vendredi 12 juillet 2013

Réaction personnelle à la réforme du congé parental.

Récemment, a commencé à se discuter une éventuelle réforme du congé parental. Je suis tout à fait concerné puisque nous avons eu un enfant en décembre et que ma compagne a pris un congé parental. On pourrait de fait m'asséner que je me suis comporté en machiste qui a préféré laisser la mère se débrouiller avec les couches pendant que je continuais ma carrière. J'évacue immédiatement cet argument : je suis professeur, et donc, par définition, je n'ai pas de carrière au sens strict du terme ! Cela aurait pu gêner au niveau de mon engagement syndical, mais pas au niveau professionnel.

Il est d'abord intéressant d'essayer de comprendre comment on en vient à prendre un congé parental qui, à priori, provoque une baisse considérable de nos revenus : l'indemnité se monte à environ 570 € par mois, à comparer aux 1 700 € environ que ma femme touche habituellement.

Personnellement, j'étais contre. Dans mon esprit, mais là on est dans les méandres des névroses, il me semblait important que la mère reprenne le travail assez rapidement et ne s'enferme pas dans ce rapport bébé-maman qui peut aussi avoir des côtés négatifs. Pourtant, progressivement, je m'y suis rallié pour différents facteurs : ma conjointe le souhaitait réellement, nous voulions prolonger l'allaitement au sein au-delà de deux mois et demi, et nous trouvions tous les deux qu'il était bon que notre fille puisse profiter de sa mère un peu plus et ne soit pas balancée dans les structures collectives trop tôt. Ce dernier argument pourrait d'ailleurs être aussi assimilé à des névroses parentales : assumons-le.

Il faut bien avoir une idée en tête : en France, pays de la famille, paraît-il, le congé-maternité est court. Au bout de deux mois et demi, avec possibilité de prolonger 28 jours de plus, la mère doit retourner au travail, surchargeant les crèches et les nourrices avec de tous petits bébés. Et que dire du congé-paternité (14 jours en tout)...

Évidemment, pour la CAF, les choses sont claires : une femme ou un homme en congé touche son salaire à plein (sans les primes) alors qu'un congé parental est bien moins rémunéré. Là, on touche aux questions de gros sous, et on préfère donc travailler sur le congé parental que sur les autres congés.

Maintenant, cher lecteur, aurais-je pu, si je l'avais souhaité, prendre un congé parental ? Je pourrais dire d'abord que, l'un de nos objectifs étant l'allaitement au sein, je ne pouvais faire. Cependant, il existe maintenant des trayeuses qui auraient pu me permettre de continuer à donner le lait maternel sans que la mère soit présente. Certes, ce n'est pas ce que souhaitait ma conjointe, mais cela aurait été techniquement possible.

Reste cependant la question des gros sous. Ayant un salaire d'agrégé (mon fixe tourne à 2 750 €), nous avons une réelle disparité de revenus. De plus, nous assumons un crédit immobilier puisque nous avons cédé à l'appel du capital il y a trois ans, à un taux certes bas, mais cela pèse sur notre budget. En clair, il nous était impossible de se passer de mon salaire à plein sans être obligé de vendre notre appartement...

Au-delà de mon cas personnel, c'est bien, à mon sens, la faiblesse de la rémunération qui bloque les hommes, dès qu'une inégalité de revenus est présente en défaveur des femmes, ce qui est le cas dans une majorité des couples. Donc, si l'on souhaitait vraiment que les hommes prennent des congés autant que les femmes, il faudrait :
  • que la rémunération soit suffisamment attractive pour que des hommes ayant des revenus plus haut s'arrêtent ;
  • qu'un homme puisse remplacer sa conjointe au bout d'un certain temps, de manière assez souple, ce qui permettrait d'alterner et d'éviter un décrochage trop long pour l'un des deux conjoints du monde du travail, protégeant ainsi au moins partiellement la carrière ;
  • un allongement du congé-maternité et du congé-paternité, beaucoup trop courts.
Cela coûterait cher, mais après tout, la société subventionne largement les assistantes maternelles et les crèches. Reste à voir si les dépenses d'un côté équilibreraient les gains de l'autre. De plus, je ne m'inquiète pas vraiment pour les assistantes maternelles, complètement débordées par les demandes de garde aujourd'hui.

Reste un point difficile à faire évoluer : les mentalités, surtout à propos du travail des hommes et de leurs carrières. Là, j'ai bien peur que la puissance publique ne puisse rien, malheureusement...

lundi 20 mai 2013

Position sur la réforme des retraites à venir.

La réforme des retraites à venir commence à faire causer. Cela tombe bien : on nous a vendu il y a trois ans une réforme qui devait tout résoudre, et qui, bien évidemment, n'a rien résolu.

Il y a quatre manières de rééquilibrer les comptes du système de retraite :
  1. faire chuter le chômage, mais cela a l'air compliqué pour nos gouvernants actuels, et aussi pour leurs prédécesseurs d'ailleurs ;
  2. augmenter les cotisations, ce qui permettrait de réorienter une partie des flux financiers du capital vers les salaires (il ne faut pas oublier que les cotisations sociales sont une partie du salaire qui est prélevée et mis de côté pour des jours moins heureux) ;
  3. jouer sur les prestations des retraités en faisant baisser le poids des pensions ;
  4. jouer sur la situation des salariés en augmentant la durée de cotisation.
Je suis clairement pour la deuxième solution, et ce d'autant plus qu'on a déjà joué, dans toutes les réformes précédentes, sur le point 4. Quant au point 3, je suis résolument contre l'idée d'attaquer les pensions des retraités, car beaucoup touchent peu, et ceux qui touchent beaucoup ont beaucoup cotisé dans le passé : cela saperait toute confiance dans le système.

Enfin, je suis totalement contre la fiscalisation des recettes des caisses. En effet, il ne faut pas oublier qu'un prélèvement par l'impôt ne pèse que sur les salaires nets, alors que les cotisations sociales pèsent sur le capital puisque celles-ci augmentent la part des salaires.

Et toi, cher lecteur, qu'en penses-tu ?

vendredi 12 avril 2013

Patrimoine certes, mais aussi conflit d'intérêts.

