jeudi 14 juin 2012

Campagne de second tour en Seine-Saint-Denis : simplement minable !

Je te parlais avant-hier, cher lecteur, des difficiles relations internes à la gauche en Seine-Saint-Denis.

Traditionnellement, les médias affirment que c'est Mélenchon qui, durant la campagne, a été très agressif avec le PS, alors que celui-ci s'est contenté de l'ignorer. En réalité, les conflits sont nettement plus anciens.

Dans le 93, les problèmes ont commencé au début des années 2000. A l'époque, le PS a décidé, sûrement sous l'impulsion de Claude Bartolone, de s'attaquer au Conseil général, alors que les mairies communistes commençaient à tomber. Le PS a donc attaqué des cantons tenus de longue date par le PCF et a progressivement pris l'avantage. En 2008, l'assemblée départementale a basculé au PS, même s'il y a encore 30% de conseillers généraux au Front de Gauche aujourd'hui.

Cette tactique s'est faite dans une violence réelle, qui s'est matérialisée aussi aux législatives et aux municipales dans plusieurs communes du département. Ce fut le cas à Saint-Denis, La Courneuve, Pantin, Aubervilliers et surtout Montreuil, où le PS a participé à l'éviction progressive de Jean-Pierre Brard de la mairie et aujourd'hui de l'Assemblée nationale. Evidemment, cette évolution est intimement liée à la chute du PCF mais, contrairement à d'autres zones du territoire, le PS n'a pas préservé ici les élus communistes, préférant s'appuyer sur les Verts. Depuis la fondation du Front de Gauche, les votes en sa faveur ont augmenté, mais le PS a gagné plus d'électeurs du fait de la gentryfication de l'ouest du département.

A cette élection, le Front de Gauche présentait quatre députés sortants, tous des vieux routiers du PCF et Braouezec, actuellement à la FASE mais ancien du même PCF. Cependant, ces députés ont été frappés par la poussée du PS suite aux présidentielles : Marie-George Buffet est passée de justesse (et son adversaire PS est majoritaire à la Courneuve), Braouezec et Brard sont arrivés deuxième et seul François Asensi a largement devancé son adversaire EELV soutenu par le PS dans le Nord-Est du département. Là encore, la campagne a été très dure et assez loin du débat d'idées gauche-droite. Je n'incrimine personne : les deux camps sont autant responsables l'un que l'autre, et les inimitiés restent durables. On est très loin d'un quelconque Front populaire ici.

Or, comme je te le disais mardi, Patrick Braouezec a choisi de mener une stratégie solitaire et de se maintenir contre son jeune concurrent PS, Mathieu Hanotin, en allant à l'encontre de l'accord de désistement traditionnel à gauche. Comme je te le disais hier, je pense que c'est une grosse connerie : c'est la droite et l'extrême-droite qui vont choisir et en général, ils préfèrent le PS au FdG.

Cette décision aurait pu faire échouer l'accord général et entraîner la disparition de tous les députés FdG du département. Heureusement, les autres se sont tenus et le PS n'a pas rompu l'accord.

Or, tout n'est pas facile. Marie-George Buffet aurait émis deux communiqués, soutenant tour à tour le candidat PS et Braouezec. François Asensi s'est aussi prononcé pour un soutien. Là encore, c'est le désordre. On peut comprendre : tous ces gens sont dans le même mouvement et ils ont du mal à lâcher un copain. En plus, on en profite pour essayer de régler ses comptes avec le PS local...

Et celui-ci réplique ! Par exemple, voici un communiqué minable de la candidate PS battue de La Courneuve, qui accuse Marie-George Buffet d'être liée à des fraudes électorales au Blanc-Mesnil et d'avoir négocié une circonscription au poil avec l'UMP, circonscription qu'elle a pourtant failli perdre. S'il y a soupçon de fraude, qu'elle attaque ! Et sinon, qu'elle se rappelle que les adversaires, ce sont l'UMP et le FN, pas le FdG.

En clair, on n'est pas sorti du bordel ! Personnellement, je crois que le PS fait une grave erreur en éliminant tous ses concurrents de gauche (EELV s'est bien fait avoir durant ce scrutin, et le FdG a été un adversaire plus qu'un concurrent, comme à Hénin-Beaumont) tout en maintenant en vie des mouvements sans réelle implantation et sans militants comme le MRC ou le PRG. Au final, le PS va diriger seul et aura les mains libres. Cependant, il devra aussi assumer seul toutes les conséquences de la politique qu'il va mener, sans accepter aucun amendement d'autres mouvements de pensée.

Et là, cela peut faire très mal dans les prochaines années. L'évolution du PASOK devrait pourtant servir de leçon à tout ce petit monde...

4 commentaires:

  1. Merci pour cette note pertinente. Pour ceux qui ont connu l'Union de la Gauche, la stratégie à l'oeuvre est incompréhensible et ce d'autant qu'elle présente de très gros risques dans le moyen terme, n'est pas le fruit d'un choix des militants et met à l'écart des forces militantes de longue date ... Or, on a besoin de tout le monde pour réaliser le changement !

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  2. La stratégie à l'œuvre est très simple : éliminer tout ce qui n'est pas PS. Et, au sein du PS, éliminer doucement mais sûrement tout ce qui n'est pas soc-dem parfaitement incolore. Le but est bien sûr d'éliminer, plus encore que la contestation, toute discussion et tous ceux qui ne s'aligneraient pas spontanément sans discuter.

    Je partage bien sûr la conclusion de Mathieu...

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    1. @ Partageux : cela peut changer. La réalité finit toujours par s'imposer.

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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