mercredi 18 juin 2014

La pénurie de moyens remet en cause le redoublement en 2nde.

On entend toujours, dans les milieux conservateurs et réactionnaires, une petite musique visant à dissocier la question des moyens dans l'éducation et la question du niveau des élèves.

La situation des lycées du 93, en ce moment, démontre que les deux notions peuvent être intimement liées.

Depuis 2002, l'Etat a régulièrement diminué les postes dans notre ministère. L'arrivée des socialistes a interrompu ce processus, mais la situation ne s'améliore pas pour autant. En effet, le département est en forte hausse démographique (environ 1 600 élève de plus par an dans le second degré). Les quelques moyens attribués ne permettent pas de faire face et le nombre d'élèves par classe augmente régulièrement.

Pour y pallier, l'administration tente de faire augmenter chaque année le nombre d'heures supplémentaires des enseignants. En 2007, cela marchait bien parce que la situation du pouvoir d'achat était telle que les collègues acceptaient de gagner un peu plus en travaillant plus. Cependant, le nombre augmentant, il devient de plus en plus difficile de les caser.

Pour faire augmenter artificiellement le nombre d'HS, l'administration ferme et/ou n'ouvre pas les classes nécessaires en janvier, laisse les mutations se faire puis ouvre les classes en juin. Les collègues ayant déjà bougé, on ne peut plus ouvrir de postes et tout se fait donc en HS.

Or, en ce mois de juin, le Rectorat vient d'être pris à son propre jeu. Il a découvert la semaine dernière qu'il y avait beaucoup trop d'élèves en 2nde. En effet, il a donné ordre aux principaux de collège de faire passer un maximum d'élèves  de 3ème vers la 2nde (pour éviter les réouvertures) mais n'a pas anticipé les redoublements de 2nde.

Résultat : plus d'une vingtaine de 2nde à rouvrir en catastrophe, soit beaucoup trop d'HS à absorber.

Quelle conséquence ? En ce moment, les proviseurs font passer en masse des élèves qui devaient normalement redoubler, et les commissions d'appel de demain feront de même.

Les opposants au redoublement seront sans doute très satisfaits de cela. Cependant, par manque de moyens, le système en vient à se contredire et à envoyer à l'abattoir des élèves en difficulté.

Chatel l'avait dit en 2007 : le redoublement coûte 7 milliards par an à la nation. Il semble qu'il ne soit pas nécessaire de le supprimer officiellement. La pénurie s'en charge toute seule...

Camarades réacs, attention, vos propres dogmes jouent contre vous.

vendredi 13 juin 2014

Grève à la SNCF : les idées conservatrices dominent le débat.

Depuis mercredi, deux syndicats de la SNCF (la CGT et SUD) ont déclenché une grève. Cette grève et même si elle serait minoritaire, elle perturbe bien le trafic.

Très personnellement, comme je dois pas mal me déplacer pour aller à mon travail mais aussi dans mes activités de militant, cette grève me pose beaucoup de problème. J'ai dû rajouter de une à deux heures de transport chaque jour. Heureusement que la RATP ne participe pas au mouvement, car je serais sinon cloué chez moi, voire condamné à des heures dans les bouchons et à avoir des problèmes avec mon employeur.

Mais...

Depuis trois jours, les médias cassent cette grève, rejouent la chanson de la grève qui prend la France en otage et ne donnent évidemment aucun élément d'information qui permettrait de comprendre ce qui se passe ; les politiques font de même, puisque même le président s'est permis d'émettre un commentaire là-dessus alors que c'est son projet de loi qui est à l'origine du conflit ; la blogosphère n'est pas en reste. Dans cette dernière, si on ne s'étonne guère que la droite (malgré des exceptions) répète encore et toujours sa rengaine anti-grève, il est nettement plus curieux de voir des blogueurs de gauche chanter le même refrain, ou tout simplement garder le silence.

Qu'en conclure ?

Tout d'abord, la très grande majorité des acteurs médiatiques ne connaissent rien à la SNCF mais se permettent de condamner les cheminots. Rassure-toi, cher lecteur, dans l'Education, on vit cela tout le temps : on n'arrête pas de juger notre métier sans jamais avoir une quelconque idée de ce en quoi il consiste. C'est donc la notion même de grève qui est attaquée, pas simplement cette grève-là.

