur, j'ai été très pris. Avec les importants commentaires suscités par mes derniers billets, je n'ai pu que commenter et re-commenter.

En attendant que je puisse de nouveau écrire mes billets, voici quelques conseils de lecture :
  • Vogelsong publie un billet limpide sur les discours dominants actuellement sur les causes de la crise et les vertus du libre-échange.
  • Nicolas cherche la lumière. Espérons qu'il la trouvera.
  • Didier Goux l'a trouvé.
  • Rubin propose d'ouvrir les vannes de l'immigration, ce que je ne peux que soutenir.
  • Manuel continue à nous raconter ses voyages.
  • Homer est lassé.
D'un autre côté, je suis encore en vacances à partir de ce soir. Dès demain, je m'y remets.

En attendant, bonne lecture, et à demain !

jeudi 12 février 2009

L'euro va-t-il disparaître ?

Je voulais te signaler, cher lecteur, la très intéressante émission qu'a réalisé France Inter ce matin durant sa matinale. Je te mets en lien ici la première partie, et la seconde.

Nicolas Demorand recevait deux intellectuels autour de la question du protectionnisme : Emmanuel Todd, historien et démographe, plutôt de gauche, et Christian Saint-Etienne, économiste et membre du Conseil d'Analyse Economique.

Je te conseille de ne pas t'arrêter à l'ambiance du débat, car finalement, chacun des deux participants étaient un peu pénibles : Todd s'est érigé en censeur et en vengeur, et Saint-Etienne était plein de sa position de conseiller de François Fillon.

Par contre, les deux duettistes sont tombés d'accord sur un point : l'euro est menacé à court terme (5 ans semble être l'horizon).

Pourquoi ? D'abord parce que, depuis le début de la crise, les gouvernements européens sont totalement incapables de coordonner leurs politiques, chacun mettant en oeuvre ses plans dans son coin. Surtout, le cas de l'Allemagne est fortement ressorti.

En effet, notre allié traditionnel poursuit obstinément sa stratégie visant à tout miser sur une offre puissante s'appuyant sur la demande asiatique, et continue à comprimer sa demande intérieure. Pour nos deux adversaires, réunis pour le coup, cette stratégie va succomber sous les coups de la crise mondiale, et l'Allemagne va connaître une récession terrible, entraînant l'ensemble de la zone euro dans sa chute. L'euro serait alors remis très violemment en cause par les autres Etats voulant sauver leurs peaux.

J'admets que je suis toujours resté dubitatif devant les stratégies économiques de l'Allemagne depuis l'arrivée du SPD aux affaires en 1998. Cependant, de là à imaginer un scénario pareil... Et toi, cher lecteur, qu'en dis-tu ?

mardi 10 février 2009

Et c'est reparti : grève générale et interprofessionnelle le 19 mars !

Aujourd'hui, cher lecteur, est encore une grande journée de mouvement social. Les universitaires et les étudiants manifestent. La manifestation parisienne part à 14h00 de la place Edmond Rostand, au RER Luxembourg.

Et puis, en me levant ce matin, j'apprends que les centrales rappellent à la grève le 19 mars 2009 !!! Damned, je ne pourrais pas la faire, j'accompagne un voyage scolaire à l'étranger à cette date.

Quel est l'inconséquent qui a choisi cette journée ??? Bon, il va falloir que je demande à Manuel de faire grève pour moi...

PS : aujourd'hui, les Israéliens votent. J'espère que mes prévisions seront prises en défaut...

lundi 9 février 2009

Eh oui, un bon blog politique peut être tenu par des femmes...

En lisant ce blog, je me suis dit que j'aurai bien aimé être une femme pour pouvoir y participer.

Venant d'un macho comme moi, c'est un compliment. Même Manuel, pourtant vieux réac, y trouverait son compte...

Un conglomérat de blogueuses de toute tendance s'est formé pour lancer Les Femmes engagées. Voilà une magnifique réponse au papier un peu provocateur que j'avais publié il y a quelques semaines, et qui m'avait valu une bonne série de critiques acerbes, même si je sais que je n'en suis pas du tout à l'origine. Quand je serai numéro 1, je pourrais me permettre ce type de jet d'arrogance.

Elles publient leurs billets le lundi. Les autres jours, vous pouvez les retrouver sur leurs propres blogs, qui valent tous le détour : Annieday, CC, Hypos, M., Mrs Clooney, Nelly Margotton, Olympe, Quitterie (sous les feux de l'actualité en ce moment) et Trublyonne.

