mardi 30 juin 2009

Quel avenir pour le système de retraites français ?

C'est ici que cela se passe ! Bonne lecture, et préparons-nous à la lutte.

La polémique anti-prof du jour : les arrêts-maladies.

Tiens, une nouvelle polémique anti-prof ! Cela faisait longtemps qu'on n'avait pas eu une charge de ce type. Généralement, elle se produit lorsqu'un gouvernement de droite est en difficulté ou lorsqu'il prépare une nouvelle réforme qui va soulever les profs. Luc Chatel en a d'ailleurs profité pour jouer au ministre protecteur qui va rétablir la vérité. Bon, essayons un peu de débroussailler…

Je vais prendre l'article du Figaro pour essayer de comprendre les raisonnements anti-profs. L'idée ici est de dire que les instituteurs (il faudrait que les journalistes du Figaro actualisent leurs dossiers, car le statut d'instituteur a quasiment disparu) prennent davantage de jours d'arrêt-maladies que les salariés du privé : 11 jours par an contre 9 jours. De plus, ces arrêts sont bien plus diffusés que dans le privé : 45% des professeurs des écoles auraient des arrêts, contre 22% dans le privé. Très bizarrement, l'article communique d'ailleurs les raisons qui me sont venues de suite en lisant l'information : les maladies présentes dans les écoles et la difficulté du métier.

En effet, les écoles (et on peut y ajouter les collèges et les lycées) sont de véritables bouillons de culture : les jeunes charrient des maladies en quantité astronomique. On ne les attrape pas toutes, mais certaines sont systématiques. Dans mon lycée dit difficile, deux maladies font des ravages chaque année : la gastro-entérite, très redoutée car très virulente (la moitié des collègues la subissent chaque année dans mon bahut) et la grippe qui a une forte tendance à se répandre rapidement. Je le sais assez : je n'attrape jamais la gastro mais je me ramasse la grippe au moins une fois tous les deux ans, ce qui me cloue au lit pendant quatre à cinq jours (tiens, je ne l'ai pas eu cette année). Il est d'ailleurs intéressant de constater que la grippe porcine, en ce moment, est présente dans les écoles et se diffuse par là. La difficulté du métier est aussi un autre problème : très souvent, les collègues dépressifs sont arrêtés.

Dans les articles, comme dans les commentaires, il y a une chose qu'on ne dit jamais : on ne choisit pas de prendre un « congé-maladie » (sic), on est arrêté par un médecin. Cela signifie donc que les professionnels de santé collaborent à la fainéantise des profs. Pourquoi ??? Je pose la question à un blogueur médecin au passage. Les enseignants bénéficient donc d'un traitement de faveur de la part du corps médical. Je laisse la possibilité à des médecins de répondre, mais je crois qu'on peut mettre en avant quelques petits éléments.

Il ne faut jamais oublier qu'un prof a en responsabilité un groupe de gamins. Il doit éviter les accidents et être en permanence attentif. J'ajoute que, quand on bosse dans un établissement difficile, l'attention doit être à son maximum. Or, quand on est malade, on est d'abord moins attentif (la fièvre n'arrange rien) et on est en plus un vecteur de transmission de maladies (on passe notre temps à postillonner sur les gamins). De plus, un dépressif est très dangereux dans une classe, parce qu'il a tendance à être moins attentif et à laisser se développer des processus dangereux dans sa classe. Il ne vaut mieux donc pas qu'un malade reste en classe : c'est du bon sens et c'est une attention envers les élèves.

Reste un aspect que je voudrais souligner. Dans ce billet d'Hermès, relayé par le Coucou, on peut remarquer que les salariés du privé accusent les enseignants de fainéantise. Ce n'est pas nouveau. J'aurais tendance à retourner l'argument. Dans le privé, il y a une véritable pression pour éviter que les salariés ne prennent des arrêts. Les salariés se font donc violence et viennent bosser, chargés de médicaments et vecteurs de maladies. La hausse du chômage et la faiblesse des syndicats n'arrangent rien. Par contre, les profs, comme l'ensemble des fonctionnaires, bénéficient d'une protection qui leur permet d'aller voir leurs médecins lorsqu'ils sont malades, et de se faire soigner. Cela peut aussi expliquer la durée de vie plus longue des enseignants. La question n'est donc pas, à mon sens, de réduire les possibilités des fonctionnaires de se soigner, mais de permettre aux salariés du privé de se soigner convenablement.

Pour finir, je voudrais juste remarquer quelques points pour compléter cette analyse :

  • Il n'existe pas de médecine du travail dans notre ministère. Cela évite au gouvernement de repérer des maladies professionnelles chez nous et de mettre au point de la prévention et des traitements, mais peut aussi se répercuter sur les arrêts qui sont accordés. Il serait important, alors que plus de 800 000 personnes sont enseignantes, de déterminer un peu ce qui frappe ces personnes pour réduire les arrêts-maladies. Malheureusement, au départ, l'investissement est coûteux, même si le gain devrait être positif à terme…
  • L'Education nationale ne lutte que très rarement contre les arrêts abusifs. Il y a dans chaque établissement un ou deux collègues absents tout le temps alors que tout le monde sait qu'ils ne sont pas malades. Or, les principaux et proviseurs ne demandent jamais de contrôles de la Sécurité Sociale. Après tout, le ministère n'a qu'à prendre ses responsabilités.
  • Enfin, à cause des suppressions de postes, on ne remplace plus les arrêts, ce qui fait que la qualité du système éducatif se dégrade. Dans le secondaire, à Créteil, il faut un minimum de deux semaines d'absence pour que l'administration remplace. En effet, on a d'abord supprimé les remplaçants, parce que cela se voit moins en début d'année dans les bahuts. De fait, on remplace de moins en moins, et la continuité du service public est mal assurée. Je signale cependant que cela varie en fonction des disciplines : en maths, on est presque à trois semaines…

Voilà, cher lecteur, quelques éléments concernant cette énième polémique anti-prof. Attendons maintenant la prochaine…

dimanche 28 juin 2009

Nous voulons la vérité sur les attentats de Karachi.

Tu vas avoir l'impression que je radote, cher lecteur, mais l'affaire de Karachi a commencé à prendre maintenant une certaine ampleur. Sur son blog, Rébus nous invite à demander collectivement que la vérité soit faite. Même si je doute de l'impact de la blogosphère, je relaie donc cet appel, en affichant la bannière ci-dessous.

Quelques blogs l'ont déjà fait.

De plus, les familles des victimes de l'attentat de Karachi ont ouvert un site : n'hésitez pas à le consulter.


samedi 27 juin 2009

Billet n°400 : pour François Fillon, l’homme politique ne sert plus qu’à traiter les évidences…

J'aime les hommes politiques quand ils sont capables de porter le débat démocratique à son paroxysme. Ainsi, François Fillon le démontre aujourd'hui, grâce à cette magnifique phrase :

"Il n'y a pas d'autre solution pour sauver nos régimes de retraite que de travailler plus longtemps, alors même que la vie s'allonge. Si ça n'est pas le cas alors il faudra débattre ensemble de la question de l'âge légal de la retraite"
François Fillon n'a donc aucun choix, quelle que soit l'école politique qu'il défend : il ne peut pas privatiser les retraites, il ne peut pas les rendre complètement publiques, il ne peut pas augmenter les cotisations sociales, il ne peut pas travailler à la baisse du chômage pour permettre aux cotisations de rentrer, il ne peut pas pousser le patronat à augmenter les salaires et ne peut pas jouer sur l'État pour qu'il le fasse de son côté… Aucune solution, d'aucune autre école politique, ne peut prévaloir. Seule celle-ci est possible.

Si j'étais homme politique, je dirais la chose suivante : « je pense que c'est la meilleure solution possible par rapport à toutes les autres qui sont proposées actuellement par mes concurrents politiques. » Mais si Fillon faisait cela, on se rendrait compte que son choix n'est pas forcément le meilleur, alors, on affirme de manière péremptoire, et on oublie le reste…

Heureusement, François Fillon a du soutien du côté des médias. Ainsi, le Monde proclame fièrement : « 36 % DES FRANÇAIS PRÊTS À RECULER L'ÂGE DE LA RETRAITE ». Donc, 64% des Français sont contre… Ah, le verre à moitié plein et/ou à moitié vide…

vendredi 26 juin 2009

« Merci d’avoir dépouillé le 7 juin », dit le maire des Lilas.

Hier soir, en rentrant de ma journée de travail dure et acharnée, j'ai découvert, dans le tas d'enveloppes ramassé par ma conjointe un peu plus tôt dans la journée dans notre boite aux lettres, une lettre du maire des Lilas. Immédiatement, la crainte a pointé son nez : il y a quelques temps, j'ai été repéré par l'autre blogueur influent des Lilas, proche de la municipalité. Mais non, rapidement, mon égo a dû se réfréner : l'édile voulait juste me remercier d'avoir participé au dépouillement des élections européennes le 7 juin dernier.

