vendredi 30 janvier 2009

Une belle journée de janvier, de l'intérieur...

Comme tu le sais bien, cher lecteur, je suis un déjà, malgré mon jeune âge, un vieux routard de la manifestation. Je n’avais pas particulièrement d’espérances sur cette action du 29 janvier. En plus, en sortant de chez nous, ma conjointe et moi-même avions constaté que le bordel annoncé n’était pas là : les transports en commun semblaient fonctionner assez normalement. Et puis, Paris était vide, totalement vide. Pas vide comme un dimanche, non, vide de manière inhabituelle. Rien à voir avec les bordels causés d’habitude par de gros mouvements de grève, comme ces hallucinantes séances d’auto-stop en région parisienne durant le mois de décembre 1995.

Vu le beau temps, nous décidâmes de traverser Paris à pied, en dressant l’oreille pour écouter les conversations des gens, les réactions. Nous captons, dans le troquet où nous nous arrêtons pour déjeuner, la conversation d’un groupe de salariés du privé. L’un d’entre eux raconte comment son DG a déboulé dans son bureau ce matin après avoir appris qu’il allait quitter son poste pour se rendre à la Bastille. Apparemment, de lourdes menaces, équivalentes à cette blague racontée dans les commentaires de ce billet de Manuel, assez révélatrices du respect profond, dans les structures privées, des managers et des employeurs pour le droit de grève.

En approchant de la Bastille, les rues se densifient. On croise de plus en plus de gens, équipés de chaussures de randonnée et de divers panneaux, aux slogans les plus divers et les plus variés. Ça prend des cafés dans les troquets, voire des verres de rouge. Ça rigole beaucoup.

En arrivant sur la place de la Bastille, c’est le choc. La place est déjà noire de monde, alors que nous sommes une demi-heure avant le rendez-vous. Nous allons nous tasser vers le cortège des enseignants, entourée d’une foule d’assez bonne humeur, mais nerveuse. Il est 14h00. Les bousculades sont de plus en plus fréquentes. La CGT, qui doit partir en tête, commence à peine à s’ébranler, alors que le boulevard Beaumarchais est déjà noir de monde. A 15h30, on apprend que la tête de cortège est arrivée à Opéra, alors qu’on a pas bougé, et que la place de la Bastille ne désemplit pas. Les chiffres de la manifestation de Marseille circulent dans la foule, mettant du baume au cœur à tout ce petit monde, et permettant de se moquer des agents des ex-RG qui ont des méthodes de décompte de plus en plus drôles.

A 16h30, fatigué, je décide de m’extraire du cortège prof pour partir avec la CGT.

La foule piétine, vu le monde, mais avance, déterminée. Les slogans sont d’une extrême variété. Je me retrouve dans le cortège de la CGT du privé du Val d’Oise. Les salariés hurlent des slogans très offensifs sur les salaires, mais, à l’évidence, c’est la peur qui domine. Progressivement, la fatigue aidant (de même que le mojito à 1,50 € de la CGT, avec de l’alcool dedans et une vague feuille de menthe pour décorer), les slogans changent. Des « Sarko démission ! » commencent à fuser.

A 18h00, on atteint République. Je n’ai malheureusement pas aperçu Martine Aubry, juste Arlette Laguiller de loin… Je poursuis ma progression jusqu’à la Porte Saint-Martin, beaucoup plus rapide car la rue est plus large et que les manifestants commencent à repartir pour rentrer chez eux, mais je n’en peux plus. A la porte Saint-Martin, je décide d'abandonner.



A l’évidence, cette manif était exceptionnelle. Dans quelques heures, après mûres réflexions sur ce sujet, je vous dirais comment j’analyse les comportements et les slogans des manifestants.

PS : les photographies et la vidéo de ce billet ont été réalisées par mes soins. Tous droits réservés.

8 commentaires:

  1. Oui c'était du pur bonheur! Et pour tout te dire, moi qui est passé l'après-midi dans le cortège PS, je n'ai pas vu Martine Aubry que de loin!!! Il y avait foule compacte autour d'elle!

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  2. Les slogans sur les banques étaient tout simplement les plus nombreux. Attention donc au retour de bâtons pour ceux qui vont devoir prendre des décisions dans les prochains jours !

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  3. @ Abadinte : de toute façon, à part le côté people, il n'y avait pas grand intérêt à la voir...

    @ Fredo : tiens, les banques, cela ne m'a pas tellement frappé. J'en reparlerai.

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  4. Oui, oui oui c'était beau !! Je suis restée jusqu'à 20h à regarder défiler tout le monde entre répu et St-Martin, après un aller retour (comme toi, j'ai démarré avant les profs). Pas vu les personnalités mais je m'en fiche, j'ai vu beaucoup mieux : la foule...

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  5. Belle mobilisation, mais 1 seul jour et pas de reconductible c'est... Comment dire. Du foutage de gueule ?

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  6. @ MGP : ça, la foule, on l'a vu. Bravo d'avoir tenu jusqu'à 20h00 en tout cas.

    @ LJEM : difficile de mettre 2,5 millions de personnes en reconductible comme cela. Les mouvements sociaux, cela se travaille.

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  7. Bravo Mathieu, pour ce reportage sur une "belle journée de janvier".
    De mon côté, j'ai fait la manif en solitaire, à contre-courant et du coup j'ai vu presque tout le monde.
    Voir mes photos sur:
    http://manif29janvier.blogspot.com/
    Cordialement

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  8. @ Douchko : merci à la fois pour la découverte de tes photos (elles me donnent encore le frisson) et pour le lien vers mon site sur ton blog.

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