samedi 6 novembre 2010

Conversation de bistro : le rôle du délégué du personnel.

Mercredi soir, je me trouvais dans un dîner en ville et j'écoutais nonchalamment une convive qui racontait ses aventures dans son entreprise. Apparemment, elle bossait dans une grosse boite du monde de l'informatique. J'ai brusquement dressé l'oreille lorsqu'elle se mit à décrire les élections pour les délégués du personnel (DP), qui se déroulent en ce moment. Il semble que les candidats de sa boite aient décidé de ne pas respecter le droit social en envahissant les boites mails professionnelles de nombreux pamphlets.

Intéressé par la vision d'une personne du privé sur ces élections, je lui demandais si ces DP étaient syndiqués. La convive me répondit que les deux existaient. On trouvait d'un côté des délégués issus de syndicats spécialisés dans l'informatique (dont je découvrais ainsi l'existence, pensant que les centrales avaient délaissés ce monde très mobile, très jeune et souvent assez à droite, il faut bien le dire) et de l'autre, des délégués du personnel maison, sans attache particulière.

Immédiatement, je fis la réflexion suivante : "mais un DP qui n'appartient pas à un syndicat est inutile..."

Il faut que je m'explique sur ce sujet. Pour moi, un DP est censé représenter les personnels face aux employeurs. Il doit pouvoir porter une parole, servir d'interface entre deux mondes qui, dans les grosses structures, peuvent s'ignorer parfois, mais il doit aussi être capable, à un moment, de faire jouer un rapport de force. Or, il est vrai que ce dernier relève plutôt de la structure syndicale que d'un DP. Dans ce cas, pour gagner en efficacité pour tout le monde, il vaut mieux que le DP soit directement lié à une centrale. C'est d'autant plus intéressant que les syndicats fournissent énormément de soutien à des DP parfois en difficulté, qui peuvent ne pas bien maîtriser le droit du travail mais aussi le fonctionnement d'une entreprise. Ils fournissent aussi du matériel et surtout des arguments.

Ma convive a réagi de la manière suivante : "je ne vois pas pourquoi tu dis ça. Certes, un syndiqué fait plus bouger les choses et nous apporte beaucoup, mais le mien a tendance à toujours être contre les patrons. C'est pénible. Les non-syndiqués sont plus pragmatiques et gèrent au quotidien."

Ce débat est récurrent dans les salles des profs, où il existe de nombreux DP non-syndiqués, voire élus en opposition aux syndicats. Souvent, pris dans une dynamique locale de notabilité, ces DP se montrent très empressés de s'attaquer à toutes les questions locales qui peuvent ennuyer les collègues, comme le manque de petit matériel, la panne d'un ordinateur en salle 203, la qualité des repas à la cantine ou la tenue de la fête de fin d'année. Par contre, ils se retrouvent en difficulté dès qu'on aborde des problématiques plus générales qui touchent l'ensemble de l'Education nationale. Comme ils sont ancrés localement, ces DP décident très majoritairement de composer avec les chefs d'établissement et deviennent les vecteurs de la mise en place de réformes que les enseignants contestent souvent. Il est vrai que ces dernières années, les syndicats ont eu du mal à structurer des grands mouvements d'ensemble gagnants, et les profs ont tendance de plus en plus à se diriger vers cette inaction-résignation-collaboration.

Pour moi, le travail reste pourtant un lieu fondamental de la construction de la pensée politique. Il s'agit de l'endroit où on passe quand même le plus de temps et où l'on se retrouve confronté au système dans lequel on vit, que l'on travaille dans le public ou le privé. Dans cette configuration, il est donc indispensable de désigner des représentants qui ont une vision claire du travail et qui sont prêts à la confronter à celle des employeurs. Les syndiqués ont souvent cette vision. Personnellement, même si je me retrouvais dans un bahut où s'opposeraient une liste de non-syndiqués à une liste du SNALC, le syndicat de droite, je voterais pour ce dernier, tout simplement parce que je saurais ainsi vraiment pour qui je vote, sans avoir besoin d'y faire rentrer la dimension affective et celle du copinage.

Mais, cher lecteur, revenons à ma conversation de mercredi soir. Suite à la réaction de ma convive, je pensais donc qu'elle devait avoir affaire à un patron plutôt bienveillant à l'égard de ses salariés, ce qui pouvait expliquer l'agacement que provoquait le syndicaliste du cru, avec son envie permanente de pendre les patrons. Je lui posais donc la question.