C'est vrai que le dépouillement n'est pas une opération très agréable. D'abord, cela reste très formalisé, et c'est heureux mais embêtant quand on tente de déterminer dans quelle catégorie de bulletin nul rentre ce vote-là (il y en a 11 ou 12…). Ensuite, on est encadré par les militants des différents partis qui peuvent parfois s'avérer vraiment pénibles. Enfin, c'est généralement assez long. Cette fois-ci, il s'annonçait vraiment difficile du fait du très grand nombre de listes, mais la participation a en largement réduit la durée. A 21h15, c'était bouclé

Ce qui m'étonne, cependant, est contenu dans cette notion de « remerciements ». Le vote est un devoir du citoyen. Celui-ci l'exerce comme il l'entend. Cependant, il est bien évident qu'on ne peut pas mener une élection sans une organisation très pointilleuse qui garantit la clarté de l'élection. Ainsi, dans un bureau de vote voit-on s'activer les militants, les élus de la commune et les fonctionnaires territoriaux mobilisés pour l'occasion. Le dépouillement fait partie de la mission du citoyen. Généralement, je ne demande pas à dépouiller, mais je considère que je dois accepter si on me le demande, sauf si j'ai un engagement vraiment impératif, assez rare le dimanche soir. Le président de mon bureau de vote m'ayant repéré, je suis souvent sollicité, mais cela ne me dérange pas vraiment.

Le fait que le maire me remercie signifie donc que mes concitoyens ont tendance à refuser lorsque les présidents de bureau demandent. Or, sans un dépouillement honnête et clair, l'élection n'est pas possible : il ne faut surtout pas que les fonctionnaires ou les élus fassent le dépouillement ! Certes, on pourrait mettre en place des machines à voter (cela existe à certains endroits en France) mais on sait aussi que ces systèmes peuvent être piratés et ne sont pas plus sûrs que le dépouillement.

Reste cette lettre. A mon sens, le maire ne devrait pas écrire ces courriers. Le citoyen doit participer au bon fonctionnement des opérations électorales et il est normal que nous nous soyons mobilisés. Le fait de nous remercier nous indique qu'on est bien gentil et qu'on aurait pu aller picoler au bistro plutôt que de venir. J'estime que nous avons simplement fait notre devoir de citoyen. Il est dommage qu'un maire se sente obligé de remercier ses concitoyens de participer à la bonne marche du processus démocratique…

jeudi 25 juin 2009

Elèves, l’Iran vous le montre : islamisme et démocratie sont inconciliables.

Lorsqu'arrive les quelques minutes que nous consacrons en terminale générale à l'islamisme, il y a un argument que les élèves tangents sur cette question nous ressortent régulièrement : « oui, mais, Monsieur, il y a des élections en Iran. »

Évidemment, il y a bien des élections en Iran, qui servent à élire un président et un parlement. Pour nous, il est toujours difficile de faire émerger la complexité du système politique iranien. Bien qu'élu, le président est contrôlé par les gardiens de la Révolution, véritable groupe dirigeant qui impose sa dictature à l'ensemble du pays. D'ailleurs, les événements qui se déroulent en ce moment le démontrent assez. C'est bien l'ayatollah Khamenei qui s'est exposé pour défendre l'élection d'Ahmadinejad, le président ayant vraiment daigné réapparaître durant les dernières heures. Rubin avait publié un excellent schéma qui résume bien les choses.

Là, on est face à une dictature assez subtile. En Iran, on a bien veillé à respecter les formes de la démocratie, comme on avait pu le faire en URSS par exemple. Cependant, on a encore été plus loin en laissant la possibilité à différentes tendances de l'islamisme de s'exprimer, sous le contrôle des gardiens, alors que les Soviétiques ne présentaient que des candidats issus du Parti Communiste d'Union Soviétique. Ainsi, ce régime dictatorial pouvait se vanter d'avoir réussi à faire croire qu'un régime de type théocratique pouvait se marier avec une démocratie, certes restreinte et imparfaite, mais tout de même. De nombreux élèves s'accrochent à ces élections pour croire que l'islamisme n'est pas une idéologie totalitaire.

Ce qui s'est passé ces dernières semaines en Iran prouve que ce calcul est faux. Il reste impossible de concilier une religion exerçant un poids considérable sur le système politique et une démocratie. La religion est absolue : elle ne peut souffrir d'être remise en cause par le débat démocratique. La répression s'est donc abattue sur le peuple iranien, avec la violence des régimes totalitaires.

J'espère que nos jeunes, ici, tentés par l'islamisme, comprendront qu'ils soutiennent, de fait, une idéologie qui ne peut leur apporter la liberté et la démocratie. On peut prôner une idéologie totalitaire en démocratie, mais qu'on en soit au moins conscient.

mardi 23 juin 2009

Demain, j’ai un nouveau patron !

Un changement de gouvernement, cher lecteur, est sans doute pour toi quelque chose de très lointain. Après tout, on n'est pas au contact de l'administration très souvent, et si on s'intéresse peu à la politique, ce n'est pas un nouveau ministre qui va te changer la vie.

Pour les fonctionnaires, le sujet est plus sensible. En effet, un ministre est une sorte de patron. Certes, il est très lointain et on ne le rencontre jamais. Déjà qu'on ne voit le recteur qu'une fois tous les trois ans, alors, un ministre… Je ne suis pas un employé d'une PME qui supporte tous les jours son employeur, ou un fonctionnaire territorial qui voit passer le maire devant son bureau chaque matin. Pour nous, le patron est le représentant de l'État sur place. Dans mon lycée dit difficile, il s'agit du proviseur, qui, pour beaucoup d'enseignants, devient l'incarnation du ministre, qu'on soit en accord ou en désaccord avec lui. En réalité, les chefs d'établissement sont davantage des fusibles qui encaissent à la fois les pressions du recteur et de l'inspecteur d'académie et les contestations des enseignants, sans oublier les parents et les élèves…

D'une certaine manière, lorsqu'un ministre change, on a un nouveau chef. Et souvent, pour nous, arrive de suite un nouveau cycle de réforme, totalement contradictoire avec le précédent. Les politiques sont comme cela : ils s'imaginent pouvoir transformer radicalement l'Éducation nationale et faire enfin la réforme. Ils essaient, et disparaissent ensuite. Jusqu'à ce jour, je n'ai connu que Jack Lang qui fut ministre sans espérer changer quoi que ce soit.

On se demande donc à chaque fois à quelle école idéologique et à quelle école pédagogique appartient le futur ministre. Cela provoque toujours des réactions variées en salle des profs, et de l'inquiétude. En plus, en ce moment, comme on est en surveillance de bac, on n'a rien de mieux à faire que de se poser ce genre de questions.

Or, depuis plusieurs mois, il était évident que nous ne garderions pas notre ministre. Xavier Darcos s'échinait à quitter ce ministère qu'il avait pourtant tellement souhaité obtenir. Son sort fut scellé à la fin de l'année dernière, lorsqu'il recula sur la réforme du lycée. Pourtant, la semaine dernière, un bruit courait dans les établissements qu'il resterait en place, et on imaginait tous sa tête… Bon, apparemment, il va aller aux affaires sociales, ce qui augure bien des futures relations entre syndicats et gouvernement.

On a eu aussi les annonces de Nadine Morano, très intéressée par le poste. Cette hypothèse déclenchait l'hilarité et/ou agaçait les salles des profs. Seuls les représentants syndicaux s'en satisfaisaient vraiment : « avec elle, on réussirait rapidement à remplir nos AG, un peu déserte en ce moment… »

Il y a deux semaines, les médias ont évoqué le nom de Nathalie Kosciusko-Morizet. A l'évidence, elle ne connaissait rien à l'éducation, et nous en conclûmes que Nicolas Sarkozy dirigerait directement ce ministère, mettant en avant une ministre avenante pour faire passer ses suppressions de postes.

Les choses se précisent finalement, après le Congrès d'hier : ce serait Luc Chatel qui hériterait du boulet. A ma connaissance, l'ancien salarié de l'Oréal ne connaît pas le Ministère de l'Éducation. Cela signifie donc que Sarkozy pilotera en temps réel l'action de ce ministre (je te rappelle, cher lecteur, qu'il gère quand même le premier budget de l'État). Cela signifie aussi qu'aucun poids lourd de la droite et qu'aucun homme politique de gauche cherchant un poste n'a accepté de se frotter à l'éducation.

On voit bien que ce ministère est vraiment le bâton merdeux de la droite…

lundi 22 juin 2009

L’Etat participe à la destruction d’emplois.

Comme tu le sais, cher lecteur, nous sommes dans une période de crise économique grave. En 2009, l'économie française a détruit 700 000 emplois, et ces destructions se poursuivent aujourd'hui. Souvent, on accuse les employeurs de sacrifier les contrats précaires, les CDD et autres contrats aidés divers.

On oublie souvent que l'un des principaux employeurs de précaires est… l'État ! Depuis que la doctrine politique dominante vise à réduire la masse salariale de la fonction publique pour essayer de se débarrasser de la dette (enfin, il paraît, parce que le président vient de dire que non, en fait : la dette, c'est comme le chasseur, y en a une bonne et une mauvaise), l'État recourt massivement à des contrats précaires qui permettent de maintenir l'activité tout en n'engageant pas de fonctionnaires ne pouvant être licenciés.