Je dois dire que je suis assez surpris des déclarations de patrimoine qui se multiplient dans la presse. Franchement, tout connaître des richesses de Copé, Fillon, Mélenchon ou Désir, je ne vois pas l'intérêt. Que les déclarations de patrimoine soient consultables, c'est une chose, mais de là à en faire des papiers en grand nombre, il y a un monde. On peut de toute façon supposer qu'ayant exercé de nombreux mandats bien indemnisés, ils ne sont pas pauvres.

Ce qui serait nettement plus intéressant, ce serait de savoir quels sont les éventuels conflits d'intérêt qu'un homme ou une femme politique peut rencontrer, mais pas seulement.

Ainsi, il me semble toujours problématique qu'on ne cite jamais les ancrages de nombreux intervenants des médias, comme les soi-disant experts qu'on nous inflige à tour de bras. Pourquoi ne dit-on jamais pour qui ces personnes travaillent, voire où ils sont encartés. Par exemple, de nombreux économistes médiatiques sont aussi aux conseils d'administration de sociétés privés, ce qu'il faudrait savoir pour saisir certains positionnements.

Les hommes politiques, au moins, ont le mérite de la franchise. On sait où ils sont. Mais il est intéressant de savoir si un ministre des finances est un ancien banquier ou un ministre de la santé un ancien dirigeant d'une entreprise pharmaceutique.

Pour résoudre ce problème, il suffirait qu'un journaliste, avant d'interviewer une personnalité, énonce toutes ses casquettes. Un peu fastidieux, certes, mais nécessaire.

mercredi 10 avril 2013

Quelques leçons de l'ANI...

Tout le débat sur l'ANI pose de vraies difficultés que le mouvement syndical devra bien, à un moment, surmonter.

Je ne vais pas m'étaler ici sur les raisons qui font que je suis contre cet accord. Des dizaines de textes ont été publiés pour expliquer pourquoi il fallait s'y opposer. Trois syndicats de salariés ont choisi de signer ce truc, et les députés n'ont pas été capable de l'amender. Il reste le Sénat, mais il est certain que le PS trouvera quelques voix de droite pour le faire passer en l'état.

Je préfère revenir sur les questions qui sont posées par tout ce qu'il s'est passé, et sur les étapes de cette affaire.

1) Est-il normal que le gouvernement convoque les "partenaires sociaux" et impose un ordre du jour et une date-limite pour trouver un accord ? En théorie, un gouvernement a un programme et n'a donc pas besoin des syndicats pour trouver des idées. Le pouvoir peut éventuellement demander un avis, mais dans un pays où la loi républicaine prime sur tout, cette étape n'est nullement indispensable. D'autre part, les partenaires sociaux sont libres de signer des accords sur tous les sujets qui les intéressent, d'autant plus qu'un accord signé obligerait forcément le Parlement et le gouvernement à s'en saisir.

2) Le deuxième point porte sur la réalité du programme gouvernemental. En convoquant cette négociation avant la publication des chiffres de la représentativité, le gouvernement a démontré qu'il craignait de se retrouver avec FO et la CGT majoritaires. Il a donc poussé les consultations avant que ces résultats soient publiés, faisant ainsi appliquer son programme par les syndicats réformistes et par le patronat. Finalement, les députés et les sénateurs socialistes peuvent utiliser cet argument ("les partenaires sociaux ont négocié et signé") et gentiment se planquer derrière. Tout cela dénote bien un refus d'assumer la poursuite de l'application de la politique de l'offre.

3) La publication des chiffres de la représentativité arrange bien le patronat et les futurs gouvernements. Je dois dire que je ne cesse de m'étonner de ce bloc de 51% (chiffre tout à fait surprenant), et ce d'autant plus que j'ai une véritable expérience syndicale. Autant, la CFDT est réellement présente sur le terrain, dans le privé comme dans le public, autant on peut s'interroger sur cette force de la CFTC et de la CGC (qui, au passage, ne représente que les cadres...).

4) Il est de plus en plus problématique que certains syndicats construisent leurs mandats sur l'opposition aux autres syndicats et pas sur les revendications des salariés. Quand on lit que la CFDT n'est pas un syndicat qui s'oppose, on voit bien que le but est de créer de la division. Or, sans unité syndicale, les victoires sont très difficiles à obtenir. Pour moi, les syndicats qui font la course à l'échalote avec les autres organisations, et qui, pour exister, s'amusent à signer n'importe quoi, sont grandement responsables de la décrédibilisation des organisations syndicales auprès des salariés et de la délégitimation de la représentativité.

5) Mais il est vrai que cette représentativité ne s'appuie que sur des résultats électoraux, et évacue définitivement et complètement la question du nombre d'adhérents des syndicats. Cette logique s'appuie sur le fonctionnement des partis, mais on ne peut raisonner de la même façon. Un parti tire sa légitimité de ses résultats électoraux, un syndicat de son action sur les lieux de travail. La logique électoraliste amènera, à terme, les syndicats à ne pas se battre particulièrement pour conserver des adhérents et à se bureaucratiser encore davantage.

6) Et c'est là que nos organisations ne représenteront vraiment plus rien, à part les pensées de leurs permanents. Ce sera d'autant plus criant lorsque ces permanents seront aussi encartés dans divers partis politiques...

Alors, il faut d'ores et déjà réfléchir à revoir la représentativité sur plusieurs points :
  • intégration des syndicats patronaux dans le calcul de la représentativité. On verrait ainsi que le MEDEF représente le CAC 40 avant tout.
  • ajout, dans les critères de représentativité, de l'implantation réelle des syndicats dans les entreprises et les services publics. On pourrait imaginer, par exemple, demander aux employeurs de déclarer la liste des sections syndicales qui sont effectivement présentes en face d'eux dans la vie de tous les jours. On se rendrait compte ainsi que SUD fait peu de voix aux élections mais a souvent des militants actifs sur le terrain, ce qui n'est pas forcément le cas d'autres organisations.
  • maintien du rôle souverain du Parlement sur le droit du travail, les accords patronat-syndicats donnant des orientations à suivre, ou pas, en fonction des programmes des partis au pouvoir. Sinon, vu que le MEDEF ne signera pas d'accord de gauche, on n'est pas prêt d'avancer.
En attendant, cher-e-s ami-e-s, si vous êtes syndiqués, il serait temps de regarder un peu ce qu'il se passe dans vos orgas. J'ai franchement de la peine pour les camarades cfdtistes, qui doivent assumer l'ANI sur le terrain. Les prochains congrès pourraient être le moment de remettre les pendules à l'heure avec vos directions. Quant aux non-syndiqués, après tout, hein, vous aviez qu'à l'être, mais il vous est possible de vous engager. C'est quand on reste en dehors qu'on accepte que d'autres décident pour vous.

lundi 1 avril 2013

Pour les Américains, je suis un soc-dém.