Voilà la réponse que j'obtins : "Oh, le patron, bon, ben, en fait, il défend ses actionnaires..."

Va comprendre...

14 commentaires:

  1. Bravo bravo bravo cent fois bravo!! Le Privilégié montre son indépendance d'esprit en même temps sa capacité d'ouverture qui est remarquable! JE SUIS HEUREUX d'être son collègue!
    Un peu de clarté, ça soulage quand l'intelligence est si souvent dévoyée et les imposteurs sans limites!
    L'Anonyme

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  2. Position de principe, qui fait du bien à entendre, d'autant plus qu'elle se fait rare.

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  3. @ L'Anonyme : merci pour les compliments.

    @ Manuel M : il est important d'avoir des positions de principe et de structurer sa pensée. Cela permet aussi de s'adapter en étant clair avec soi-même.

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  4. Le fait que ton interlocutrice bouchée travaille dans l'informatique ne m'étonne pas. Parce qu'il faut bien dire aussi qu'en plus d'être souvent à droite, on y est aussi encore plus souvent, très inculte.

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  5. En tant qu'ex-DP non syndiqué d'une liste élue en grande partie contre Le syndicat, je trouve l'analyse un peu courte ;-)
    Précision : je suis dans un établissement où, depuis un certain temps, il n'y avait plus qu'une liste, syndicale, et un (très) fort taux d'abstention (plus de la moitié). Pendant les deux ans où notre liste a existé (elle n'existe plus faute de candidats titulaires en nombre suffisant), le taux d'abstention était devenu très faible. Depuis qu'il n'y a à nouveau plus qu'une seule liste, le taux d'abstention est redevenu important (la liste syndicale unique a obtenu 52 des 61 suffrages exprimés, sur 136 inscrits...). Bref deux listes, c'était plus démocratique.
    Ceci dit, clairement cette liste était élue (et majoritaire pendant 2 ans, en partant de rien) contre - ce qui interroge d'ailleurs, si on généralise, sur les raisons de ce recul des syndicats souvent signalé - plutôt que pour.

    C'était une liste de non-syndiqués, de toutes sensibilités j'imagine (je n'ai pas demandé qui votait quoi en acceptant d'y participer), réunis avec la volonté de traiter de problèmes locaux (internes à l'établissement), effectivement. Pas par souci de notabilité locale, mais parce que ces problèmes, souvent mis en avant par les collègues, n'étaient pas assez entendus ni traités par la liste syndicale, à qui il était reproché de privilégier les sujets politiques globaux au détriment du reste. Là-dessus, clairement le contexte dans l'Éducation nationale montre que, sur de nombreux points, il est illusoire de penser séparer le local du national. Sur d'autres, la direction a ménagé la liste syndicale, il me semble, et surtout pas assez répondu aux propositions de la liste non-syndicale (argument le plus souvent évoqué par les co-listiers qui ont laissé tomber pour la 3e année). Sur un projet de fusion avec un autre établissement, les deux listes avaient su créer un rapport de force en s'opposant au projet (la liste non-syndicale étant attendue au tournant...).
    En tant que membre de cette liste non-syndicale j'ai tout entendu : liste de collaborateurs (le choix des mots quand on parle à un prof d'Histoire...), liste du proviseur, liste de droite (avec des racistes, m'a-t-on même affirmé...), liste de rigolos incompétents, liste qui ne travaille pas (mais dont tous les membres étaient toujours présents à tous les CA...), liste qui pique les idées de l'autre liste, etc... La démocratie, parfois, c'est un combat...

    J'ai entendu aussi l'argument : deux listes oui, mais syndicales... J'ai tendance à penser que c'était plutôt : deux listes oui, mais soyez très minoritaires. On pourrait aussi analyser cette étrange position (je l'analyse personnellement comme cela) en termes d'image historique de l'établissement, d'équilibres syndicaux locaux (aux échelons supérieurs), de maintien de positions d'ancienneté dans l'établissement chez certains qui du coup se considèrent comme plus "légitimes" (pas mal de "récents" sur la liste non syndicale, et d'anciens syndiqués déçus aussi, d'ailleurs) : donc "dimension affective" et "copinage" ne sont pas l'apanage des non-syndiqués, à mon avis.

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  6. suite :-)

    Je suis d'accord sur le fait qu'il est difficile de faire vivre une liste non-syndicale, qui repose sur des bonnes volontés plus que sur du militantisme. Ceci dit, les difficultés de mobilisation étaient les mêmes pour la liste syndicale, y compris pour les grèves.