L'Éducation nationale est une spécialiste de ce type de contrats, qui ont eu tendance à se précariser de plus en plus. Les surveillants ont un salaire moins intéressant qu'en 2002, avant la suppression du statut de Maître d'Internat-Surveillant d'Externat (MI-SE), travaillent davantage et ne peuvent plus facilement se former en même temps. D'ailleurs, le gouvernement se prépare à réinventer un statut similaire pour les futurs profs du secondaire qui devront avoir un master, pour permettre aux pauvres d'aller au bout. Quand ces étudiants travailleront 35 heures par semaine dans un collège et devront préparer un concours et un master en même temps, combien de jeunes des milieux populaires pourront devenir prof ?

En attendant, comme tous les ans, l'Éducation nationale se prépare à licencier sa masse de précaires. Cette année, 30 000 personnes, qui ont travaillé entre 24 et 36 mois pour l'État, se préparent à aller pointer au Pôle-Emploi, dans une période très favorable pour trouver un travail.

Les grands syndicats appellent à une journée de grève et de manifestation le 30 juin pour protester contre cette politique de l'État (merci à Jon qui a signalé le communiqué de la CGT à ce propos). Tiens, c'est marrant, c'est le jour du brevet des collèges : il n'y aura pas grand-monde en grève dans les collèges. Dans les lycées, les cours seront souvent finis et les profs en train de corriger les copies de bac. Quant au primaire, il sera à 2 jours des vacances scolaires…

Je crains que ce mouvement soit lui aussi bien précaire, comme celui du 13 juin ou comme celui du 26 mai.

dimanche 21 juin 2009

Karachi : gardons notre calme et demandons des comptes.

Voilà que surgit sur la scène politique française la première affaire importante concernant Nicolas Sarkozy. Ce matin, en butinant sur mon Netvibes, j'ai regardé chez Seb Musset la vidéo de sa réponse à Bruxelles à un journaliste qui l'interrogeait.


Je trouve cette réponse pathétique. En effet, on ne parle pas ici d'assertions de journalistes ou d'opposants, mais d'une enquête menée par des juges d'instruction et qui doivent avoir de bonnes raisons de lancer dans les médias ce type d'informations. La petite blague sur le braquage à Bruxelles est d'autant plus déplacée dans ce contexte et la légèreté de Sarkozy assez choquante. Je suppose que les familles des ingénieurs français tués à Karachi ont dû apprécier. Or, le président demande, dans cette vidéo, qu'on lui amène des preuves, que les juges doivent bien avoir puisqu'ils s'expriment là-dessus.

Cependant, comme le Faucon, je pense qu'il ne faut pas s'enflammer et hurler au loup de suite. Il faut que la justice puisse mener son travail sereinement, même si c'est toujours difficile en France d'enquêter sur des affaires impliquant de grands responsables publics, et, au lieu de perdre leur temps sur la burqa, nos parlementaires pourraient créer une commission d'enquête sur le sujet.

Il faut aussi faire attention car cette affaire implique le Pakistan. Ce pays est actuellement en situation instable, a besoin du soutien de l'Occident dans sa lutte contre les talibans, et est frontalier de deux pays en crise, l'Afghanistan et l'Iran. Or, cette affaire pourrait avoir des répercussions internationales importantes.

Il faut donc rester calme, cher lecteur, car nous sommes dans une affaire à échelle internationale, exiger la vérité et attendre les conclusions de l'enquête.

Cependant, j'espère que nous serons prêts à hurler au loup, dans quelques temps, s'il s'avère que loup il y a…

samedi 20 juin 2009

Quelques questions sur le traitement médiatique du procès Courjault.

Hier matin, en me rendant dans mon lycée dit difficile, j'ai entendu, sur France Inter, le mari de Véronique Courjault se réjouir du retour prochain de sa femme auprès de lui et de leurs enfants. Une espèce de consensus mou s'était dégagé dans la presse ces derniers jours concernant ce dossier : cette femme était victime de processus psychologiques qu'elle ne maîtrisait pas, était sous l'influence d'une famille névrosée et méritait donc la clémence de la justice. On louait partout la repentance de l'accusée.

Dès ce moment, j'ai ressenti une véritable gène devant la manière dont les médias avait traité le problème, et des questions ont commencé à poindre. Une discussion avec ma conjointe, de retour d'une journée de colloque concernant la pédophilie féminine et les souffrances des enfants m'ont permis de les clarifier un peu. N'aimant pas me poser des questions tout seul, je te les soumets, cher lecteur attentif. Elles concernent la manière dont les médias ont traité le sujet et les valeurs qu'ils n'ont pas cessé de diffuser, et non pas le cours du procès et le verdict en lui-même, que je suis bien incapable de commenter.

Le déni de grossesse est-il un crime en lui-même ?

Depuis que le procès a débuté, les médias ont progressivement mis en avant cette notion de déni de grossesse. Certes, il s'agit d'une analyse psychanalytique du problème, et au moment des témoignages des autres membres de la famille de Véronique Courjault, les journalistes ont largement débroussaillé ce qui avait pu l'entraîner. Progressivement, et finalement hier, cette notion du déni est devenu tellement prégnante qu'on a eu le sentiment que les assises d'Indre-et-Loire jugeaient en réalité un déni de grossesse. Or, il me semble que ce procès concernait quelque chose de bien plus grave : on jugeait trois meurtres ! Oui, cher lecteur, trois meurtres. Je sais que cela peut étonner après le traitement médiatique du sujet, mais le déni de grossesse ne pouvait être, dans ce cas, qu'une explication possible du crime, voire éventuellement d'une circonstance aggravante ou atténuante, mais ce n'était pas le thème du procès. Or, les journalistes n'ont pas cessé d'effacer cette notion de meurtre. Je trouve qu'il y a là une confusion grave et qui brouille la compréhension réelle de cette affaire.

Comment gérer la parole du mari et des enfants ?

Jean-Louis Courjault n'a cessé d'intervenir dans les médias durant le procès, ce qui est normal vu le contexte, mais surtout, les médias n'ont pas cessé de relayer sa parole. Le mari a développé un argumentaire s'appuyant sur le rôle de bonne mère de l'accusée et sur le besoin que ses enfants avaient de la revoir. A chaque fois que les médias ont mis en avant cette logique, mon malaise s'est accru. En effet, on pouvait réellement s'interroger, après un tel procès, sur le fait de confier à nouveau deux gamins à ce couple, vu que la mère a tout de même éliminé 60% de la famille. Or, cette question n'a jamais été vraiment posée par la sphère médiatique (j'ignore si elle l'a été au procès), toute gargarisée par le rôle de mère de l'accusée. En clair, comme elle est mère, et ce malgré le fait qu'elle ait tué la majorité de ses enfants, Véronique Courjault doit sortir rapidement de prison pour retourner s'occuper d'enfants qui ne pourraient se développer de manière équilibrée sans elle. J'admets rester circonspect devant ce raisonnement médiatique. La justice ôte régulièrement la garde d'enfants à des parents bien moins inquiétants que ceux-là…

Être mère excuse-t-il tout ?

Cette question est entraînée par la dernière. Je me suis demandé : que se serait-il passé si c'était le mari qui avait sciemment éliminé ses enfants et qui était victime du déni de grossesse comme sa femme ? A mon avis, la condamnation aurait été bien plus sévère, tout simplement parce qu'un homme est considéré comme bien plus dangereux, et sa condition de père ne prend pas le dessus. Dès le premier meurtre, un homme aurait pris 20 ans de réclusion. Or, dans ce cas précis, l'accusée échappe à sa condamnation du fait de sa condition de mère, qui outrepasse sa condition de citoyenne responsable de ses actes. J'ai même entendu un journaliste sur Inter (je ne me souviens plus de qui) expliquant qu'on pouvait la remettre rapidement en liberté car elle était dans l'impossibilité de toute façon d'avoir un nouvel enfant, ce qui éliminait le risque. Or, un homme, lui, ai-je poursuivi dans ma tête, peut toujours avoir des enfants et reste donc dangereux. A mon sens, on trouve là, dans nos médias, une véritable iniquité de traitement. De plus, je suis persuadé que pourrissent en prison de nombreux meurtriers qui ne pourraient plus commettre leurs crimes aujourd'hui et qui se repentent vraiment, mais qu'on n'est pas prêt de libérer pour autant.

Ce traitement médiatique est-il un bon signe pour les femmes ?

Pour en finir, cette dernière question n'est pas la plus anecdotique. Il est évident que Véronique Courjault a été traitée comme une mère et non pas comme une femme citoyenne et responsable. Cela signifie donc que la condition de mère, à partir du moment où une femme l'est, outrepasse le reste. Donc, les femmes ne restent pas femmes lorsqu'elles deviennent mère. De plus, cela signifie aussi que les maltraitances faites par les femmes aux enfants sont moins sévèrement punies que lorsqu'elles sont commises par les hommes. Comme le signale Michel Redon, un homme sera qualifié de salaud s'il commet de tels actes, mais il n'existe pas de vocabulaire dédié aux maltraitances faites par les femmes aux enfants.

Je ne sais pas ce qu'en pensent mes camarades blogueuses, mais il est anormal que les femmes soient traitées par la justice de manière différente des hommes. Cela perpétue un certain machisme ambiant déjà prégnant, ne protège pas les enfants de tous les dangers et laisse penser qu'une mère, du fait de son rôle particulier, peut être exonéré de tout. Or, à mon sens, les femmes ne seront égales aux hommes que lorsque la société considérera qu'elles sont autant responsables, autant dangereuses et aussi condamnables que les hommes pour des crimes identiques.

