jeudi 11 septembre 2008

J.-M. Le Pen prend sa retraite. Enfin une bonne nouvelle ?

C'est vrai qu'en ce moment, l'actualité politique et économique ne donne pas envie de se réjouir. Entre le bordel au PS, la rehausse du chômage, la crise économique qui semble s'installer chez nous, EDVIGE, les politiques contre les étrangers, j'en passe et des meilleurs, le militant de gauche lambda a de quoi être abattu. Je regarde d'ailleurs avec toujours autant d'étonnement l'optimisme invétéré de la droite française devant les difficultés qui s'avancent et l'inefficacité patente de la politique gouvernementale pour relancer la machine et redresser le budget de l'Etat.

Mais il y a une bonne nouvelle, tombée ce matin dans nos journaux : Le Pen prend sa retraite. Enfin, le leader d'extrême-droite décide de jeter l'éponge. Il a écumé la vie politique française pendant une cinquantaine d'année. Le Pen a débuté sa carrière derrière Pierre Poujade dans les années 1950, se faisant élire député en 1956 pour la première fois. Il navigue ensuite dans l'extrême-droite française, submergée par la vague gaulliste. Il soutient Tixier-Vignancour en 1965, puis participe à la fondation du Front National en 1972 dont il prend vite le contrôle. Il est depuis candidat à la présidentielle à chaque fois sauf en 1981, n'ayant pu réunir les 500 signatures nécessaires. Il fait son premier gros score à la présidentielle de 1988, après des succès électoraux enregistrés par le FN à partir de 1983. Régulièrement, son score croît pour culminer en 2002 avec son passage au second tour de la présidentielle, à cause de l'effondrement du candidat socialiste.

En 2007, il ne faut pas le cacher, toute la gauche l'attendait au tournant. Marqué par 2002, beaucoup d'électeurs de gauche ont fait bloc derrière Ségolène Royal, entraînant l'effondrement des autres candidats (Buffet, Voynet, Laguiller, Bové...). Mais là, surprise ! Le Pen a été incapable de réitérer sa performance de 2002, s'effondrant aux alentours de 10% des voix. A l'époque, les journalistes n'ont cessé de parler du "siphonnage des électeurs du FN" que Nicolas Sarkozy a effectué, le présentant comme un réel succès du candidat UMP. Depuis, le FN vivote, en pleine crise financière et ayant été incapable de faire un score aux municipales de 2008, malgré le bon score de la fille du chef à Hénin-Beaumont.

Apprenant la nouvelle de la retraite, je ressens, cher lecteur, comme je l'avais déjà éprouvé en 2007, comme un lâche soulagement. Je fais en effet partie d'une génération qui a commencé à s'éveiller à la politique quand Le Pen est apparu comme un acteur central de la vie politique française. Toute mon adolescence a été marquée par la présence de ce personnage bizarre, à la fois très moderne dans sa manière de faire de la politique mais en même temps incarnation de tout ce que l'histoire de France peut compter d'expériences totalitaires et réactionnaires. Certains ont grandi dans le monde de la Guerre Froide, d'autres ont été marqués par Mai 1968 ou par l'apartheid. Moi, c'était Le Pen dans mon paysage politique, réapparaissant toujours à chaque grande élection, alors que les médias l'ignoraient totalement le reste du temps. En 2007, je me suis dit que nous allions enfin pouvoir faire de la politique sans craindre sans cesse que le FN parvienne un jour aux affaires. Une vraie bouffée d'air s'offrait à nous.

Mais ce soulagement ne peut être que lâche, car rien n'est en fait résolu. Certes, le FN est moribond et n'a plus de leader capable aujourd'hui de faire les scores du vieux chef. Cependant, les 20% d'électeurs qui votaient Le Pen en 2002 sont toujours là. Ils ont choisi Sarkozy et son discours de rupture en 2007, mais que feront-ils dans le futur, vu le naufrage actuel de notre économie et le démantèlement régulier et méthodique de l'Etat. Je ne vois pas ces électeurs-là se tourner ni vers le Modem, ni vers la gauche démocratique, ni vers le NPA. Il est à craindre que l'extrême-droite ressurgisse rapidement.