    Effectivement, la liste non-syndicale a plus souvent voté dans le même sens que l'administration de l'établissement que la liste syndicale, qui pendant ces deux ans a par exemple toujours voté contre les DGH, et s'est abstenue sur d'autres points. Je dirai : chacun ses positions, sans qu'on en déduise que voter dans le même sens veut dire "être les vecteurs de la mise en place de réformes contestées", surtout quand certains qui votent contre en CA participent par la suite à leur mise en place... C'est l'éternel débat, quand une réforme est adoptée, entre une position "réformiste" (le terme ne va pas ici, mais en gros l'idée, que je défends, serait : la réforme s'applique, nous n'avons pu l'empêcher nationalement, localement investissons-là pour l'appliquer au mieux de nos intérêts) et une position "révolutionnaire" (le terme ne va toujours pas mais : combattons la réforme en votant contre sa mise en oeuvre et en mettant l'administration- l'inspection d'académie-le recteur devant leurs responsabilités). Je pense qu'on risque plus à ne pas y mettre notre nez (je me place dans le cas d'une réforme démocratique, d'où mon ennui quand le terme "collaboration" apparaît). Après, tout dépend des pratiques de l'employeur, à ceci prêt que dans l'Éducation nationale l'administration n'est pas au sens strict notre employeur mais représente celui-ci, avec des pouvoirs limités (même s'ils ont tendance à s'étendre) par rapport à nous. Plutôt qu'utiliser le mot "confrontation", j'utiliserai plutôt le terme "cohabitation" (qui peut inclure le précédent, selon les circonstances)

    Des non-syndiqués pouvant avoir une vision très claire du travail, dans un bahut où s'opposeraient une liste de non-syndiqués et une liste SNALC, je voterais sans doute non-syndiqué (faudrait-il voir encore leurs discours).

    Je pense enfin (pardon d'être si long) que la vraie question à se poser, c'est : pourquoi les non-syndiqués le sont-ils, et pourquoi des listes non-syndicales arrivent-elles à concurrencer des listes syndicales ?

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  7. @ LCC : elle n'était pas bouchée, je pense, puisqu'elle discutait avec moi.

    @ Cloran : ton long commentaire impose une réponse construite. Allons-y dans l'ordre.

    Tout d'abord, je n'ai jamais écrit qu'il ne fallait qu'une liste à une élection. Nous ne sommes pas en URSS, et heureusement. Il y a 16 syndicats dans l'EN, donc largement de quoi faire des tas de listes.

    Pour répondre sur la suite, je vais me placer sur le plan du jeune collègue qui débarque et qui ne connaît personne. Si je vois une liste avec un sigle syndical, sans connaître personne, je peux me rendre sur internet sur le site du syndicat et je sais à qui j'ai affaire. Pour savoir ce que pensent Cloran et ses amis, je dois aller les interroger personne par personne. On peut supposer que vous avez rédigé une plateforme, mais est-ce que vous pouvez réellement avoir une parole claire en devant mettre d'accord 14 candidats alors que les syndicalistes n'ont qu'à s'appuyer sur les mandats ? De fait, le copinage joue plus pour vous que pour les syndicalistes qui peuvent se planquer derrière l'attachement syndical, même si tu ne les connais pas et ce quelle que soit votre sincérité par ailleurs, que je ne remets bien sûr pas en cause.

    Sur la "collaboration" (je ne vois vraiment pas ce que tu veux dire par d'éventuels sous-entendus que j'aurais employés à l'insu de mon plein gré), je ne partage pas ta division entre les deux visions. Nous sommes des fonctionnaires et nous avons le devoir d'appliquer les réformes une fois qu'elles arrivent, que nous soyons réformistes ou révolutionnaires. Cela ne se discute pas. Par contre, nous pouvons utiliser les moyens légaux pour les contester, que ce soit les votes en CA ou les grèves. Personnellement, j'ai tenté dans mon bahut de gêner la mise en place de la réforme du lycée par les moyens légaux, ce qui ne me permet pas de la refuser maintenant. Je fais le programme d'hg de seconde, même s'il ne me plait pas. C'est comme ça.