Je te laisse ces questions, cher lecteur. Libre à toi d'y apporter tes réponses en commentaire ou, si tu es blogueur et que le thème t'intéresse, d'y consacrer une petite note…

jeudi 18 juin 2009

Le voile à l’école : récit de cette époque (partie 2).

Alors que je me lance dans la seconde partie de ce récit, je découvre que l'initiative d'un groupe de parlementaires sur la burqa a déclenché une belle série de billets sur la question, autant chez les pro-interdictions que chez les contres. Je signale que ces deux billets ne visaient pas cette question mais ont été provoqués par le discours d'Obama au Caire.

Fin 2003, le pouvoir politique a décidé de se saisir enfin de la question du voile. Il faut revenir sur le contexte de l'époque. Le président réélu, Jacques Chirac, gouverne mais manque de légitimité. Il doit affronter l'inquiétude soulevée par le score important du Front National en 2002. De plus, il est doublé par Nicolas Sarkozy, bouillonnant ministre de l'intérieur, qui a commencé à travailler sur le Conseil Français du Culte Musulman. Taper sur les musulmans radicaux ne pouvait donc que servir ce président et ce gouvernement en position difficile à ce moment-là.

Cette situation politique a pesé sur les enseignants durant la préparation de la loi. J'ai pu assister à quelques AG sur ces questions à l'époque, et il était évident que nous étions gênés. En effet, nous ne voulions pas que nos gamines soient les victimes d'un conflit opposant divers acteurs : l'extrême-droite, les islamistes toujours actifs et quelques politiciens espérant profiter de la situation. Par contre, nous voulions tous une décision, quelle qu'elle soit. Nous n'en pouvions plus de ces conflits permanents qui revenaient chaque année. La majorité espérait l'interdiction, pour libérer ces jeunes filles de l'oppression et leur permettre de s'émanciper. Les autres souhaitaient que la liberté de choix des enfants l'emporte. Aucun de nous ne voulait d'une nouvelle vague de racisme touchant les musulmans de notre pays.

La loi trancha. Elle modifia l'article L141-5-1 du code de l'éducation pour aboutir aux termes suivants :

"Dans les écoles, les collèges et les lycées publics, le port de signes ou tenues par lesquels les élèves manifestent ostensiblement une appartenance religieuse est interdit.

Le règlement intérieur rappelle que la mise en œuvre d'une procédure disciplinaire est précédée d'un dialogue avec l'élève."


Ce texte fut âprement discuté entre nous, en particulier sur la nature du mot « ostensible ». On aboutit à l'idée qu'il s'agissait d'un signe réellement visible : on excluait les petits signes portés en collier par exemple, facilement cachés, mais tout ce qui était visible (voile, kippa, turban…) quittait l'école. Personne n'était dupe et c'était bien le voile qui était visé, mais la loi avait l'avantage de ne rien citer de précis, ce qui évitait les problèmes de discrimination. Les règlements intérieurs ne changèrent pas : on maintint l'interdiction des couvre-chefs.

A la rentrée 2004, il y eu bien quelques tentatives, et les négociations prévues par la loi eurent lieu. Dans la plupart des cas, les parents cédèrent : il n'y avait pas (et il n'y a toujours pas) de lycée musulman en Seine-Saint-Denis et ces familles rechignaient à envoyer leurs gamins dans l'enseignement catholique plus tolérant avec les voiles ; la menace de l'envoi au bled ne fut pas appliquée ; les gamines restèrent très majoritairement scolarisées. Je n'ai pas connaissance directe d'élèves ayant quitté le système éducatif suite à cela, mais peut-être y a-t-il eu des cas…

Le problème a-t-il été résolu ? Certes, nous avons gagné la paix en 2004. Aujourd'hui, on ne parle plus de cette question avec nos élèves, les gamines sont en classe, et tout le monde est content…

Quoique… Lorsqu'on regarde par la fenêtre de la salle des profs au moment de l'arrivée des élèves, on voit que les voiles sont toujours là. Ils disparaissent simplement lors du passage de la grille de l'établissement. A l'extérieur, les filles qui étaient voilées avant le restent. La différence flagrante est qu'elles n'en parlent plus jamais avec nous maintenant, et qu'elles vivent cela hors du cadre de l'école. La remise en question a disparu. On pourrait me dire qu'elles ont au moins la possibilité d'être tête nue dans l'enceinte de l'école. C'est juste, mais le retrait du voile physique empêche-t-il le retrait du voile symbolique ?

De plus, il y avait un aspect qu'on n'a plus maintenant : on ne sait plus ce qui motive ces gosses. Certaines nous disaient se voiler librement et affirmer ainsi une identité. D'autres obéissaient à la famille. Quelques-unes étaient de vraies islamistes convaincues, d'autres de simples musulmanes pratiquantes, et les dernières étaient tout simplement de pauvres adolescentes paumées. Certaines vivaient tout cela très mal et d'autres semblaient être tout à fait au clair avec elles-mêmes et bien dans leur peau. J'en ai même entendu présenter le voile comme un acte féministe (Olympe va hurler) qui permettrait aux jeunes filles de se libérer du machisme très fort des hommes (on ne touche pas à une femme voilée, on la respecte). Qu'en est-il aujourd'hui ? Comment le phénomène évolue-t-il ? On n'en sait rien, et ces élèves sont livrées à elle-même.

Au final, on a gagné la paix dans l'école, ce qui est indéniablement positif, et la République a affirmé ses valeurs laïques, mais on a perdu le contact avec ces gamines, ce que je ne peux que regretter malgré tout. L'école a-t-elle un effet ? Dans la situation actuelle, impossible de le savoir …

mercredi 17 juin 2009

La campagne sur le chèque-éducation : point de vue.

Durant la campagne électorale, les libéraux ont mis en avant l'idée d'un chèque-éducation pour mener la réforme salutaire du mammouth. Ils sont soutenus par les réactionnaires dans cette croisade. Qu'est-ce que c'est ? Il s'agit de redistribuer l'argent consacrée aujourd'hui à l'éducation sous forme de chèque à l'ensemble des citoyens ayant des enfants pour leur permettre de choisir librement leur école. A priori, l'idée est très séduisante, et il faut maintenant comprendre ce qu'elle cache exactement. Chaque famille recevrait 6 810 € par enfant.

Cela fait un moment que j'ai vu passer des textes sur cette idée, et que je me suis d'ailleurs étonné. Les libéraux soutiennent en général une diminution drastique des dépenses publiques et un recul de la place de l'Etat. Or, ce système de chèque permet de contourner l'attachement des Français au système éducatif en leur disant que l'investissement de l'Etat se maintient. Cependant, comme les écoles ne toucheront plus d'argent de l'Etat, elles devront forcément draguer les citoyens, et donc, produire des offres éducatives suffisantes pour attirer le citoyen. Elles seront donc privées, puisque les fonds publics partiront tous dans les chèques. En plus, l'Etat perdrait le contrôle de ses fonds, ce qui m'étonne encore plus chez des libéraux toujours prêts à contrôler et recontrôler ce que l'infâme voleur de notre argent fait avec.

Pourquoi donc maintenir une dépense publique pareille et ne pas laisser le marché équilibrer les choses ? Les libéraux essaient simplement de prendre en compte deux aspects importants de la société française qu'ils sont bien obligés d'intégrer. D'abord, ils acceptent quand même l'idée qu'il y a des pauvres dans ce pays mais que le système vise à éduquer tout le monde : il faudra donc que les pauvres puissent quand même payer. Ensuite, ils savent qu'une pure suppression de l'Education nationale entraînerait une grosse émotion qu'il faut compenser.

Les promesses de ce chèque sont-elles tenables ? Je ne le crois pas, et ce à plusieurs titres.

D'abord, on considère qu'avec ce chèque, les familles auront le libre-choix de leurs écoles. On te met donc en avant, cher lecteur, l'idée de libre-concurrence entre les écoles pour séduire le demandeur. Or, on sait que lorsqu'un système éducatif est mis en concurrence, ce ne sont pas les usagers qui choisissent leur établissement, mais les établissements qui choisissent leurs élèves. Toutes les écoles ont un problème de places, du fait de la structure. Par exemple, imaginons un lycée qui peut accueillir 1 000 élèves, et pas plus. Si ce lycée a bonne réputation, comme un grand lycée du centre de Paris, il va recevoir 15 000 dossiers. Dans ce cas, c'est l'établissement qui choisira les meilleurs élèves et pourra continuer à dire qu'il est excellent. Ensuite, les élèves rejetés se rabattront sur les lycées de second rang, qui prendront les meilleurs dossiers rejetés. Enfin, c'est l'argument géographique qui jouera, et là, on retrouvera dans le bahut de secteur, en banlieue, les gamins les plus pauvres et les plus faibles. Mécaniquement, on va retrouver une structure par niveau, et y compris s'il se met en place des écoles qui innovent pédagogiquement : elles choisiront le public souhaité par l'école, et pas l'inverse. D'ailleurs qu'est-ce qui empêchera une école de demander un tarif plus élevé que le chèque-éducation ? On pourra comme cela créer des écoles pour riches qui absorberont en plus des fonds publics.