Tiens, j'ai fait le plus honnêtement possible le test politique américain que Sarkofrance relayait ce matin. Voici le résultat :



Bizarrement, je n'ai aucune tendance du côté autoritaire, alors que le Front de Gauche en a, lui...

Mais cela me confirme une chose : le FdG a, pour moi, un vrai programme social-démocrate comme pouvait l'être le programme du PS dans les années 1970. Et de révolution, là-dedans, on parle peu. Non pas que je rejette l'idée révolutionnaire en soi, mais elle ne se décrète pas, elle arrive. Je ne me suis jamais senti à l'aise avec les politiciens qui nous promettaient la révolution sur commande.

Mais ces tests devraient être oubliés. Ils tendent à la simplification. Jetons à la poubelle les tests politiques, les évaluations professionnelles, les agences de notation et Robert Parker, et on s'en portera tous mieux.

lundi 25 mars 2013

Dites, et si on reprenait un peu de hauteur ?

Bon, ce qui est sûr, c'est que le climat politique actuel n'est pas à la sérénité.

Il y a quelques jours, j'ai écrit un billet sur Cahuzac, où j'écrivais qu'on se moquait des personnes, et que ce qui comptait était la ligne politique. Si on est en désaccord avec le gouvernement, on l'attaque sur sa ligne, pas sur ses membres.

Ce week-end, les camarades du PG ont dit des conneries. Si on acceptait l'idée que Moscovici puisse être un salopard, il suffirait donc de le virer et de mettre un autre membre du PS à sa place, et tout irait bien. C'est ce qu'on disait d'ailleurs de Sarkozy à l'époque. Or, le problème n'est pas là : ce qui compte, c'est la ligne politique. Un autre socialiste, du fait de la ligne adoptée par le président, ferait la même chose.

Ce qu'il faut combattre, c'est la ligne de la rigueur, et inutile pour cela d'être insultant: les faits suffisent à eux-mêmes.

Après, les multiples réactions des socialistes étaient tout aussi stupides. Le coup de l'antisémitisme, c'était quand même énorme, et cela démontre juste qu'Harlem Désir n'a pas la carrure d'un chef d'un grand parti national.

Et je voudrais dire quelque chose à mes amis socialistes (et à d'autres) : si Mélenchon est aussi peu important et se contente d'être simplement un populiste insultant, pourquoi lui consacrer autant d'énergie (surtout que les résultats électoraux du Front de Gauche ne sont pas à la hauteur encore et que c'est plutôt le FN qui devrait inquiéter tout le monde), de même qu'aux blogueurs du FdG ? C'est bien que vous utilisez la forme pour essayer de détruire le fond, car en réalité, la politique d'Hollande ne vous satisfait pas pleinement non plus et vous trouvez certaines critiques du Front de Gauche tout à fait pertinentes.

Et si vous perdez des élections partout, si le gouvernement est au plus bas dans les sondages, ce n'est pas à cause de la critique du FdG (et c'est dommage, parce que j'aimerais bien) mais bien du fait de la politique menée, et c'est elle qui sera sanctionnée en 2014 puis en 2017, si rien ne change.

En fait, là où Mélenchon fait une erreur tactique, c'est qu'en devenant insultant (et en étant obligé de se justifier en permanence pour expliquer ses insultes), il donne des armes au PS pour riposter durement et pour qu'on oublie le fond, et il empêche toute alliance future si les socialistes changent de ligne. J'espère qu'on va rapidement changer de posture et revenir à une critique raisonnée et constructive. C'est comme cela qu'on pourra éventuellement faire bouger ce gouvernement, et sinon, espérer le remplacer à la tête de la gauche.

Et encore, je ne parle pas de la droite. La défense outrancière de Sarkozy était ridicule. Là encore, attendons que la justice fasse son boulot, et arrêtons les bêtises. La France mérite mieux que ça. Et que dire des manifestants qui découvrent que c'est la préfecture qui fixe le parcours, qu'elle le fait dans l'intérêt du pouvoir et que, quand on obéit pas, les CRS frappent ? C'est pathétique...

mercredi 20 mars 2013

Démission de Cahuzac : on s'en fout.

La polémique monte dans la blogosphère à propos de la démission de Jérôme Cahuzac. Certains veulent en profiter pour se faire le Front de Gauche, alors que Mélenchon avait été très clair avec Cahuzac sur France 2 lorsqu'ils avaient débattu, affirmant son refus de rentrer dans cette polémique (ce qui n'avait pas empêcher après un débat très vigoureux). Il faudrait se rappeler, à gauche, les critiques que nous émettions durant le mandat de Nicolas Sarkozy sur sa personne, car le problème est le même.

Alors, qu'en dire ? Quelques réflexions :
  1. Il est positif qu'un ministre démissionne (ou soit démissionné) dès que la justice le met en examen, tout simplement pour qu'il puisse se défendre et qu'il n'entame pas l'image globale du gouvernement. Les ministres mis en examen de Sarkozy, voire condamnés, ne l'ont pas aidé à se faire réélire, j'en suis sûr : Woerth évidemment mais aussi Hortefeux condamné pour injures raciales.
  2. Est-ce que cette démission représente cependant une défaite du social-libéralisme ? Aucune, puisque la même ligne est toujours au pouvoir. Les électeurs ont fait un choix, et ce n'est pas par les déboires fiscaux d'un ministre qu'il sera remis en question.
  3. Cette affaire révèle les affres de la personnalisation. On en avait souvent parlé sous Sarkozy. En soi, Sarkozy était très pénible par son côté agité, désordonné et parfois totalement irresponsable, et par sa manière de concevoir le rôle du président. Par contre, sa défaite n'a pas remis en cause la ligne politique qu'il défendait à droite, puisque Copé a réussi à se maintenir à l'UMP sur un programme presque plus à droite et que certains pans de ce parti souhaitent le rapprochement avec le FN.
Que tirer de tout cela ? On ne combat pas des personnes mais des idées. Et si on veut faire bouger les lignes, attaquons sur le fond.

