mercredi 15 juin 2011

A gauche, on s'enfonce dans le n'importe quoi, camarade.

L'affaire DSK a révélé, à propos de la gauche française, notre désarroi général. Jusqu'en mai dernier, malgré des débats de fond assez pénibles, nous étions plus ou moins persuadés que le PS allait l'emporter avec le directeur du FMI à sa tête. Certes, peu de gauchistes pouvaient en être satisfait. C'était d'ailleurs mon cas. Je ne voyais pas bien le sens de désigner à la tête du pays un droitier de ce type, mais nous étions sous le diktat des médias, et il semblait bien que mes camarades socialistes allaient encore, comme en 2007, suivre le vent des élites et désigner celui qui avait l'aval du haut de notre société. Il semblait pourtant clair que DSK risquait bien d'être un très mauvais candidat de 1er tour, mais cela n'importait guère.

Et puis, le candidat-miracle a disparu. Personnellement, ma première réaction, au plan politique, fut de me dire que tout cela n'avait aucune gravité. Vu que l'histoire nous donne en ce moment raison, que la crise a montré que  notre analyse était pertinente, en particulier sur la manière dont la crise financière a été gérée par les Etats européens, et que le libéralisme économique marquait le pas, il ne devait pas y avoir de problème. Le candidat importait peu, et tant mieux que ce ne soit pas un représentant de la même idéologie faisant faillite qui accède à la plus haute marche de l'Etat.

Or, depuis la mi-mai, c'est le désarroi qui domine à gauche. La victoire n'est plus assurée, les sondages ne sont pas tous positifs, Sarkozy remonte... Alors, on s'écharpe sur le candidat, sur la stratégie, sur la candidature unique ou multiple. En clair, on parle de tout, sauf du fond.

Ce qui peut surprendre, c'est que, malgré le contexte, les militants de droite restent convaincus de leur supériorité idéologique. Certes, ils sont agacés par la personne de Sarkozy, mais ils estiment toujours avoir raison sur le fond. Changeons de président dans cinq ans (on ne peut pas virer l'actuel, cela ne se fait pas), prenons quelqu'un de plus acceptable, et tout ira mieux.

A gauche, c'est plutôt le manque total de confiance en soi qui domine. Cela s'entend dans les discussions de comptoir ou de salle des profs. Mes collègues sont de plus en plus persuadés que l'on va repartir pour cinq années supplémentaires de Sarkozy.

Cette victoire idéologique de la droite est réelle et commence à être ancienne. Je la fixerai en 1983, mais le symbole reste la phrase de Jospin en 2001 sur la nature non-socialiste de son programme. Alors, si nous ne sommes même pas convaincus de nos propres idées, comment peut-on espérer que les Français désignent une personnalité et une majorité de gauche ?

J'en reste convaincu : la bataille idéologique est le fond du problème. Elle se mène partout et sur tous les plans. La victoire électorale vient ensuite.

Pendant ce temps, on sent venir la mélodie du vote utile et de la candidature unique, vote de vaincu par excellence et considération stratégique de boutiquier. Si on repart comme ça, on n'est pas prêt de gouverner ce pays, camarade.