A partir du moment où le libre-choix n'existe pas, à quoi servent ces chèques ? A part à supprimer les fonctionnaires et le système public, à peu de chose. Or, ce qui me gène dans la démarche libérale, c'est qu'on va obtenir un système totalement inégalitaire (déjà que l'actuel l'est…), avec des avantages pour ceux qui connaissent les réseaux ou ont des ressources, et qui n'a aucune garantie d'être plus efficace. Aurélien Véron met en avant l'idée de la liberté pédagogique offerte aux écoles qui seraient choisies. Mais là encore, en système libre, les parents choisissent les établissements qui ouvrent l'entrée au supérieur d'élite. La pédagogie n'intéresse que les enseignants, les parents parlent eux de réussite et d'avenir professionnel. En clair, on aura un système encore plus inégalitaire qu'aujourd'hui, voire même qui coûtera plus cher que l'actuel aux familles, tout en continuant à avoir la même dépense publique.

Et puis, il manque quelque chose. Si on met en place un système d'écoles privées, comment vont-elles, avec la dépense actuelle, mettre un place un système de profit ? En effet, on va avoir des acteurs privés qui vont investir, et qui attendront des retours d'investissement. J'aimerai bien savoir comment on dégagera le bénéfice que la dépense publique actuelle ne permet certainement pas de trouver.

Franchement, camarades libéraux, payer des impôts pour avoir un système éducatif qui favorise encore plus les enfants favorisés que celui d'aujourd'hui ne le fait, cela ne m'intéresse pas. Encore une belle usine à gaz…

PS : tiens, comme je suis charitable, vous pouvez aller lire ce billet de l'Hérétique, dans lequel il me taille un beau costume. Il faut que je réponde, mais je ne pourrais le faire qu'après avoir lu complètement le Rapport Descoings, ce que, j'admets, je n'ai pas encore fait…

mardi 16 juin 2009

Camarades socialistes : allez, un peu de nerf !

Je sais que cela commence à t'épuiser, cher lecteur, mais cela fait quelques jours, qu'avec un bon nombre de camarades, nous essayons de convaincre les parlementaires de ne pas aller au Congrès de Versailles du 22 juin. Depuis, quelques billets se sont opposés à notre initiative. Le Faucon, sorti de sa cave, nous a fait part de ses doutes sur la question. Dedalus et Hermès ont développé des arguments intéressants. Dans mes commentaires, Nicolas a aussi avancé quelques arguments intéressants.

Globalement, nous avons quand même eu un écho chez une partie de l'opposition. La plupart des Verts et les députés et sénateurs communistes n'iront pas.

Quant au PS… Eh bien, ils vont faire le truc le pire possible ! Non seulement ils vont aller écouter religieusement Sarkozy pendant le temps de son discours. Je te rappelle que le président ne peut pas être interrompu, peut dire ce qu'il veut, puis quitter le congrès sans que personne ne puisse l'interroger et le contredire, surtout qu'il peut dissoudre l'Assemblée si jamais on l'ennuie.

Mais ensuite, les parlementaires PS quitteront le Congrès et ne diront rien lors du débat suivant. En clair, durant cette journée, le président pourra dire ce qu'il veut puis ne même pas avoir un peu de contradiction. Je suis sûr que c'est encore François Bayrou qui récupérera l'avantage, parce que lui, il va y aller.

Le PS a choisi la meilleure stratégie. Non seulement il va désappointer ses électeurs, mais il va abandonner les autres mouvements de gauche et servira la soupe au président. J'admets avoir un mal fou à comprendre la stratégie que développe le premier parti de gauche, pour encore quelques mois.

Bon, les gars, vous pouvez encore changer d'avis. Cela ne vous coûtera rien : vous êtes déjà tombés bas et pouvez difficilement sombrer davantage. N'écoutez pas l'argument sur l'antisarkozysme pavlovien. On veut que vous soyez pavlovien, là, maintenant ! On veut une opposition qui combat et qui s'oppose. Devant un tel président, un peu de Pavlov nous ferait aussi un peu de bien.

La perle du boycott du Congrès du 22 juin 2009.

Suite à notre appel au boycott, les réactions se multipient dans la blogosphère.

Voici une petite perle qui va vous permettre de suivre l'évolution des choses. N'hésitez pas à me signaler si je ne vous ai pas repéré. Je ne suis pas encore un grand spécialiste de la blogosphère.

Bonne lecture !

Le boycott du congrès du 22 juin 2009.



PS : ah, on ne trouvera pas de telles choses sur un blog de foot, hein, Manuel ???

dimanche 14 juin 2009

Initiative de la blogosphère : parlementaires, n'allez pas au Congrès de Versailles du 22 juin.

Hier, Luc Mandret nous indiquait que la blogosphère pourrait avoir un pouvoir si elle répercutait en masse une information ou une idée.

Eh bien, essayons, cher lecteur !

Le président de la République a convoqué le congrès le 22 juin pour pérorer sur sa victoire aux européennes et présenter ses projets pour l'avenir. Cette réunion, à la limite des traditions démocratiques françaises, n'a aucun intérêt. Elle ne vous apportera rien, même s'il y a un débat parlementaire après. Alors, cher-e-s camarades du PS, du PCF, des Radicaux de Gauche et des Verts, du Modem, voire même de l'UMP qui êtes en désaccord avec la manière dont le président dirige ce pays, n'y allez pas !

Il y a bien des choses plus intéressantes à faire ce jour-là, pour clamer l'opposition de la majorité des Français à la politique du président de la République. Pour une fois, soyez inventif, et mobilisez-nous.

Comme Nicolas et comme Juan, je pense qu'il y a là un moyen de faire démarrer quelque chose.

Cher-e-s lecteur-e-s, cher-e-s blogueur-e-s, si vous êtes en désaccord avec la politique de Sarkozy, que vous pensez que les parlementaires ne doivent pas s'humilier à écouter religieusement le président, relayez cet appel.

samedi 13 juin 2009

Pour une fois, en ce 13 juin, je ne manifeste pas.

Cher lecteur, comme tu le sais, je suis un des activistes privilégiés de ce pays qui aime souvent manifester. J'ai soutenu avec force les mouvements des 29 janvier, 19 mars et 1er mai 2009. Progressivement, je me suis décalé de la stratégie menée par les centrales syndicales. En effet, après deux journées de grève très suivies et trois manifestations d'une ampleur historique, les syndicats ont tergiversé. Le 26 mai, ils avaient d'abord annoncé une grève pour finalement ne cesser de reculer. Cette journée fut un bel échec, malgré les annonces de succès. Et puis, il y a aujourd'hui, une manifestation un samedi ; une de plus. Et pour faire quoi ? La prochaine fois, on manifeste le 14 juillet ou le 15 août ?

Tout cela tient à la volonté des syndicats de maintenir un front uni, alors que ce n'est pas forcément ce qu'attendent nos concitoyens. Le 26 mai avait été appelé au départ à la demande de la FSU et du SUD et avait été suivi par la CGT, mais la CFDT ne voulait pas mettre en danger le 13 juin. Résultat : le 26 mai n'a rien donné, et il est à craindre que cette journée soit très peu suivie.

Pourquoi faut-il absolument maintenir une unité syndicale ? Aujourd'hui, il nous faut des actions qui servent et qui apportent quelque chose aux salariés. Or, la volonté d'unité entraîne un immobilisme réel des grandes centrales. Cette stagnation ne peut que s'avérer dévastateur devant un président de la République qui se croit regonflé par les résultats des élections européennes.

Ce front doit se rompre. Il n'y a aucun intérêt, pour la masse des salariés, à rester dans une configuration d'union qui n'aboutit finalement à rien, à part nous faire marcher une fois tous les deux mois dans Paris et nous faire perdre des journées de salaire. Les actions syndicales servent à créer des rapports de force, et il serait bon que l'on s'en souvienne un peu.

J'ai donc décidé de ne pas manifester. De toute façon, l'été arrive, les salariés vont commencer à prendre leurs vacances et il ne va plus se passer grand-chose dans les trois mois à venir. Alors, laissons nos syndicats se creuser un peu les méninges et élaborer de nouvelles stratégies, je l'espère plus efficaces.

Camarades, brisons la vision de droite de l’éducation et positionnons-nous dans un véritable projet progressiste.

Comme tu le sais bien, cher lecteur habitué à lire mes pavés sur ce blog, je suis un habitué des blogs de droite et de la réacosphère. Non pas que je sois masochiste, mais il y a une certaine forme de cohérence à cette démarche. Je suis parfaitement conscient que les idées libéralo-conservatrice tiennent encore le haut du pavé, et ce depuis une bonne vingtaine d'années, et que nier ce fait consiste à s'enfermer sur soi-même. Pour évoluer à gauche, il faut aussi comprendre ce qui fait le succès de nos adversaires. J'avais plusieurs fois tenté de faire des analyses de ce type dans le passé.