Le fait qu'une partie de la gauche s'attaque aux syndicats (qui sont composés de ses électeurs) alors qu'elle semble complètement accepter les lobbies de l'autre camp (qui certes, eux, ne me font pas perdre de temps de transport mais m'infligent l'austérité depuis 2008 et la baisse régulière de mon pouvoir d'achat et de ma qualité de vie au profit de je ne sais qui) démontre bien que c'est la droite qui domine les idées politiques de ce pays en ce moment. La grève, c'est mal, et même à gauche, cette idée progresse.

Notre gouvernement est malheureusement à la remorque de l'opposition là-dessus, comme il l'a été dans les derniers scrutins électoraux.

lundi 9 juin 2014

Leçons pour la gauche des municipales dans le 93.

Parmi les défaites multiples des partis de gauche lors des dernières municipales, le cas de Bobigny a été, dans notre département, particulièrement marquant. Gérée depuis 1920 par le PCF, alliée ici avec un PS quasiment inexistant sur le terrain, la ville est passée à l'UDI, après une campagne extrêmement violente sur le terrain.

Je vais passer tous les épisodes de cette campagne, car ce sont les causes de la défaite qui me semblent particulièrement intéressantes pour le FdG mais aussi pour la gauche dans son ensemble.

Depuis quelques années, la ville avait développé une politique d'accueil à l'égard des Roms et de lutte pour améliorer leurs conditions de vie. Plusieurs campements s'étaient installées sur la commune et la mairie tentait de les consolider. Cette politique marquait la volonté du PCF d'aider tous les pauvres, y compris les plus pauvres et ceux qui sont le plus en difficulté.

La droite a attaqué à fond sur ce point, en développant le slogan "Rendez-nous Bobigny", en allant chercher les électeurs issus des autres groupes d'immigrés et en jouant les immigrés les uns contre les autres. Cette stratégie a apparemment fonctionné.

On peut d'ores et déjà en tirer trois leçons :

  • le PCF n'a apparemment pas eu suffisamment de remontées de terrain l'avertissant des craintes des habitants de la ville à l'égard des campements de Roms. C'est inquiétant concernant le réseau de militant-e-s du FdG qui aurait dû, normalement, avertir les élu-e-s du risque que courait la majorité ;
  • le PCF n'est pas parvenu à tranquilliser le reste de la population, soulignant d'ailleurs la difficulté de gérer la question des campements de Roms pour un maire qui voudrait faire autre chose que de les envoyer quinze kilomètres plus loin ;
  • le FdG ne parvient pas à convaincre les populations issues de l'immigration de Bobigny, alors qu'il est le parti qui les défend le plus, qu'il est plus intéressant de voter pour lui que pour la droite.
Un autre point a été fortement utilisé durant cette campagne et a peu été rapporté par les médias. Le futur maire de droite a diffusé une proposition de campagne qui a été mise en oeuvre à Drancy par Jean-Christophe Lagarde : la gratuité de la cantine à l'école.

Cette mesure a rendu Lagarde très populaire à Drancy. Bien évidemment, le prix de l'ensemble de la cantine est passé sur l'impôt, mais les familles ont adhéré à ce système malgré cela. A Bobigny, ville pauvre, cette idée a porté. De même, le nouveau maire a promis un ambitieux programme de rénovation des écoles.

Cette existence de la problématique scolaire illustre là aussi une faiblesse du PCF qui a laissé l'école de côté, alors que ce domaine représente un marqueur traditionnel fort de la gauche.

Cependant, tous ces facteurs ne suffisent pas à tout expliquer. Globalement, les campagnes de l'opposition municipale ne marchent que quand la mairie ne répond pas aux besoins basiques des habitants d'une commune (école, propreté, voirie, sécurité, place en crèches...). Si la droite est parvenue à l'emporter, c'est que la majorité était déjà affaiblie sur ces points cruciaux.

D'ailleurs, dans plusieurs villes de gauche tombées aux dernières élections, il est intéressant de constater que ces maires sortants étaient souvent persuadées que le 93 ne voterait jamais à droite et qu'ils n'avaient quasiment pas besoin de faire campagne, sauf en cas de division à gauche, même en cas d'insatisfaction des électeurs. Ainsi, le même phénomène s'est produit à Livry-Gargan, vieille commune socialiste.