Quant à Cahuzac, laissons-le se débrouiller avec la justice. Mais je dois te dire, cher lecteur, que je me moque pas mal de ce qui se passera durant cette enquête. La seule chose importante est que s'il y a eu délit, il y ait bien condamnation, comme pour tout citoyen de notre pays. Et là-dessus, s'il y a une quelconque entrave à la justice, le blogueur que je suis sera le premier à le dénoncer.

vendredi 8 mars 2013

Les 11 questions du vendredi.

Malgré le fait que je ne blogue presque plus, voilà que je suis visé par une chaîne ! Bordel !

Bon, il faut répondre à onze questions. Allons-y :

1/ Alors, en weekend ? Oui, demain, mais en même temps, je suis en vacances, alors...
2 / Chien ou chat ? Plutôt chat. Les chiens, ça bave partout. Je me demande ce qu'ils donnent dans les lasagnes.
3/ Appréciez-vous cette presse spécialiste du foot ? Je n'y connais rien en foot, mais j'ai déjà eu So Foot entre les mains, et j'ai trouvé ce magasine plutôt bien fichu.
4/ Les verts, dont la seule préoccupation visible est de déranger le conseil constitutionnel pour demander à instaurer une parité homme – femme à la présidence des groupes parlementaires, sont-ils grotesques ou vont-ils sauver la patrie des droits de l’homme ? Les Verts sont surtout occupés à préserver leurs mandats électoraux...
5/ La dernière fois où vous avez mangé des lasagnes ? C'était le 29 novembre dernier (je sais, c'est précis) et c'était fait avec de la viande du boucher. Miam !!!
6/ Que penser des élections en Italie ? Que l'austérité suscite un sacré bordel...
7/ A-t-on le droit d’être réticent sur l’adoption d’enfants par des couples de même sexe sans être traité d’homophobe, et d’être opposé au droit de vote des étrangers sans être traité de raciste ? Je suis contre le droit de vote des étrangers mais pour l'adoption d'enfants par les couples homo. Après, tout dépend de la manière d'argumenter ses idées.
8/ Si on traitait une dame de « mi femme, mi cochonne », les féministes nous recommanderaient elles au Nouvel Obs pour faire sa une ? Vous pouvez répéter la question ?
9/ Bon, c’est qui Laurent Obertonne au final ? Je ne connais pas, mais vu le bouquin, cela ne va pas être ma tasse de thé.
10/ Quand est ce que Montebourg va quitter le gouvernement ? Pas avant les prochaines législatives.
11/ Ca vous branche, une escalope avec une belle salade ? De veau, pas de dinde SVP.
Ah, ça faisait longtemps que je n'avais pas répondu à une chaîne. Ouf...

Loi d'orientation : l'école du socle au programme.

Vincent Peillon est un type malin : depuis plusieurs semaines, il occupe les médias en injectant sans arrêt des éléments nouveaux sur une question clivante, celle des rythmes scolaires. Et pendant ce temps, la loi d'orientation sur l'école avance et a commencé à être analysée et modifiée par les parlementaires. Et le moins que l'on puisse dire est que, contrairement à ce qui est dit un peu partout, cette loi va assez loin.

On risque d'entendre beaucoup parler dans les prochains jours du concept d'école du socle. C'est un très vieux débat, cher lecteur.

Pour le résumer de manière très caricaturale (on est sur un blog, pas sur un site de sciences de l'éducation), il s'agit, en réalité, d'une division organisationnelle du système scolaire. Je te résume les positions existantes :
  • actuellement, le système scolaire est divisé en trois morceaux bien distincts qui permettent de mettre en place des ruptures dans la vie de l'enfant. On trouve l'école primaire, le collège et le lycée. L'école primaire et le collège font partie de la scolarité obligatoire (à l'exception de l'école maternelle, même si l'ultra-majorité des gamins y vont). Cependant, les deux sont nettement séparés. Au primaire, les enfants sont face à un enseignant généraliste qui traite l'ensemble du programme (même si des intervenants extérieurs sont fréquents, en fonction des moyens des communes). A partir de la 6e, les enfants sont face à plusieurs enseignants qui, eux, sont spécialisés dans un petit nombre de disciplines. Cette rupture est très critiquée, les enfants ressentant apparemment une vraie souffrance à ne plus avoir un seul enseignant qui les cajole toute la journée. La réalité est que, après une ou deux semaines d'attentisme, la plupart des 6e se comporte comme s'ils étaient au collège depuis toujours. Par contre, il est vrai aussi que les gamins en grande difficulté au primaire ne s'en sortent pas mieux ensuite au collège ;
  • les tenants de l'école du socle considèrent qu'il faudrait réunir le primaire et le collège avec une transition progressive et non pas brutale, en s'appuyant sur le célèbre socle commun de compétences, de connaissances et de culture, vieille marotte des libéraux qu'une partie de la gauche a aussi entretenu. La vraie rupture se placerait alors à l'entrée en 2nde. Le socle est très populaire au PS, mais c'est pourtant la droite qui en a mis en place une première mouture, que Peillon n'a pour le moment pas modifiée. Je ne vais pas me lancer ici dans le débat sur ce conflit à mon sens stérile sur l'opposition entre compétences et connaissances que je laisse à mes collègues qui préfèrent s'entretuer plutôt qu'avancer.
Cette division actuelle date de 1989. A cette date, Jospin a tranché entre le collège et le primaire et a provoqué de profonds remous dans le monde syndical enseignant. En effet, jusque là, enseignaient au collège des certifiés, des agrégés, mais aussi des PEGC, professeurs pouvant enseigner plusieurs disciplines. Or, ces PEGC se syndiquaient au grand syndicat du primaire de l'époque, le SNI-PEGC, alors que les autres émargeaient au SNES, au SNEP (pour le sport) ou au SNETAA (pour le professionnel). Ces deux syndicats (SNES et SNI-PEGC) appartenaient à la FEN, mais étaient chacun tenus par deux tendances opposées, Unité, indépendance et démocratie (plutôt proche du PS) pour le SNI-PEGC et Unité et Action (proche du PCF) pour le SNES. UID espérait, en permettant aux professeurs du primaire d'aller au collège, donner une perspective professionnelle à ses adhérents et rééquilibrer un peu les rapports de force au sein de la FEN car UA y progressait. En faisant ce choix, Jospin a choisi UA, et de fait, la FEN a explosé en 1992. La tendance UID a gardé la FEN qu'elle a transformé en SE-UNSA, et les membres d'UA, avec les autres tendances de la FEN, ont fondé la FSU.