Aujourd'hui, je voudrai me faire le porte-parole de la droite concernant les problèmes qui touchent l'Education nationale. Quelles sont les principales critiques qui émergent des blogosphères de droite concernant cette belle institution :

  • 1ère critique qui ressort en général : l'Éducation coûte chère ! L'ensemble des courants de droite sont d'accord sur ce point. En soi, ils n'ont pas complètement tort. La politique éducative est le principal poste budgétaire de notre pays, derrière la santé tout de même qui n'est pas dans le budget de l'État mais dans celui de la sécurité sociale.
  • Ensuite, arrive derrière l'idée que l'Éducation nationale n'est pas efficace et ne parvient plus à produire des élites convenables. Ces arguments s'appuient en général sur les études PISA. Les récriminations qui émergent de cela sont diverses : certains déplorent l'affaiblissement de notre pays qui serait lié à cela ; d'autres estiment que, vue que la liberté est supprimée par le système, il est inacceptable que l'éducation ne soit pas efficace ; enfin, certains se plaignent d'un coût très élevé qui n'entraîne pas de bons résultats.
  • Enfin, les conservateurs comme les libéraux se plaignent de la forte influence de la gauche dans le milieu éducatif. Globalement, beaucoup voudrait faire la peau des enseignants qui influencent nos chères têtes blondes de manière honteuse et les amènent à voter à gauche. Le modèle égalitariste est aussi critiqué car il réduirait le niveau global. Cette critique-là, très politique, me semble d'autant plus étrange que, malgré cet impact lourd de la gauche sur les gosses, la droite est majoritaire en voix dans ce pays, l'extrême-droite reste puissante électoralement ou que Sarkozy ait pu être élu…

Ce qui me gène davantage, c'est que les mouvements de gauche souscrivent globalement à ces analyses et restent atones sur une politique éducative progressiste, alors que l'éducation a été un moteur dans le passé pour la gauche française. On retrouve souvent, et je ne vise aucun parti de gauche en particulier, les arguments sur l'efficacité ou sur le coût, alors qu'il s'agit bien là d'une vision qui vise à casser les ambitions du système éducatif. Il y a quelques temps, l'UNESCO avait pourtant rappelé que l'efficacité de l'éducation se mesurait d'abord grâce à l'investissement par élève.

Pourtant, je ne vais pas nier les problèmes que connaît notre système éducatif. Pour moi, en tant que bon gauchiste, ils sont de plusieurs ordres. Tout d'abord, l'éducation reste, et ce malgré cette influence sempiternelle des gauchistes (dont je suis) en son sein, un système de sélection qui permet la reproduction des inégalités sociales. Ensuite, l'école a tendance, en s'appuyant sur des codes bourgeois de formation, à permettre cette reproduction. Il est aujourd'hui clair que les milieux sociaux défavorisés sont ceux qui échouent le plus à l'école, et ce malgré toutes les politiques qui ont pu être menées dans le passé. Cela signifie donc que les enseignants, moi compris, reproduisent le système inégalitaire malgré toute notre bonne volonté pour essayer de le briser, et que nous ne parvenons absolument pas à créer le fameux « ascenseur social » dont nous nous gargarisons pourtant. Enfin, il ne faut pas se voiler la face : l'extension de la scolarité, si elle a eu des aspects positifs, n'a pas permis de briser la sélection sociale : elle l'a simplement déplacée vers le haut. Aujourd'hui, la sélection se fait au lycée, alors qu'elle se faisait auparavant au primaire et au collège.

Or, à mon sens, la gauche ne peut céder aux idées libéralo-conservatrices, d'autant plus que l'éducation est un domaine où le progrès social est possible. D'autre part, c'est aussi à l'école que l'on peut construire un véritable esprit critique et citoyen des gamins. On ne peut pas déplorer sans cesse, à gauche, que nos concitoyens votent massivement conservateur et ne se révoltent plus contre les injustices et les inégalités, alors que le système éducatif participe pleinement à la reproduction de ce modèle.

Que faire ? A mon sens, un vrai projet éducatif de gauche doit repartir de la situation actuelle. Aujourd'hui, le système éducatif est plus massif mais continue à sélectionner et à tendance à se libéraliser. Pour essayer de casser cette évolution et de revenir à une vision plus progressiste, il faut d'abord envisager un système qui ne parte pas de l'élève bourgeois comme référence mais de l'élève prolétaire qui n'a pas eu accès à la culture chez lui. Si ce n'est pas notre travail de faire l'éducation à la courtoisie des gamins, c'est à nous de faire que la culture savante qui n'arrive pas dans la tête des gamins en difficulté par la famille y arrive par notre biais. Il faut ensuite en finir avec le misérabilisme qui a tendance à parcourir le système : les gosses de pauvres n'ont pas besoin qu'on s'apitoie sur leurs sorts, mais qu'on arrive avec un vrai projet collectif qui vise à les sortir de l'ornière où ils se trouvent. Enfin, je ne dis pas que l'école ne doit plus sélectionner, je dis que l'école doit permettre aux gamins prolétaires d'avoir les mêmes armes que les autres, avec un très haut niveau d'exigence, pour participer à ce processus de sélection. Actuellement, le système ne leur permet pas de concourir à égalité : ils sont sélectionnés de force. Si tout le monde reçoit les mêmes codes, la vraie liberté de choix devient possible. Pour que ce choix soit vraiment libre, il faut enfin que notre pays ne privilégie pas les voies royales, mais investissent massivement dans toutes les formations, y compris les formations continues et pour adultes.

Camarades de gauche, je suis persuadé qu'il est possible de construire un programme éducatif nouveau et révolutionnaire d'une certaine manière. Cependant, ne cédons pas aux sirènes de la droite et à l'individualisme : soyons appuyés sur nos valeurs et soyons fiers de nos idées et de nos projets.

vendredi 12 juin 2009

Naissance d’un blog de footeux de haute-volée : Manuel s’émancipe.

Il est très difficile de découvrir des nouveaux blogs de qualité facilement. Par exemple, je faisais hier la pub du nouveau site de Monsieur Poireau, que j'ai découvert grâce aux liens par Wikiopole.

Or, cette fois-ci, nos blogueurs ont monté un véritable plan média pour se faire connaître. En effet, voilà que de fines plumes de la blogosphère politique se lance dans un blog… de foot ! Et ils ont pensé à tout pour se faire connaître : Twitter, Facebook, publicité chez le numéro 1 du Wikio politique… Tout y est pour assurer à « Une/Deux » une grande carrière.

S'agira-t-il d'un simple blog de footeux comme on en trouve tant dans la blogosphère ? Certainement pas, vu les auteurs qui, j'en suis sûr, vont être capable de prendre de la hauteur, et, peut-être, réussir à me ré-intéresser au football malgré mon rejet profond de la personne de Domenech.

Alors, qui trouve-t-on là ? Un bel échantillon de tous les camps politiques :

  • On a d'abord un libéral avec du poil dans les oreilles, Seb, l'un des membres du réseau Kiwis, dont j'attends toujours le billet sur le lycée d'ailleurs.
  • Un deuxième libéral, un peu moins poilu, l'accompagne. Vous le connaissez bien, car je le cite souvent : il s'agit de Rubin Sfadj, qui a d'ailleurs déjà commencé à nous fournir ses analyses.
  • Ensuite, le Nord est représenté par Marc Vasseur, qui va peut-être ainsi cesser de déprimer sur l'état du PS.
  • Vient après l'une des plus fines plumes de la blogosphère de gauche, Vogelsong, dont j'attends avec intérêt la première analyse du marché des transferts (en pariant sur un texte en moins de 40 000 caractères, mais je peux me tromper).
  • Le Faucon complète ce groupe, et je suis sûr qu'il va être capable de nous mixer ses goûts vinicoles avec sa passion du foot. Il commence déjà d'ailleurs.

Mais reste le plus marquant du groupe. En effet, Manuel, mon compagnon d'Avec nos gueules…, vient de décider de faire son coming-out et d'avouer à la Terre entière sa passion pour le Stade Malherbe de Caen. Vu le risque pris, je ne peux que le féliciter et l'encourager à poursuivre. Peut-être avouera-t-il bientôt sa passion refoulée pour Stéphane Guivarc'h…

Bon, les gars, vous avez des supporters. Donc, il va falloir assurer. Sinon, faites attention : les blogueurs sont tous des sélectionneurs et pourraient bien avoir envie de refaire l'équipe…

Edit : Damned, j'avais oublié le Chafouin. Oh, vraiment désolé...

jeudi 11 juin 2009

Monsieur Poireau se plante en Belgique.

Je ne m'étais même pas rendu compte que Monsieur Poireau vient de créer un nouveau blog sur ses aventures en Belgique. Vous trouverez ce "Poireau migratoire" ici.

J'espère qu'il pourra nous informer, avant tout le monde, de la future sécession de la Flandre.

mercredi 10 juin 2009

Le voile à l’école : récit de cette époque (partie 1).

Le président Obama a relancé la polémique autour du voile islamique. J'avais déjà testé ce sujet-là, sans vraiment le vouloir, avec ce billet, qui ne parlait pourtant pas de cela, et les commentaires qui s'en étaient suivis, avec de nombreux billets derrière qui avaient causé une belle pagaille chez les libéraux. Ce qui est discuté aujourd'hui est la loi de 2004 sur la laïcité et l'interdiction des signes religieux ostentatoires dans les établissements scolaires.