En clair, pour garder une ville, le premier point est déjà d'en administrer convenablement les services de base. Une bonne leçon que toute la gauche devrait retenir, au-delà de l'impact du contexte national. Le PCF le prouve d'ailleurs, en gagnant des villes largement comme Tremblay, Stains ou Villetaneuse.

Un retour en attendant la catastrophe...

Il y a un peu plus d'un an, je publiais mon dernier billet de blog.

J'étais fatigué du blogage, exercice devenu particulièrement pénible depuis l'arrivée au pouvoir de François Hollande. En effet, les premières décisions politiques du PR n'ont fait que nous diviser, entre socialistes béats (de moins en moins cependant), écologistes perdus et Frontdegauchistes revendicatifs mais hors des processus de décision. A cela s'était ajouté une dégradation des relations avec les blogueurs de droite, qui, comme à chaque fois à droite, supportaient très mal d'avoir perdu le pouvoir et devenaient donc très agressifs. La stratégie de la droite de ranger le FdG avec le FN pour le diaboliser m'a de plus beaucoup touché : me faire classer avec les fascistes, et ce simplement pour éviter le débat, c'était insupportable. Le fait que de nombreux blogueurs socialistes se fassent les spécialistes de ces amalgames, histoire de masquer leur désarroi et de trouver des responsables ailleurs que chez eux à l'impopularité de leur gouvernement, n'a rien arrangé. Beaucoup de gens sympathiques ont malheureusement révélé un manque réel de culture politique et une incapacité assez dommageable à accepter le débat.

Depuis, les choses n'ont pas cessé de se dégrader. Si je ne blogue plus, je continue de militer dans le monde syndical, et il est bien clair que l'ambiance est lourde. Les camarades ont le sentiment d'avoir été trahis, mais en même temps, tout ce petit monde rechigne à engager la lutte avec le pouvoir pour éviter d'en faire profiter la droite. Le résultat est un sentiment d'impuissance et de désespoir terrible.

Pour finir, le FN a fortement progressé aux deux dernières élections, alors que nous espérions tous que ce contexte profite aux autres partis de gauche. Cela n'a pas fonctionné, pour plein de raisons sur lesquelles nous aurons l'occasion de revenir.

Et maintenant ? L'avenir est sombre. La décision de Hollande de maintenir la ligne, le raidissement continu de la droite, la posture donneuse de leçon et suiviste des médias et le désarroi du mouvement social ne peuvent qu'amener à la catastrophe. Pour la première fois, on peut envisager l'arrivée au pouvoir d'un FN allié avec des mouvements de droite qui auraient décidé de trahir la République pour accéder aux responsabilités. Tout va se jouer, je le pense, dans les prochaines semaines à l'UMP, et il faudra regarder cela avec intérêt.

Pour nous, à gauche, reste la perspective de retourner dans l'opposition pour les 20 prochaines années. On en est là, je le crains. C'est d'autant plus désespérant qu'ailleurs en Europe, il se passe plein de choses intéressantes à gauche. Heureusement que le maintien du score du FdG et l'émergence de Nouvelle Donne ont donné quelques signes positifs...

Quant aux moyens de renverser le cours des choses, ce n'est certainement pas en faisant ce qu'ont tenté de faire les organisations de jeunesse ces dernières semaines qu'on avancera. Ces cortèges réduits ne font que démontrer la faiblesse générale du mouvement social. De toute façon, la diabolisation du FN ne sert à rien : ce qui peut le faire baisser, c'est que nos concitoyens aient le sentiment que leurs vies s'améliorent concrètement. Ce n'est pas avec ce que le PS semble vouloir faire durant les trois prochaines années qu'on y parviendra.

Alors que c'est pire, je republie ? Oui, parce qu'à un moment, ce n'est plus possible de rester là à attendre que la catastrophe arrive. Il est bien évident que ce n'est pas sur la blogosphère que les choses se régleront, mais au moins, elle aura l'avantage de nous faire passer le temps, en attendant peut-être que cela bouge ailleurs et qu'on y contribue.