Tu vas me dire, cher lecteur, que cette incise sur le syndicalisme ne concerne pas le sujet. En réalité, il est en plein dedans, car il faut bien voir que cette organisation actuelle de l'école n'est pas forcément venue de "l'intérêt de l'élève" mais bien de toute une série de rapports de force. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi Jospin a privilégié les proches du PCF, mais si un ancien du PS de l'époque passe par là, je serais très intéressé par son commentaire.

La loi d'orientation revient sur ce choix historique. En effet, elle met en place des conseils école-collège et prévoit que les enseignants des deux bords pourront aller enseigner chez les autres. Le PS est resté très accroché à cette idée que le SE-UNSA continue à défendre mordicus. Cependant, après réflexion, je continue à ne pas bien comprendre ce que le fait de faire venir des profs du primaire au collège, et inversement, pourra bien changer.

Les difficultés scolaires, dans le système actuel, apparaissent tout au long du système. Souvent, les gamins qui sont largués dans le primaire continuent à l'être ensuite. Dans le cadre actuel, nous sommes tous en échec sur les 120 000 gamins qui sortent du système sans diplôme. Ces 10% d'une classe d'âge restent notre grosse difficulté.

A partir de là, la question de l'école du socle apparaît plus comme une réforme institutionnelle que comme une réforme dans l'intérêt des élèves. Un enseignant du primaire a l'avantage de bosser 27h par semaine par rapport à un prof du secondaire qui en fait 18 ou 15. D'autre part, envoyer des profs du secondaire de certaines disciplines (langues, musique, arts plastiques, sports) permettrait de faire sauter tous les intervenants qui font souvent ces missions aujourd'hui.

En clair, où est l'intérêt des élèves dans tout cela ? Si quelqu'un a une idée...

mercredi 6 mars 2013

Où va donc Libération ?

Je ne sais pas comment le vivent les journalistes de Libération, mais en lisant cet édito de Nicolas Demorand, je me suis vraiment demandé quelle était la ligne politique du journal aujourd'hui.

Espérons, même si on peut partager la colère de certains, que le reste de la rédaction peut encore se démarquer de son patron.

Laissons Chavez tranquille et travaillons !

Hugo Chavez est mort...

Il faut, à ce moment du récit, faire une première mise au point de principe : en France, il est totalement impossible de se faire une idée claire sur ce qu'est vraiment le Venezuela d'aujourd'hui. Le personnage de Chavez n'a cessé de révéler des clivages idéologiques dans notre pays. La droite et les réacs considèrent le Venezuela comme un nouveau Cuba (il faut dire que la droite locale s'est faite virer du pouvoir et n'est pas parvenu à le reconquérir, par la force comme par les urnes), les sociaux-démocrates comme un modèle très critiquable (il faut dire que le PS local n'a pas été associé au pouvoir), les gauchistes comme une espèce d'icône à suivre sur tous les points (enfin un candidat radical qui gagne des élections, ce qui n'est pas notre cas en France).

En réalité, on ne sait rien de rationnel et d'objectif par les médias. Par curiosité, j'ai cherché sur le site d'Amnesty International pour voir ce qui ressortait, et je n'ai trouvé qu'un article, mais là encore, le fameux rapport annuel n'est pas consultable sur le site.

De notre côté, cher-e-s camarades, il faut quand même un peu se calmer. On peut certes regarder avec intérêt ce qui se passe au Venezuela et dans l'ensemble des pays d'Amérique Latine et essayer d'en tirer des leçons pour la gauche française voire européenne, mais avec toutes les limites de l'exercice. Ces pays sont loin de ressembler à la France : niveau de développement, population aux dynamiques démographiques de pays en développement, ressources naturelles, structures économiques et sociales... On ne pourrait pas ici appliquer le même système politique, et d'abord parce que la France a des traditions démocratiques bien plus ancrées. On peut supposer qu'en cas de victoire électorale du Front de Gauche, la droite de ce pays ne ferait pas de tentative de putsch et que le PS participerait au pouvoir sur la base du programme du FdG. En tout cas, on peut l'espérer.

Je suis toujours très mal à l'aise de cette volonté de trouver partout ailleurs un modèle qui s'appliquerait tel quel ici, en prenant pour exemple des pays très différents. D'habitude, c'est à droite qu'on est coutumier de cette stratégie. Allemagne, Espagne, Royaume-Uni, Etats-Unis : tous les pays qui ont fait des réformes libérales y passent, jusqu'à ce qu'ils se cassent la binette et qu'on en trouve un autre. Les réformistes ont longtemps mis le blairisme en avant, sans oublier l'Allemagne de Schröder et les pays scandinaves. De notre côté, il est vrai qu'on a souvent parlé du Chili, de l'URSS et parfois de la Chine, sans oublier Cuba. Dommage qu'on ait eu cette manie (Chili excepté) de promouvoir des dictatures bien loin de notre idéal démocratique...

Bon, et si on parlait de la France et des questions qui la concerne, plutôt que de passer notre temps à chercher des lendemains qui chantent ailleurs ? C'est pour la France que nous devons trouver des solutions, pas pour les Vénézuéliens qui ont l'air de très bien se débrouiller seuls.

Au travail !

jeudi 28 février 2013

La loi d'amnistie des syndicalistes : une opération à somme nulle.