Lorsque j'ai débuté dans l'enseignement, j'ai eu l'occasion de parcourir des établissements où se trouvaient des jeunes filles voilées. En effet, au début des années 1990, lorsque les premières affaires de voiles avaient eu lieu, le ministre de l'époque, Lionel Jospin, s'était bien gardé de faire quoi que ce soit, laissant les établissements se débrouiller. Ceux-ci réagirent souvent en interdisant les symboles religieux, du fait du sentiment laïc fort chez les enseignants. Or, le conseil d'État cassa tous les règlements intérieurs interdisant les voiles, et ce dès 1989. Globalement, les établissements se soumirent à cette jurisprudence, mais il y eu régulièrement des affaires de voiles islamiques.

Personnellement, j'ai pu suivre, à l'époque, les débats qui se produisaient dans ces bahuts. Les arguments étaient de plusieurs ordres :

  • Les enseignants qui soutenaient les jeunes filles se basaient sur le principe de liberté de religion sous-tendue par les articles 10 et 11 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Pour eux, l'école ne pouvait se permettre d'appliquer aussi strictement aux élèves ce qu'elle appliquait aux fonctionnaires, soumis à la laïcité la plus absolue. Il y avait plusieurs types d'arguments :
    • Certains, très libéraux, considéraient que l'interdiction du voile était une entorse à la liberté de chacun, et qu'elle faisait, en plus, le jeu des militants qui pourraient ainsi se considérer comme victimes.
    • D'autres pensaient que l'on pouvait convaincre ces jeunes, par la raison, de se dévoiler, en cassant la religion par le savoir et la raison.
    • Enfin, certains s'inquiétaient de l'avenir de ces jeunes filles qui risquaient de se retrouver dans une école coranique ou renvoyées dans le pays d'origine, alors qu'au moins, on les avait, même avec des voiles, dans l'école républicaine.
  • Les opposants se répartissaient en trois camps :
    • Souvent, des enseignantes femmes parlaient de la condition des femmes et du fait que l'école devait participer, de manière militante, à l'émancipation de ces jeunes filles, soumises à une autorité familiale terrible. J'admets, même si cela va énerver les féministes, que les hommes se souciaient moins de ces arguments-là, et que le machisme ressortait vite dans les AG.
    • D'autres, femmes et hommes, s'appuyaient plutôt sur les perturbations que provoquaient ces jeunes filles dans l'établissement du fait de l'affichage de leur foi, et de la remise en cause permanente que produisait la religion au savoir rationnel dispensé par l'école.
    • Enfin, il y avait les laïcards les plus militants, qui voulaient combattre les religions où qu'elles soient. Ceux-là étaient finalement assez peu nombreux.

Ces perturbations étaient-elles réelles ? Personnellement, je n'ai jamais eu la malchance d'avoir dans mes cours une jeune femme voilée. Je sais cependant que ces jeunes filles essayaient d'échapper aux cours de sport, se mettaient en retrait dans les cours de SVT et de physique-chimie, du fait de la présence du bec bunsen, celui-ci risquant d'enflammer les foulards. De plus, dans un établissement où j'ai travaillé, une élève a essayé d'accuser un professeur de l'avoir mal noté parce qu'elle était voilée, jouant sur l'idée de discrimination. Les accusations ont existé dans l'autre sens aussi, insinuant que les filles voilées faisaient exprès de se voiler pour travailler moins. Certains profs un peu xénophobes en rajoutant… Sur ce point, la paix civile n'était pas vraiment assurée…

D'ailleurs, les vrais problèmes surgissaient plutôt entre enseignants militants et élèves voilées. Personnellement (heureusement, je n'ai jamais eu directement le cas), j'avais considéré que je refuserais une fille voilée se présentant à ma porte, en sachant que je me mettais en opposition avec les arrêts du Conseil d'État. Certains collègues le faisaient, provoquant la venue des parents et des discussions très longues avec l'établissement. Parfois, la famille transigeait et finissait par accepter le compromis, avec des discours d'ailleurs variés : certains parents étaient compréhensifs et d'autres très militants. Dans certains cas, les jeunes filles elles-mêmes s'opposaient frontalement à leurs propres parents leur demandant d'ôter le foulard. D'autres familles le refusaient et menaçaient de saisir le tribunal administratif, sachant qu'ils gagneraient sans doute vue la jurisprudence. Dans ce cas, les proviseurs obligeaient les collègues à céder, ne voulant pas donner une nouvelle belle victoire aux islamistes profitant de ces affaires.

Régulièrement, des AG se tenaient dans les établissements suite à ce type de pressions. Je n'ai jamais connu de grèves déclenchées suite à cela, mais je sais qu'il y en eu, comme à au lycée de Tremblay-en-France en 2002. En tout cas, cela pourrissait les salles des profs de manière terrible, montrant les clivages qui pouvaient exister entre nous, et les débats tournaient aux conflits politiques, ou aux conflits féministes-autres, sans que l'on n'aboutisse à rien.

En fait, on trouva une solution, toute bête en elle-même : on interdit dans les règlements intérieurs tous les couvre-chefs. Cela existait avant, mais simplement implicitement du fait de la courtoisie. Or, en l'inscrivant ainsi, on visait clairement les voiles mais on évitait le risque de l'arrêt du Conseil d'État, d'autant plus que les gamines doivent signer le règlement dès le début de l'année. En clair, on essayait, avec grande difficulté, de s'assurer la paix dans nos établissements et dans nos classes.

Et puis, vint la loi en 2004, mais je vous raconterai cela dans un prochain épisode…

mardi 9 juin 2009

Le véritable enseignement de ce scrutin européen : l'abstention !

On peut voir dans l'ensemble de la blogosphère se développer toute une série d'analyses concernant les résultats du scrutin de dimanche dernier. Globalement, on peut résumer les choses de la manière suivante :
  • la blogosphère de gauche constate qu'à cause de l'abstention, l'UMP réalise un score assez faible par rapport à l'ensemble de l'électorat, et essaie un peu de se rassurer après l'échec de la gauche sociale-démocrate lors de ce scrutin et le triomphe des écologistes.
  • La blogosphère de droite se félicite du score de son parti dominant, et rigole bien de l'échec du parti socialiste lors de cette élection.
  • La blogosphère Modem est en train de se fouetter à coup d'orties fraîchement coupées.
  • Les analyses sur l'échelle européenne restent parcellaires, dans la blogosphère comme dans les médias classiques. Globalement, sauf à Malte et en Grèce, on constate une victoire générale de la droite, mais sans vraiment être encore capable de l'analyser réellement.
Je m'étonne pourtant du peu d'intérêt porté à la question de l'abstention. Il y a quand même de vraies choses à dire sur ce sujet.

En effet, on a souvent glosé sur la désaffection des Français pour ce scrutin. En effet, à part lors de la première élection de 1979, la participation aux européennes n'a cessé de diminuer. Souvent, on invoque la complexité des institutions européennes, ou encore l'absence de sentiment européen qu'éprouvent les peuples face à cette grande réalisation historique qu'est l'Union.

Or, cher lecteur, l'histoire nous démontre l'illogisme profond de cette analyse. En effet, à deux reprises, les électeurs se sont réellement passionnés pour l'Europe. Il s'agissait d'abord du vote sur le traité de Maastricht en 1992 et ensuite du vote sur le traité constitutionnel européen en 2005. Là, nous nous sommes motivés, avons avalé des traités pourtant totalement illisibles pour des gens n'ayant pas de master de droit public international, et avons pris des décisions démocratiques. En 1992, nous avons dit oui à la création de l'Union Européenne et de l'euro. En 2005, nous avons rejeté le traité constitutionnel.

Que s'est-il passé depuis ? D'abord, le processus de ratification s'est arrêté après les refus français et néerlandais. Ensuite, on a refait un nouveau traité (dit de Lisbonne) annulant les votes des deux peuples, puis on a commencé les ratifications sans passer par référendum, sauf en Irlande, où le peuple a encore dit non. Pas de problème : on va les faire revoter, et cette fois, pas question de dire non, hein, les gars.

Je pense que nos concitoyens ont parfaitement compris que, à l'échelle européenne, nos dirigeants ne souhaitent nullement développer un système démocratique. Dès que les citoyens font une irruption dans le système, on s'arrange, lorsqu'ils renâclent, pour annuler leurs décisions. De plus, on sait bien que le Parlement européen est encore très limité dans ses moyens d'intervention sur les institutions européennes, globalement contrôlées par les gouvernements.

Donc, il est important de souligner un enseignement fort de ce scrutin. Les Européens ont bien conscience de l'existence de l'Europe, et ils sont massivement d'accord sur un point fort : cette Europe n'est pas démocratique, et voter pour la légitimer a de moins en moins de sens. Ce nouvel avertissement devrait peser sur nos partis et sur nos dirigeants, mais il me semble, à l'aune des réactions diverses, que nous n'en prenions pas le chemin. Si on veut que les électeurs votent, il faut que ce vote ait un sens. L'abstention pourrait donc avoir une vraie signification politique.

Une fois cela acquis, on peut difficilement se piquer d'analyser les résultats hexagonaux, et je ne vais pas m'y risquer. Ils ne donnent pas grand-chose sur ce qui sortirait d'une élection nationale importante, vu la participation ridicule à ce scrutin. A mon sens, ce sont les régionales (l'année prochaine) qui vont vraiment nous donner l'état de l'opinion. Par contre, je crois quand même qu'on peut largement s'inquiéter de l'état de la gauche et de l'avenir du PS en particulier.