Bonne lecture, bande de machistes !

Après 43 ans de politique d'autonomie face à la puissance américaine, la France rentre dans le giron de l'OTAN.

Il paraît que ça y est : la France revient dans le giron de l’OTAN. Je me désespérerais presque si je n’avais pas d’autres chats à fouetter.

Le général de Gaulle avait décidé de quitter le commandement intégré de l’OTAN en 1966. La France n’a jamais dénoncé le traité, mais elle a affirmé ainsi une autre vision de la politique internationale, pouvant se permettre de, une fois de temps en temps, critiquer les Etats-Unis.

Il faut le dire aussi : je ne vois pas bien en quoi nous avons encore besoin de la protection des forces américaines. L’UE dépense chaque année 30% des dépenses militaires de la planète, 10% d’entre elles étant faites par la France, deux pays disposent de l'arme nucléaire, les marines anglaises et françaises disposent de moyens réels. Certes, nous ne sommes plus capables d’entretenir 100 000 hommes en Irak, mais, franchement, cela vaut mieux. A part pour profiter indirectement des dépenses militaires monstrueuses des Etats-Unis, il n'y a que des dangers.

Avec cette décision, c’est aussi l’espoir d’une vraie défense européenne qui disparaît.

Ce choix sarkozyen, très discuté dans les médias et la classe politique, engage à la fois la France, mais aussi l’Europe toute entière. Certes, nos alliés ont plutôt rejoint les Etats-Unis, mais cela n’empêche pas que nous maintenions qu’une autre politique soit possible. En plus, les autres grands acteurs de la planète, qui pouvaient encore se dire que la France avait une voix différente (Chine, Russie, grands Etats sud-américains, Pays arabes, Israël…) en sont pour leurs frais.

Cher lecteur, les élections européennes approchent. Vu que le président se refuse à envisager un référendum sur cette question, on pourrait s’en saisir à ce moment-là. Cette élection est particulièrement adaptée à cette problématique…

dimanche 8 février 2009

Les islamistes ont gagné la première manche. Réagissons !

Les islamistes ont vraiment réussi un tour de force.

Lorsque j’étais gamin, j’étais moi-même élève dans un lycée dit difficile, que toutes les classes moyennes de la commune fuyaient à toute allure. Le ghetto scolaire existait déjà un peu. Dans les classes où je me suis trouvé, de nombreux gamins d’Afrique du Nord suivaient leurs études. A l’époque, je les définissais avant tout par rapport à leur origine nationale (Algérien, Marocain, Tunisien…) ou, éventuellement, par rapport au Maghreb.

Aujourd’hui, lorsque les Français parlent des populations de ces zones, ils évoquent avant tout les « musulmans ». Cette qualification est d’autant plus stupide que cela n’a rien à voir avec la nationalité ou les racines : c’est tout aussi incohérent que de définir un Français sous le terme de « catholique », de « protestant » ou de « chrétien ». Il y a bien longtemps, n’en déplaise à certains, que la France, fille aînée de l’Église, n’est plus un pays chrétien pratiquant.

Et pourtant, lorsque nos concitoyens croisent un homme ou une femme ressemblant de près ou de loin à un Maghrébin, c’est le terme « musulman » qui ressort. Les islamistes sont à l’origine de ce tournant. Leur discours, relayé par les médias occidentaux, vise à faire penser que l’islam, religion absolue du fait que le coran soit considéré par eux comme un texte de loi à visée politique, sublime toutes les origines nationales ou ethniques. Fini les Kabyles, les Berbères, les Arabes, les Perses, les Kurdes, les Turcs… Il ne reste que les musulmans, grand bloc fourre-tout qui n’a aucun sens réel, mais qui a l’avantage d’être pratique.

D’autant plus pratique que, comme l’islamisme est un ennemi de la démocratie, nous pouvons librement qualifier les musulmans, dans leur ensemble, d’ennemis car islamistes par nature. Ainsi, certains de nos concitoyens utilisent cet argumentaire pour rejeter tous les musulmans et réincarner leur racisme anti-basané, inacceptable dans la société démocratique qui est la nôtre. Le discours raciste rampant de l’islamophobie devient beaucoup plus légitime car soutenue insidieusement par toute la droite néoconservatrice occidentale depuis les attentats du 11 septembre 2001.