Le Sénat a adopté la loi sur l'amnistie des syndicalistes. Tu en trouveras, cher lecteur, le texte ici. Immédiatement, la blogosphère s'est saisie du sujet : la droite râle, le FdG trouve que l'on ne va pas assez loin, certains blogueurs socialistes considèrent que ce sujet n'est pas au centre des préoccupations des Français. Globalement, on n'échappe nulle part à tous les clichés habituels sur l'action syndicale.

En tant que syndicaliste moi-même, je trouve le sujet tout à fait intéressant. Il pose en fait la question du délit qui n'est pas motivé par la volonté du délinquant de s'enrichir personnellement mais de défendre une cause. En clair, on considère souvent, dans le monde syndical, que des décisions iniques légitiment des actions illégales (cette différence entre légitimité et légalité est primordiale). A droite, on estime que la délinquance des syndicalistes est un problème de fond, aussi grave que celui de la délinquance classique, et bien plus que la délinquance des entreprises qui, elles, ont les moyens de se payer des juristes pour mener des actions illégitimes en toute légalité. Rappelons que la droite trouvait normal que des maires refusent de mettre en œuvre la loi votée il y a encore quelques semaines ou qu'on lit régulièrement, dans la blogosphère de droite, le fait que les droits sociaux sont des entraves à la liberté : aucune raison de rentrer dans ce débat face à cette mauvaise foi totalement assumée.

D'expérience, on sait que l'action syndicale peut amener à enfreindre la loi. C'est une évidence, et il me semble important que chaque syndicaliste en ait une pleine conscience. Lorsque l'on fait un acte illégal mais qu'on estime légitime, on prend ainsi ses responsabilités, d'autant plus que l'on sait que la justice, surtout durant les dix dernières années mais encore aujourd'hui, est particulièrement sévère. Après, je l'ai souvent écrit : le fait de résister aux pouvoirs amène à prendre des risques. On se doit de faire avec. C'est bien pour cela que la droite, très globalement attaché au respect de la loi (surtout lorsque cela protège ses intérêts), estime que les syndicalistes doivent être particulièrement sanctionnés. Cependant, pour relativiser, c'est en général l'opinion dans son ensemble qui décide et qui légitime, ou pas, des actions syndicales illégales. Les actions contre les OGM, menées par la Confédération paysanne, ont souvent le soutien des Français, mais elles sont exclues de la loi. Xavier Mathieu a aussi gagné une image positive du fait du comportement de son entreprise, bien plus méprisable. Par contre, l'opinion s'est souvent montrée sévère avec la CGT du Port de Marseille ou de la SNCM, ou encore avec la CFDT de Brittany Ferries.

Quand on analyse le texte voté par le Sénat (en rappelant que l'Assemblée nationale doit encore s'en saisir et peut largement l'élaguer, car le FdG ne peut rien faire dans cette institution), on constate que seuls les petits délits sont amnistiés. En soi, je pense que ce n'est pas plus mal. Et puis, les grévistes de 1948 bénéficient enfin d'une amnistie, ce qui répare, en l’occurrence, une vraie injustice. S'il devait rester quelque chose de ce texte, c'est bien ce premier article.

Pour le reste, même si le FdG en a fait un marqueur de son action politique, je reste assez d'accord sur le fait que la population se moque complètement de cette loi. En gardera-t-elle un mauvais souvenir ? A droite, oui, on l'utilisera comme un hochet pour effrayer l'électeur, mais on s'en fout : on ne fait pas de la politique pour satisfaire des gens avec qui on est en désaccord et qui viennent de perdre les élections. Par contre, je pense que l'électorat socialiste s'en fichera. Quand à l'électorat FdG, ce n'est pas ce texte qui le fera changer d'avis sur le PS. En clair, politiquement, l'opération est à somme nulle.

Reste que le PS tente quand même de séduire les militants syndicaux, dont certains sont membres de ce parti. Là encore, je doute du succès.

Est-ce que l'existence de ce texte changera quelque chose à l'exercice de mon action syndicale ? Non. D'abord parce que je n'ai pas eu l'occasion d'enfreindre la loi (en tout cas pas suffisamment gravement pour qu'on m'en tienne rigueur) depuis sept ans que je milite, et ensuite parce que j'ai milité sous Sarkozy alors que cela pouvait être dangereux, sans trouver que cela ait pu avoir une quelconque importance.

lundi 25 février 2013

Rythmes scolaires : les enseignants peuvent-ils encore communiquer en France ?

La situation de la réforme des rythmes scolaires dans le premier degré illustre les difficultés de plus en plus grandes dans lesquelles se trouvent les enseignants pour faire passer un quelconque message positif.

Lorsque Vincent Peillon a décidé de poursuivre la réforme des rythmes entamée par son prédécesseur, il était évident que le sujet serait très glissant. Il touche en effet de nombreuses personnes et de nombreux acteurs de notre société :
  • les parents qui doivent réadapter leurs emplois du temps,
  • les profs qui doivent changer leurs modes de vie, mais aussi tous les autres personnels travaillant dans les écoles,
  • les communes qui doivent éventuellement embaucher et/ou débaucher du personnel pour la semaine et pour les périodes de vacances,
  • les associations et clubs sportifs, les groupes d'activité artistique, les religieux qui font du cathé... : beaucoup d'entre eux voyaient les gamins les mercredis,
  • les entreprises du tourisme, si jamais on touche aux vacances et à leurs durées...
En clair, c'est très compliqué. Et sur ce sujet-là, personne, parmi les spécialistes auto-proclamés ou pas, n'est vraiment d'accord. Je l'avais déjà évoqué dans ce billet, et je ne vais pas y revenir.

De toute façon, le ministre, même s'il vient de se relancer sur la question des vacances, a finalement adopté une réforme a minima (redéployer une partie des heures de cours sur une matinée de plus, sans augmenter le temps effectif de cours ni toucher aux vacances). Il doit pour cela obliger les communes à embaucher des personnels. Certaines vont sûrement fermer les écoles plus tôt ou les ouvrir plus tard.

Globalement, pour résumer très schématiquement, les gamins vont avoir le même temps de cours (24 heures par semaine) contre 27 avant la réforme Chatel, mais avec une demi-journée de plus dans la semaine. Le temps dégagé sera occupé par les communes, qui feront ce qu'elles pourront.