De plus, si Sarkozy est parvenu à "siphonner" l'électorat FN, c'est aussi qu'il a repris certains des discours lepénistes qui se sont diffusés parmi la droite démocratique. Je le constate parfois d'ailleurs dans les articles de la presse de droite, mais aussi chez mes camarades blogueurs de droite lorsqu'ils parlent des étrangers ou de certains thèmes économiques, voire de l'Union Européenne.

En fait, si Le Pen se retire vraiment, ne te rassure pas trop, cher lecteur. L'extrême-droite existait avant lui, et elle va lui survivre, et peut-être à une échelle que nous ne voyons pas encore bien mais qui mérite, indéniablement, qu'on s'en inquiète.

9 commentaires:

  1. Cette retraite... il aurait fallu qu'il l'eût pris plus tôt. On regrette l'absence dans sa nécrologie de ce qui a trait à son passé de tortionnaire. Et qui va faire survivre l'imparfait du subjonctif dans la glose politique ?

    RépondreSupprimer
  2. Les électeurs de Le Pen (quoique rejoints, paraît-il, par des milieux populaires qui votaient jusqu'alors communiste !), peuvent apparaître comme les héritiers virtuels de la France pétainiste. Une engeance qui se dissimulait dans la droite classique, honteuse, jusqu'à ce que l'apparition du tribun sans complexe lui rende l'envie de mordre. Quant aux temps que nous vivons, ils sont, sans surprise, ce que l'on pouvait prévoir à l'élection de N. Sarkosy. La mauvaise nouvelle, je trouve, c'est qu'une partie des français soient encore assez stupides pour lui faire regagner des points de popularité. Là, il y a de quoi saper le moral.

    RépondreSupprimer
  3. @ Mtislav : tiens, oui, je n'ai pas pensé à ça...

    @ LCC : c'est vrai, mais je ne crois pas que LP soit simplement le successeur de Pétain. Il cumule beaucoup de choses finalement : le catholicisme intégriste, le fascisme, le colonialisme, le racisme... Etonnant animal politique décidément...

    RépondreSupprimer
  4. Je revendique tout ce que vous venez de dire car je respecte JMLP pour son idéalogie ses valeurs ses moeurs son aspect moral ...Et je dis que l'avenir de notre chère France sera dans les mains de la bonne Marine LePen!
    Vivent la famille Le Pen!
    Matthieu Bérant, docteur en philosophie

    RépondreSupprimer
  5. @ Mathieu Bérant : c'est votre droit, mais j'ai peur que vous m'ayez mal compris. Le Pen, c'est un adversaire politique pour moi. J'espère avoir été clair.

    RépondreSupprimer
  6. Je vous est trés bien compris Matieu. Pout ma part j'ai également droit de dire ce que je pense non!
    Matthieu Bérent, docteur en philosophie

    RépondreSupprimer
  7. Veuillez m'excuser cher monsieur pour avoir mal écrit votre prénom qui ressemble si bien au mien à une lettre près.
    Matthieu Bérent,docteur en philosophie

    RépondreSupprimer
  8. @ MB : Evidemment, tous les commentateurs sont les bienvenus ici, tant qu'ils respectent les autres et qu'ils se comportent comme des gens bien élevés.

    RépondreSupprimer
  9. Les valeurs de Le Pen, quand on sait comment il s'est procuré sa fortune personnelle ... hmmm ...

    Pour moi c'est une bonne nouvelle, effectivement, cette retraite, car Le Pen était un personnage politique hyper doué, très charismatique, et pouvait ainsi fédérer dangereusement.
    L'extrème droite française n'est pas prête de retrouver une telle personnalité, même avec sa fille.

    Mais tu as raison, le problème de fond, ce sont les électeurs, et ceux là sont aujourd'hui derrière Sarkozy.

    RépondreSupprimer

Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

La modération des commentaires est activée 14 jours après la publication du billet, pour éviter les SPAM de plus en plus fréquents sur Blogger.