En nous imposant leur vocabulaire, avec le soutien tacite d’une partie de nos médias et de nos élites, les islamistes ont gagné la première manche. Ils ont, de fait, mis les musulmans de France dans une nasse dont ils vont avoir du mal à émerger. Ce piège, amenant à un rejet nouveau (les musulmans sont accusés d’être nos adversaires politiques, alors que les Maghrébins étaient simplement accusés d’avoir du mal à s’intégrer), va pousser certains d’entre eux vers l’islamisme.

Il est urgent de déconstruire ce processus pour abattre cette alliance nauséabonde des extrêmes-droites. Non, cher lecteur, un Maghrébin n’est pas forcément un islamiste, il n’est d’ailleurs même pas forcément un musulman ! Beaucoup sont agnostiques voire athées. Rejetons ce vocabulaire débile, et soyons plus intelligent qu’eux. Il en va de la force des valeurs de notre démocratie.

samedi 7 février 2009

Dans le 93, cher lecteur, on prépare la constitution de ghettos scolaires.

Il y a parfois des actions administratives qui dénotent le vrai fond d’une politique.

Comme tu le sais sans doute, cher lecteur, depuis maintenant deux rentrées scolaires, la carte scolaire a été relâchée. Répondant à quelques vagues valeurs libérales, et suivant un modèle déjà expérimenté (malheureusement négativement) au Royaume-Uni, l’idée était de permettre aux parents de choisir l’école, le collège ou le lycée de leurs enfants. Darcos avait légitimé cette politique en disant que les bahuts perdants des élèves conserveraient leurs moyens et pourraient adapter leurs politiques en fonction des problèmes locaux. Or, ces dernières semaines, le 93 illustre un virage politique.

En ce moment, cher lecteur, tous les enseignants sont dans l’angoissante attente des moyens que nous aurons l’an prochain. Cette Dotation Horaire Globale (DHG), en période de suppressions de poste, est déterminante, car elle indique si des collègues vont partir, ou pas.

Cette année, du fait du creux démographique des années 1990, les collèges classés du 93 perdent environ 1 000 élèves. On s’attendait donc à ce que l’inspection d’académie ferme environ 1 000 places dans ces bahuts. Or, bizarrement, ce sont près de 1 400 places qui devraient être closes l’an prochain. Tu vas te demander, cher lecteur, où vont aller les 400 élèves manquants ? Attends, cela vient.

Dans les collèges non-classés, il était prévu une hausse de 17 élèves. Or, l’inspection d’académie y ouvre 400 places ! Tiens, c’est marrant, cela correspond à la différence. On retrouve ces phénomènes dans des communes mixtes socialement où coexistent des classes défavorisées et des classes moyennes, les places se transvasant entre collèges difficiles et collèges en meilleure forme, comme à Drancy, Montreuil ou Bagnolet. Parfois, le phénomène est même intercommunal, puisqu’à Gagny, on installe les classes que l’on ferme à Montfermeil.

La logique est donc la suivante : l’administration anticipe les demandes futures des parents et prépare la migration des bons élèves vers les collèges calmes, incitant les parents, même s’ils ne le souhaitent pas, à partir, et soutenant aussi les réputations mauvaises des bahuts classés. En parallèle, et contrairement à ce qui était promis, les collèges difficiles perdent leurs places et devront affronter les élèves restants, les plus durs, avec des moyens moindres, ce qui permet à l’État de maintenir des dépenses à niveau constant.

Pour le moment, cette politique va vider les collèges durs et bourrer les autres, jusqu’à ce que le conseil général dise stop à cause des limites des bâtiments. Quelques collèges ZEP fermeront peut-être. Or, la baisse démographique ne va pas durer. Les classes se remplissent dans le primaire, du fait de la hausse démographique du début des années 2000. Dans trois ans, les collèges vont recommencer à voir les effectifs croître. A ce moment-là, les collèges centraux ne pourront plus fournir les demandes des parents.

Là, le processus s’inversera : les familles ne choisiront plus. Les collèges centraux prendront les meilleurs, et les autres iront remplir les collèges difficiles qui auront de la place, puisque les bâtiments permettront de revenir au dosage actuel, mais avec les mêmes structures que dans les bons collèges (surtout qu’on ne recrute plus d’enseignants).

Et ainsi, cher lecteur, on aura constitué, dans notre beau pays, et surtout dans notre belle région, de magnifiques ghettos de niveau scolaire, battant totalement en brèche l’idée d’égalité des chances. Il est encore possible de revenir là-dessus. Certes, les profs vont sans doute le dire, mais tant que persistera chez les familles cette peur sociale qui mine notre système, on est pas prêt non plus de progresser.