    Ce que je voulais dire par cette question du vote, c'est que voter pour ou s'abstenir est autant un choix que de voter contre. C'est très symbolique. Le vote pour signifie qu'on accepte la réforme. Le vote contre signifie qu'on la refuse, même si on travaille après avec le chef pour faire tourner la boutique, parce que, justement, nous sommes des fonctionnaires et que nous avons à coeur de faire fonctionner le service public. Au moment du vote, l'argument technique n'a aucun sens et ne devrait pas exister. Ce mode de pensée fait beaucoup de mal justement parce qu'il évacue le politique du travail, ce que nous ne devrions surtout pas faire.

    En fait, je lis dans ton discours que ce n'est pas le syndicat en lui-même qui posait problème chez toi, mais les gens qui l'animaient. C'est un vrai problème, mais peut-on déduire d'une situation locale en l’occurrence des généralités sur le syndicalisme ? On trouve des boulets partout, les syndicats n'en sont pas exempts.

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  8. Je tiens à répondre au commentaire de Cloran, car je trouve la situation décrite tristement banale.
    Je suis syndicaliste (à un petit niveau), et j’ai déjà entendu tous les arguments développés ici.
    D’entrée de jeu, dire qu’une liste non syndicale se présente « contre » me dérange. Et pourtant c’est chaque fois ce que j’ai vécu. Pour moi il ne s’agit pas d’être Pour ou Contre, mais d’essayer de proposer mieux ou différent.
    Pour le très fort taux d’abstention, on pointe directement la responsabilité unique des syndicats. Je veux bien, ils ne sont pas parfaits, loin s’en faut. Mais qu’en j’entends sur des blogs (z’influents comme certains aiment bien se présenter, juste pour dire qu’ils ne sont pas dupe …) que les syndicats ne parlent plus aux français (la preuve : 20% de syndiqués dans l’enseignement et 6% dans le secteur privé), je me demande plutôt ce que veulent entendre ces mêmes français. J’y vois plutôt une marque supplémentaire d’un individualisme qui mène notre société à sa perte. Et à la place de ceux qui stigmatisent les syndicats, je ne serais pas fier.
    J’ajoute que le syndicat, quel qu’il soit, c’est nous : syndiqués, non-syndiqués. Quand par exemple des négociations salariales sont menées au plus au niveau, je n’ai jamais vu la voix d’un non-syndiqué peser. Les syndicats les représentent eux-aussi. Je n’ai jamais vu non plus un non-syndiqué rembourser à ceux qui ont lutté à leur place une augmentation qu’ils n’ont rien fait pour obtenir. et j’ajoute que je ne suis pas pour qu’ils le fassent : les luttes sont collectives et les bénéfices doivent profiter à tous.

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  9. Désolé pour toi, Privilégié, je n’ai pas fini. Mais n’hésite pas à supprimer : c’est long et ch…ant et pas forcément toujours pertinent. C’est juste ce que je pense profondément. Et si vous supprimez, cela ne me paraît pas anormal : je n’ai qu’à créer mon blog.
    Je ne tiens pas à agresser de quelque façon que ce soit les non-syndiqués ; ce n’est pas ma pratique quotidienne ! Mais je pense qu’être non-syndiqué, ce n’est pas être libre comme cela m’a déjà été dit. C’est plutôt être seul. Ne peser sur rien ou presque. Agir en tant qu’individu. Et c’est pour cela selon moi que les listes non-syndicales ont toujours fini par s’effondrer autour de moi : elles finissent toujours par défendre des intérêts particuliers (les heures sup de M. Machin ou l’emploi du temps de Mme Chose), ou bien les individus composant ces listes ne se retrouvent pas dans le collectif. Et en disant cela, je ne tiens pas non plus à dénigrer le travail fait. Toutes les propositions faites ne sont pas à jeter a priori, et tout travail bénévole mérite d’être reconnu, surtout un travail de représentation, surtout d’enseignants ! Et le label syndical ne garantit pas la qualité des interventions.
    Autre argument récurrent : traiter le local. Je l’ai tellement entendu celui-là … Le local est très souvent accessoire, même s’il peut être parfois utile. Les sujets primordiaux qui sont traités en conseil d’administration sont la Dotation Horaire Globale et le budget, deux sujets qui n’ont rien de locaux. Et là les listes non-syndicales non seulement n’ont pas la main : pas de structure derrière elles pour peser auprès des instances compétentes (I.A., Rectorat et conseils généraux ou régionaux). Dans ce cas-là, l’exsistence même de ces listes est contreproductive : elles occupent une place où elles sont dans l’incapacité d’agir, et elles empêchent donc l’action d’autres personnes plus à même de le faire. Cela dit, je suis démocrate. Je le précise à tout hasard …