Ayant pas mal de professeurs des écoles dans mon entourage, j'ai pu entendre des réactions très diverses. D'abord, avant les annonces, j'avais trouvé que les collègues n'étaient pas forcément mécontents de retravailler une demi-journée de plus, car les cours du samedi matin se passaient souvent très bien. La division apparaît plutôt sur la demi-journée à choisir : dans mes connaissances, un tiers sont pour le samedi et deux tiers pour le mercredi, mais c'est très schématique, parce que cela porte sur six personnes...

Par contre, l'arrivée des communes dans le temps scolaire obligatoire est très mal vécue, car cela va avoir des conséquences lourdes de deux façons différentes :
  1. d'abord, le principe est gênant, car, de fait, les enfants de tout le pays vont voir arriver tout et n'importe quoi, parfois de très bonnes choses, parfois n'importe quoi. Les collègues auraient souvent préféré revenir à 27 heures dans ce cas (le programme est très dur à tenir en 24h)...
  2. ...car les communes vont souvent mettre ces activités en place sur la pause de midi. En effet, elles avaient déjà des personnels pour surveiller les cantines sur ces moments-là. Elles ne seraient donc pas obligées d'embaucher. Par contre, les profs resteront toujours autant de temps (mais avec 2h15 libérées le midi au lieu de 1h30), ce qui fait qu'ils resteront autant de temps qu'aujourd'hui à l'école les quatre jours de la semaine, et il faudra y ajouter les trois heures de la demi-journée supplémentaire.
Personnellement, je pense que ce type de réforme aurait pu passer si les collègues pensaient que les gamins y gagneraient des choses. C'est l'avantage de la grande majorité des fonctionnaires : n'ayant pas le profit comme appât, nous sommes heureux quand le service est bien rendu. On pourrait donc faire passer une réforme allongeant le temps de travail, même si c'était difficilement, avec l'idée derrière d'un travail mieux fait.

Avec cette réforme, les profs des écoles pensent que les conditions d'enseignement ne changeront pas, que la qualité de l'enseignement ne sera modifiée qu'à la marge (programmes identiques, temps identiques, personnels identiques...), qu'ils resteront plus longtemps à l'école (autant les quatre jours + trois heures le mercredi) et que les gamins, pendant ce temps, feront un peu tout et n'importe quoi avec les personnels des communes.

Ce qui ressort de cette réforme, c'est que le gouvernement pense résolument, sans que je comprenne bien pourquoi, que les collectivités territoriales sont les solutions à tous les problèmes du système éducatif. J'en reparlerai.

Reste que les grèves sont arrivées, et qu'elles ont été très bien suivies, bien plus que sous Sarkozy. Les syndicats ont diffusé deux types de messages : soit il ne faut rien changer (FO, SUD, CGT), soit qu'il faut faire la réforme mais en mieux (SNUIpp-FSU, certaines sections du SE-UNSA). Globalement, ce dernier message n'est pas passé dans les médias.

Ceux-ci, imbus de leurs idées anti-profs nantis, ont répercuté une seule idée : les profs se fichent des gamins et ne veulent simplement pas bosser plus. Et bien sûr, plutôt que d'aller interviewer des personnes qui réfléchissent à tout cela et qui ont des pensées nuancées, on va pêcher n'importe quel guignol dans une manifestation, on coupe l'interview pour qu'on entende simplement "touchez pas à mon mercredi !", et pendant que le pays s'effondre dans le marasme, on construit la vision d'un monde éducatif arc-bouté sur le temps de travail, sans aucune réflexion derrière et qui se moque de la situation des autres citoyens de ce pays.

Les médias ont été pitoyables, et les politiques pourtant de gauche au pouvoir aussi, avec des gens qui ont pourtant voté François Hollande à 75% au premier tour.

Globalement, ce qui ressort tout de même, c'est que les syndicats des profs du premier degré, pourtant mieux vu en général que ceux du second, n'arrivent pas à faire passer un quelconque message à travers le plafond de verre des médias.

Un dernier point : le SNUIpp-FSU, syndicat majoritaire, ne voulait pas faire grève sur ce sujet, justement à cause du piège médiatique potentiel et des risques pour l'image des collègues. Cela démontre bien les difficultés pour les syndicats, même pour les plus gros, de communiquer. Or, il y a été forcé par sa base. Des copains du SNU m'ont raconté que les AG avec les personnels avaient été très tendues, et qu'ils auraient eu de gros problèmes s'ils n'avaient pas choisi d'appeler.

En ce moment, on peut vraiment dire que l'on se mord la queue...

jeudi 21 février 2013

Fin du jour de carence : l'exemple d'une mesure inefficace pour les finances publiques mais symbolique pour gagner (ou perdre) des élections.

Les Echos l'annoncent ce matin : au dernier trimestre de l'année 2013, le jour de carence pour les fonctionnaires, lorsqu'il y a prise d'un arrêt-maladie, sera abrogée.

Depuis quelques temps, dans l’Éducation nationale, on voyait bien les effets de la mesure. D'abord, il est certain que cela avait un impact à priori positif pour le gouvernement : la nette diminution de la participation aux journées de grève. Cela s'était vu lors de la journée de grève du 31 janvier 2013, pourtant appelée pour refuser le jour de carence, qui avait amené peu de monde dans les rues dans l’Éducation nationale. Plusieurs collègues, dans mon lycée dit difficile, évoquèrent les deux ou trois jours de carence déjà assumés depuis le début de l'année scolaire, interdisant de fait la perte d'un trentième supplémentaire.

Par contre, la mesure avait aussi un réel côté pervers. Depuis le début de l'année, j'ai aussi entendu, venant de plusieurs salles des profs, l'idée que, si on pouvait avoir tendance autrefois, par conscience professionnelle, à réduire les arrêts au minimum (un jour de repos suffit souvent, il faut bien le dire), pourquoi se limiter lorsqu'on vous sucre un jour de carence ? En clair, une fois un jour perdu, autant accepter quand le médecin vous propose trois jours et qu'on avait autrefois le réflexe de n'en demander qu'un. Du fait de ses grosses difficultés de remplacement, l’Éducation nationale ne pouvait que souffrir de ces évolutions, particulièrement dans le premier degré où il faut qu'il y ait un adulte devant une classe. On peut donc espérer que le retour à la situation antérieure fera disparaître ces comportements nuisibles aux finances du système de santé comme au système éducatif.