Dites, cher-e-s militant-e-s socialistes, il serait temps de secouer un peu le marronnier, non ?


PS : vous trouverez l'ensemble de mes billets sur le scrutin ici :

Elections européennes 2009

lundi 8 juin 2009

Résultats complets des européennes aux Lilas (93).

A la demande de Dagrouik, voici les résultats complets des élections européennes aux Lilas (93), une ville, je le rappelle, tenue par la gauche depuis 2001.

Cela nous donne donc :

Inscrits : 13 094
Votants : 5 623
Exprimés : 5 494
Nuls : 129
Abstention : 41,96%

Europe écologie : 1 488
UMP : 1 220
PS : 910
Front de gauche : 414
Modem : 395
NPA : 238
FN : 224
Libertas : 139
Alliance écologiste indépendante : 134
Debout la République : 99
Cannabis sans frontière : 9
Liste antisioniste : 70
LO : 66
La Terre sinon rien : 32
Europe utile : 27
Newropeans : 10
Solidarité France : 6
Alternative libérale : 5
Citoyenneté culture européenne : 4
Europe espéranto : 2
La force de la non-violence : 2

Les autres listes n'ont pas eu de voix.

La ville reste donc à gauche mais le PS s'écroule. Le Front de Gauche, sur l'ensemble de la commune, fait un bon score. L'abstention correspond globalement à la moyenne nationale.

Cette commune illustre bien l'état de la gauche actuelle : un bien beau bordel…

dimanche 7 juin 2009

Aux Lilas, le PS prend une claque.

Cher lecteur, comme tu peux déjà entendre les estimations sur l'ensemble des grands médias, je vais te communiquer les résultats du bureau de vote n°1 de la commune des Lilas, annoncés il y a quelques minutes par le président du bureau, M. Claude Ermogeni, membre du PCF. J'ai en effet dépouillé (j'adore ça !) pendant que les autres blogueurs picolent à la République des Blogs.

Pour te donner une idée, ce bureau couvre le quartier entourant la mairie des Lilas. C'est un quartier habité par des classes moyennes, beaucoup de familles avec enfants ou de personnes âgées. Il reste cependant des populations pauvres qui parviennent encore à vivre ici, parce qu'elles ont acheté leurs logements avant la hausse.

Voici donc de vrais résultats :

Inscrits : 1 030
Votants : 457
Exprimés : 451
Nuls : 6
Soit une participation de 44,37%.

Europe écologie : 136
UMP : 85
PS : 74
Modem : 33
Front de Gauche : 24
NPA : 23
FN : 21
Alliance écologiste indépendante : 14
Libertas (De Villiers) : 12
Debout la République : 8
LO : 5
Liste antisioniste : 5
Le Bonheur intérieur : 4
Cannabis sans frontière : 3
Pour une Europe utile : 2
Alternative libérale : 1
Citoyenneté culture européenne : 1

Les autres listes n'ont pas eu de voix.

Ce soir, les militants PS tiraient une sacrée tête. Beaucoup de récriminations contre la stratégie du parti, et du scepticisme sur l'avenir. Sachez que, lors des dernières municipales, l'union de la gauche avait remporté la victoire dès le 1er tour avec un peu moins de 60% des voix. La gauche reste majoritaire mais le PS est deuxième.

Drôle de soirée électorale…

samedi 6 juin 2009

Parlons d’Europe : proposition ambitieuse (et arrogante) d’un système institutionnel européen.

Ces derniers temps, je m'étais lancé dans quelques billets sur la construction européenne. Les questions éducatives m'ayant rattrapé entretemps, j'ai un peu abandonné le sujet, mais je souhaitais y revenir ici, comme je m'y étais engagé, en abordant la question des institutions européennes.

Depuis 1957, les gouvernements européens ont construit un système institutionnel complexe répondant à la fois aux fondamentaux de la démocratie mais aussi à un besoin d'invention permanente, du fait de l'originalité du système européen. Ainsi, on retrouve une Commission représentant vaguement un système exécutif, un parlement institué en 1979 et un conseil européen ayant, d'une façon lointaine, un pouvoir législatif, et une cour de justice ayant un pouvoir judiciaire. Par contre, la CEE puis l'UE se sont développées avec la problématique de l'influence des gouvernements nationaux : les présidents ou premier ministres continuent à nommer les commissaires, même si le Parlement a un pouvoir de contrôle, le conseil des chefs d'État à fixer les grandes orientations, et les conseils des ministres à avoir un grand pouvoir sur les directives et règlements divers que produit l'UE chaque année.

Les pouvoirs nationaux conservent donc une grande influence sur l'ensemble du processus de décision européen. Cette situation est à la fois issue de la volonté des gouvernements de maintenir leur indépendance et de refuser la naissance d'un État fédéral, mais aussi de l'idée que les peuples ne sont pas prêts au fédéralisme, idée pourtant très présente dans les années 1950. Cette situation complexe a aussi un côté pratique : on peut facilement se défausser sur l'Europe des problèmes nationaux vu que les citoyens connaissent très mal le système institutionnel européen.

Pour permettre aux citoyens de s'investir, l'Europe a besoin, à mon sens, de trois choses. Il faut d'abord que les dirigeants européens soient désignés, d'une manière ou d'une autre, par l'élection. C'est déjà le cas aujourd'hui, mais de manière indirecte, puisque ce sont les gouvernements et les parlementaires qui agissent. Or, les citoyens sont très mal informés de ces décisions. Il faut ensuite clarifier grandement le système institutionnel : pour de nombreux Européens, l'Europe semble très compliquée, et c'est bien normal, parce qu'elle l'est ! Le texte constitutionnel devrait donc être court, lisible et clair, comme le sont, en général, les constitutions des États. Enfin, il faut qu'apparaissent des structures partisanes paneuropéennes avec des programmes et des leaders bien identifiés par les électeurs. Aujourd'hui, les situations sont floues : ainsi peut-on voir le PS annoncer qu'il faut une Europe dirigée par une majorité de gauche pour changer les choses, alors que le PSE participe à la majorité parlementaire depuis longtemps, ou François Bayrou se présenter comme un gauchiste alors qu'il fait partie des libéraux au Parlement européen.

Pour aboutir à cela, j'organiserai les choses de la manière suivante… Bon, je sais, je vais me lancer dans la réflexion sur une architecture institutionnelle, mais comme je suis un blogueur politique avec un très gros égo, c'est normal. Donc, je m'y prendrai de la manière suivante :

  • Tout d'abord, les processus électoraux devraient avoir lieu, comme pour le référendum, le même jour et selon un système identique dans toute l'UE.
  • Les électeurs devraient élire une Assemblée des peuples, avec un nombre de députés par pays proportionnel au nombre d'habitants. Cela donnerait certes une influence plus grande aux pays les plus peuplés.
  • Pour contrebalancer cela, on pourrait créer une chambre des États, composée de représentants désignés par les gouvernements élus nationalement et ayant mandat impératif de vote, sur consigne des gouvernements. Les représentants de chaque pays changeraient à chaque changement de gouvernement national. Il y aurait le même nombre de représentants par pays et, pour être adopté, un règlement ou une directive devrait obtenir la majorité dans les deux chambres. Cela rééquilibrerait les choses pour les petits Etats, qui contrebalanceraient les majorités de l'Assemblée. Ainsi se débarrasserait-on du Conseil de l'Europe.
  • La Commission serait nommée par l'Assemblée des peuples, mais avec un vote de confiance obligatoire de la chambre des États. Elle serait responsable devant les deux chambres et pourrait subir une motion de censure de chacune d'entre elles.
  • Enfin, il me semble indispensable de créer un président de l'Union nous représentant à l'extérieur. Il pourrait être élu directement par les électeurs, lors d'élections paneuropéennes, ou par les deux assemblées régulièrement. Les traités signés par lui seraient ratifiés par les deux chambres.

Certes, c'est très utopiste, mais je pense que c'est le seul système préservant les États malgré la constitution d'un système fédéral peut réellement fonctionner, vu les craintes des Européens. Il pourrait être adapté en fonction des domaines de compétences transmis. Si on transmet complètement, les deux chambres décident seules (et les gouvernements gardent un pouvoir) et les parlements nationaux transcrivent ensuite en droit national, ce qui doit absolument être maintenu pour éviter des textes législatifs européens délirants. Si on ne transmet que partiellement, les parlements nationaux doivent ensuite valider les textes (procédure à imaginer). Enfin, si on ne transmet pas, les parlements nationaux garderaient seuls la main.

Il faudrait enfin prévoir une procédure de recours si l'UE se laissait aller à légiférer sur des domaines auxquels elle n'a pas accès normalement. On pourrait imaginer que n'importe quel parlement et/ou gouvernement pourrait déposer un recours devant la cour de justice pour exiger la suppression d'une directive empiétant sur des domaines non-transmis.

Bien, voilà une belle utopie, que je te fais ici partager. N'hésite pas à te faire part en commentaires de toutes les critiques que tu veux y apporter.

PS : en attendant, Marc Vasseur a fait une synthèse des sondages pour les élections de demain (je ne sais toujours pas pour qui voter). On y retrouve globalement de grandes tendances assez nettes. Rendez-vous demain pour parler cette fois-ci des résultats…