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  10. Le commentaire de Cloran précédent me dérange aussi quand il dit que sa liste repose sur des bonnes volontés et l’autre sur du militantisme. Les deux ne s’opposent pas : les militants ne sont pas rémunérés, et ils font preuve de beaucoup de bonne volonté. En effet militer coûte en temps et en argent, beaucoup plus que la plupart des collègues ne l’imaginent. C’est aussi pour cela que nous sommes en voie d’extinction selon moi. Comme je l’ai déjà dit, les valeurs véhiculées par ces combats sont contraires à celles véhiculées par la société.
    Pour la question des votes Pour ou Contre en C.A. par exemple, il ne s’agit pas de discréditer la position syndicale en pointant le prétendu double discours de certains syndiqués. Je fais parti d’un syndicat, cela crée un lien entre moi et les autres membres de ce syndicat. Mais cela n’en fait pas pour autant des amis ou des gens dont je cautionne tout a priori : les syndiqués ont aussi leurs faiblesses et leurs petites lâchetés quotidiennes. Mais j’ai tout de même du respect pour leur décision de donner parfois plus de 200 euros à une organisation qui est là pour défendre la profession, en particulier les plus faibles. Et cela même si la cotisation n’est pas toujours motivée par des sentiments très altruistes. Je précise que ceux qui disent qu’en se syndiquant au SNES pour ne pas le nommer on a la mutation souhaitée, c’est une légende urbaine ! Syndiqué depuis 22 ans, et titulaire durant tout ce temps, il m’a fallu galérer pendant 13 ans pour pouvoir enseigner dans un collège lambda dans le département souhaité.

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  11. Je reviens à la question des votes : voter Pour la DHG est se tirer une balle dans le pied. Encore une preuve de l’action contreproductive de bons nombres de ce type de listes. En effet les chefs d’établissement pratiquent toujours un « chantage affectif » en disant qu’on ne doit pas voter sur le montant de l’enveloppe, mais sur sa répartition. C’est une interprétation des textes, mais il est bien évidemment que si l’enveloppe est trop petite, la répartition ne peut pas être satisfaisante. Aussi je ne reprocherais pas à ces listes d’être « collabo » ou autres insultes prononcées sous le coup de la colère, pas de la réflexion. Je leur reprocherais leur ignorance, et c’est plus grave : quand on prétend représenter des gens, il faut essayer de le faire au mieux. Il faut se renseigner, bosser quoi. Il est toujours excusable de se tromper, mais je ne lis pas de regret dans le commentaire de Cloran. Il serait donc tout à fait capable de renouveler ces erreurs.
    Pour la position « réformiste », c’est un argument que je peux entendre. depuis quelques années, à force de combattre certaines réformes, j’ai l’impression d’être contre tout. Je précise aussi que la réussite de mes élèves est importante pour moi, pas seulement pour eux, mais aussi pour l’idée que je me fais de mon travail. Et en 22 ans, j’ai de plus en plus l’impression d’avoir des difficultés à atteindre mes objectifs. Les réformes, les propos du ministre, … sont souvent vécus par moi comme des embûches semées sur mon parcours. Et je suis fatigué.

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  12. Mais la position « réformiste » a ses limites : le but du gouvernement est de supprimer des postes, d’aller maintenant au-delà de la catastrophique RGPP. Les français, même s’ils ont « voté pour cela » le subissent. Faudra-t-il voter Pour jusqu’au bout ? Jusqu’à la suppression du dernier poste ? Dans mon collège, il y a 10 ans, nous étions entre 45 et 50. Nous sommes maintenant 35. Nous allons pouvoir revendre des casiers.
    Même si les mots « réformiste » et « révolutionnaire » sont atténués par les guillemets, ils en disent longs sur la vision du « camp d’en face » (je fais pareil, mais il semble que cela soit adapté à la situation …). Un peu trop l’impression d’être du côté des bons, des pragmatiques, de ceux qui veulent avancer. Il me semble nécessaire d’essayer d’adopter le point de vue adverse parfois.