Reste que la mesure reste en place dans le privé, où on sanctionne les salariés qui sont malades. Certes, dans les grosses boites, les mutuelles prennent en charge (les jours de carence étant alors un simple transfert de charge de la Sécurité sociale aux mutuelles), mais il reste sans doute au moins 40% des salariés français du privé qui sont ainsi sanctionnés, entraînant un refus de leur part de s'arrêter en cas de petites maladies, et donc, de fait, une dégradation globale de leurs conditions de vie.

Cette mesure reste assez incompréhensible, car un travailleur qui refuse de se soigner s'abime, devient moins efficace et finalement, nuit au fonctionnement de son entreprise ou de son service public comme à lui-même.

La droite avait mis en place cette mesure pour satisfaire son électorat, une partie de celui-ci étant persuadé que les fonctionnaires passent leur temps en arrêt-maladie. La gauche, après avoir arrosé l'électorat de droite avec cadeaux fiscaux aux entreprises et au MEDEF (alors qu'il ne votera jamais pour lui), semble enfin se souvenir de ses électeurs. On peut déplorer ces mesures à courte vue et uniquement à but électoraliste. Les politiciens feraient mieux de trouver de vraies solutions plutôt que de s'amuser à flatter tous les côtés bas et mesquins de leurs clientèles.

Il ne reste plus maintenant qu'un petit pas à franchir : faites sauter les jours de carence dans le privé (et les franchises médicales par la même occasion), laissons nos concitoyens se soigner en paix, et vous verrez qu'on observera une amélioration globale des conditions de santé de nos concitoyens, voire même une diminution des déficits de la Sécurité sociale.

dimanche 6 janvier 2013

Le plan B ? C'est maintenant qu'il faut le construire.

Il y a un véritable avantage à l'explosion de la gauche en plusieurs chapelles différentes : cela suscite des débats.

Il y a quelques jours, je me suis retrouvé dans un repas avec un ami de mes parents, assez proche idéologiquement de François Hollande et par ailleurs très satisfait de ses premiers mois à la tête du pays. Évidemment, il me connaissait de longue date et se doutait que je n'étais pas dans les mêmes dispositions. Comme beaucoup de socialistes, il a commencé à se plaindre de l'action de sape des autres partis de gauche, particulièrement du FdG. Heureusement, on a assez vite dépassé cette discussion pour se replonger dans l'histoire récente de la gauche française.

On est revenu sur le TCE et son référendum. Mon contradicteur (dont j'ai oublié la nature du vote en 2005) m'assena le célèbre "plan B", qui avait beaucoup occupé les commentateurs de l'époque. Son argument était simple : "on a voté non en 2005, mais rien n'a changé. Il est où, votre plan B ? Au final, l'Europe n'a pas changé du tout, et c'est même presque pire."

Le TCE était une très large synthèse de tous les traités européens précédents, dont celui de Maastricht déjà adopté par les Français par référendum. C'était un texte d'une lourdeur extrême, nécessitant de réelles compétences en droit européen pour en décrypter de larges parties. Sans le coup du président Chirac, ce texte aurait été validé par les parlements et on aurait continué comme avant sans aucun problème. Or, quatre pays ont décidé de consulter les peuples. A partir de là, la question changeait totalement de nature. La France, l'Espagne, le Luxembourg et les Pays-Bas demandaient de fait à leurs peuples de valider toute la construction européenne. Cela aurait permis de sortir l'UE de son petit cadre élitiste pour en faire une institution confirmée par les peuples. 

A l'époque, on nous a annoncé une catastrophe d'ampleur mondiale en cas de "non", qui n'est pas arrivée puisque tous les autres traités restaient en vigueur. Depuis, la construction par nos élites s'est poursuivie et se poursuit toujours, sans aucune inflexion réelle, à part qu'on est pas prêt de redemander leurs avis aux peuples. Nos élites ont pourtant poursuivi l'objectif de la constitutionnalisation. Avec le TSCG, voilà la règle d'or qui est entrée dans les lois fondamentales. Pourtant, malgré ce coup de jarnac, on peut relativiser.

Les ouiouistes utilisaient l'argument du plan B en suggérant que les nonistes de gauche n'avaient pas d'alternative. A posteriori, je ne suis pas vraiment sûr qu'ils en avaient vraiment une (ce qui est le cas aujourd'hui, si on prend la peine de lire le programme du FdG). Cependant, ce n'était pas la question posée. Dire "non", c'était refuser d'inscrire dans le marbre d'un texte dit constitutionnel une vision très idéologique de l'UE. Certes, de nombreux types de "non" se sont associés pour faire battre cette idéologie, mais le message était clair : la majorité des peuples français et néerlandais s'opposaient à cette Europe. Le "oui" des Espagnols et des Luxembourgeois ne pouvaient pas permettre l'adoption du traité (unanimité oblige...).

Tant qu'il n'existe pas de consultation référendaire touchant toute l'UE et imposant un résultat même si certains pays votent "non", aucun principe de celle-ci ne sera gravé dans le marbre. De fait, ce sont les gouvernements qui continueront à construire l'Europe. Il est donc possible qu'à un moment, on change de doctrine si les gouvernements changent.

Le "oui" de la France et des Pays-Bas aurait interdit cela. L'austérité et le libéralisme, la concurrence entre pays et le moins-disant social auraient été légitimés. On n'en est pas là.

Malheureusement, l'Europe reste encore trop peu présente dans les campagnes électorales de nos pays (contrairement à l'Europe du Sud). C'est pourtant une thématique primordiale à mettre en avant, avec des effets concrets sur la vie des gens : les Grecs, les Espagnols, les Portugais et les Italiens en savent quelque chose !

Doit-alors regretter notre "non" ? Certainement pas ! Ce "non" nous a laissé la liberté, un jour, de prendre l'UE en main, de réfléchir, de construire des projets alternatifs, de les défendre et de les présenter au moment des élections à des peuples. Au travail, donc !