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  13. Ensuite entre voter non-syndiqué et voter Snalc, le cas ne s’est jamais posé pour moi. Mais la vertu principale de la liste Snalc pour moi est de ne pas avancer masquée : on sait pour qui on vote (ou pas), ils défendent des idées, des positions de principe. La liste non-syndicale ne peut pas en dire autant.
    Quant au dernier argument, que du classique : j’y ai déjà répondu en parlant des blogs z’influents et des syndicats qui ne parlent pas aux français.
    Pour conclure, je ne suis pas meilleur que les autres. Pas plus tolérant en tous cas. En écrivant cela, j’ai mes œillères : je me dis « Encore un jeune collègue qui ne sait pas grand-chose sur certains sujets. De Robien en disant qu’avec les nouvelles générations dépolitisées, il y avait un levier pour accélérer les réformes. Même discours dans un rapport au Sénat (j’ai perdu le lien). »
    Je ne suis pas sûr d’avoir raison, et même j’espère me tromper. Mais la suite m’inquiète, car je le répète, je trouve la position de Cloran très répendue.
    Tout dernier point : cela me rappelle un autre serpent de mer qui consiste à demander aux syndicats « d’inventer une alternative à la grève ».
    J'ai fini. Sans rancune j'espère ...

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  14. @ Mathieu
    Le passage sur "collaboration" ne te visait pas du tout, ça concernait une réflexion qui m'avait été faite localement :-)

    @ Mathieu et Manuel M
    Je ne décris qu'une expérience locale, terminée aujourd'hui, et qui me pose beaucoup de questions. En tant que prof d'HG, je sais l'importance fondamentale des syndicats et combien il serait utile qu'ils soient forts. J'ai d'ailleurs été syndiqué, puis j'ai cessé (quand j'ai entendu, à l'issue de grèves, un représentant syndical tenir le même argumentaire, pour la fin de la grève, que le rectorat). Il est certain que le fonctionnement des personnes joue pour beaucoup. J'ai été aussi un temps le seul non-syndiqué sur la liste syndicale unique : ils m'avaient demandé de participer, puis ils m'ont expliqué qu'ils feraient une liste complètement syndicale, ce qui est, je le précise, absolument normal.

    Dans un poste précédent c'était la situation inverse : une liste non- syndicale unique (un mélange non-syndiqués / syndiqués de diverses affiliations), qui obtenait des scores plus que staliniens : situation pas saine non plus.

    Sur la DGH votée : votée parce qu'elle ne supprimait pas de postes (j'ai toujours voté contre les DGH qui en suppriment, parce qu'un représentant du personnel défend les intérêts du personnel). Effectivement la critique qui nous a été faite est "vous avez donc voté pour la réforme". Non, je suis contre la réforme, elle est désastreuse. Je participe aux grèves, aux manifs. Mais avec la DGH proposée les postes étaient préservés (à peu près d'ailleurs le seul lycée de la région à ne rien perdre de ce point de vue).

    La distinction bénévoles/militants est effectivement maladroite dans les termes. Je sais que les militants sont aussi bénévoles, mais ils ont un engagement supplémentaire, la cotisation, et souvent (pas tous) des convictions politiques fortes. Certains non syndiqués ont aussi des convictions politiques fortes, mais l'attachement à la représentation des collègues sur une liste est pour beaucoup bien moins fort. C'est là que j'utilise, mal, les termes "bénévolat" et "bonne volonté".

    Les syndicats sont-ils responsables de la désaffection ? Oui et non, pas tous seuls. Syndiqués ou pas, les représentants élus sont souvent un alibi pour les autres collègues, pour ne pas s'engager : on vote pour des délégués, et puis on ne s'y intéresse plus. Combien de collègues demandent le lendemain d'un CA ce qui s'y est passé ? Syndiqués ou pas , les représentants élus sont d'abord des gens qui s'engagent, au service des autres, et qui s'exposent d'ailleurs. Je pensais qu'une 2e liste c'était positif pour une plus grande diversité de l'expression et que ça permettrait une plus grande expression de tous les collègues : oui par le vote, mais hélas rien de plus que par le vote (déjà beaucoup, mais pas assez).

    Pas totalement d'accord, mais ça repose sur ma seule expérience, avec l'idée que les listes non-syndicales sont composées de gens pas au courant et qui ne bossent pas : nous étions très au courant des problèmes locaux et généraux, des demandes et remarques des collègues, des réformes, des questions techniques de DGH, et nous allions à tous les CA, toutes les commissions, tous les conseils de discipline, etc.

    Des regrets ? Pas sur les deux ans effectués ni sur les votes. Sur le fait de ne pas être syndiqué, surtout en ce moment, clairement oui. Pas exclu que je me resyndique d'ailleurs, après un petit délai de rigueur. Je suis d'ailleurs bien conscient que le meilleur moyen pour qu'une liste dure, c'est qu'elle soit soutenue par une organisation plus large, informée, technique, etc.

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