samedi 6 juin 2009

Parlons d’Europe : proposition ambitieuse (et arrogante) d’un système institutionnel européen.

Ces derniers temps, je m'étais lancé dans quelques billets sur la construction européenne. Les questions éducatives m'ayant rattrapé entretemps, j'ai un peu abandonné le sujet, mais je souhaitais y revenir ici, comme je m'y étais engagé, en abordant la question des institutions européennes.

Depuis 1957, les gouvernements européens ont construit un système institutionnel complexe répondant à la fois aux fondamentaux de la démocratie mais aussi à un besoin d'invention permanente, du fait de l'originalité du système européen. Ainsi, on retrouve une Commission représentant vaguement un système exécutif, un parlement institué en 1979 et un conseil européen ayant, d'une façon lointaine, un pouvoir législatif, et une cour de justice ayant un pouvoir judiciaire. Par contre, la CEE puis l'UE se sont développées avec la problématique de l'influence des gouvernements nationaux : les présidents ou premier ministres continuent à nommer les commissaires, même si le Parlement a un pouvoir de contrôle, le conseil des chefs d'État à fixer les grandes orientations, et les conseils des ministres à avoir un grand pouvoir sur les directives et règlements divers que produit l'UE chaque année.

Les pouvoirs nationaux conservent donc une grande influence sur l'ensemble du processus de décision européen. Cette situation est à la fois issue de la volonté des gouvernements de maintenir leur indépendance et de refuser la naissance d'un État fédéral, mais aussi de l'idée que les peuples ne sont pas prêts au fédéralisme, idée pourtant très présente dans les années 1950. Cette situation complexe a aussi un côté pratique : on peut facilement se défausser sur l'Europe des problèmes nationaux vu que les citoyens connaissent très mal le système institutionnel européen.

Pour permettre aux citoyens de s'investir, l'Europe a besoin, à mon sens, de trois choses. Il faut d'abord que les dirigeants européens soient désignés, d'une manière ou d'une autre, par l'élection. C'est déjà le cas aujourd'hui, mais de manière indirecte, puisque ce sont les gouvernements et les parlementaires qui agissent. Or, les citoyens sont très mal informés de ces décisions. Il faut ensuite clarifier grandement le système institutionnel : pour de nombreux Européens, l'Europe semble très compliquée, et c'est bien normal, parce qu'elle l'est ! Le texte constitutionnel devrait donc être court, lisible et clair, comme le sont, en général, les constitutions des États. Enfin, il faut qu'apparaissent des structures partisanes paneuropéennes avec des programmes et des leaders bien identifiés par les électeurs. Aujourd'hui, les situations sont floues : ainsi peut-on voir le PS annoncer qu'il faut une Europe dirigée par une majorité de gauche pour changer les choses, alors que le PSE participe à la majorité parlementaire depuis longtemps, ou François Bayrou se présenter comme un gauchiste alors qu'il fait partie des libéraux au Parlement européen.

Pour aboutir à cela, j'organiserai les choses de la manière suivante… Bon, je sais, je vais me lancer dans la réflexion sur une architecture institutionnelle, mais comme je suis un blogueur politique avec un très gros égo, c'est normal. Donc, je m'y prendrai de la manière suivante :

  • Tout d'abord, les processus électoraux devraient avoir lieu, comme pour le référendum, le même jour et selon un système identique dans toute l'UE.
  • Les électeurs devraient élire une Assemblée des peuples, avec un nombre de députés par pays proportionnel au nombre d'habitants. Cela donnerait certes une influence plus grande aux pays les plus peuplés.
  • Pour contrebalancer cela, on pourrait créer une chambre des États, composée de représentants désignés par les gouvernements élus nationalement et ayant mandat impératif de vote, sur consigne des gouvernements. Les représentants de chaque pays changeraient à chaque changement de gouvernement national. Il y aurait le même nombre de représentants par pays et, pour être adopté, un règlement ou une directive devrait obtenir la majorité dans les deux chambres. Cela rééquilibrerait les choses pour les petits Etats, qui contrebalanceraient les majorités de l'Assemblée. Ainsi se débarrasserait-on du Conseil de l'Europe.
  • La Commission serait nommée par l'Assemblée des peuples, mais avec un vote de confiance obligatoire de la chambre des États. Elle serait responsable devant les deux chambres et pourrait subir une motion de censure de chacune d'entre elles.
  • Enfin, il me semble indispensable de créer un président de l'Union nous représentant à l'extérieur. Il pourrait être élu directement par les électeurs, lors d'élections paneuropéennes, ou par les deux assemblées régulièrement. Les traités signés par lui seraient ratifiés par les deux chambres.

Certes, c'est très utopiste, mais je pense que c'est le seul système préservant les États malgré la constitution d'un système fédéral peut réellement fonctionner, vu les craintes des Européens. Il pourrait être adapté en fonction des domaines de compétences transmis. Si on transmet complètement, les deux chambres décident seules (et les gouvernements gardent un pouvoir) et les parlements nationaux transcrivent ensuite en droit national, ce qui doit absolument être maintenu pour éviter des textes législatifs européens délirants. Si on ne transmet que partiellement, les parlements nationaux doivent ensuite valider les textes (procédure à imaginer). Enfin, si on ne transmet pas, les parlements nationaux garderaient seuls la main.

Il faudrait enfin prévoir une procédure de recours si l'UE se laissait aller à légiférer sur des domaines auxquels elle n'a pas accès normalement. On pourrait imaginer que n'importe quel parlement et/ou gouvernement pourrait déposer un recours devant la cour de justice pour exiger la suppression d'une directive empiétant sur des domaines non-transmis.

Bien, voilà une belle utopie, que je te fais ici partager. N'hésite pas à te faire part en commentaires de toutes les critiques que tu veux y apporter.

PS : en attendant, Marc Vasseur a fait une synthèse des sondages pour les élections de demain (je ne sais toujours pas pour qui voter). On y retrouve globalement de grandes tendances assez nettes. Rendez-vous demain pour parler cette fois-ci des résultats…

9 commentaires:

  1. Je le lirai tranquillement plus tard, mais tu fais vraiment des bons billets en ce moment... Peut être ça donne pas pleins de points Wikio, mais c'est bien.

    Je crois que le mieux, c'est parler d'Europe hors élections européennes en fait ;)

    Bon weekend

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  2. @ Faucon : merci pour le compliment. J'attends tes commentaires avec impatience.

    On s'en fout du Wikio...

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  3. Allez zou jour de vote! donc on vote! Et on vote bien hein!

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  4. Nicolas m'apprend que c'est aussi ton anniversaire aujourd'hui alors : bon anniversaire !!!!
    :-)))

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  5. En allant par hasard chez ce monsieur Nicolas J ... j'ai découvert "cachotier" que c'était ton anniversaire ...

    Bon anniversaire à toi.

    Bésitos

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  6. Nicolas m'a dit de vous souhaiter bon anniversaire aimablement...

    Je m'exécute...

    Bon anniversaire...

    Aimablement...

    Je sors...

    ;-)

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  7. @ Ferocias : on vote aujourd'hui ?

    @ Poireau, Eric et Mlle Cigüe : merci beaucoup.

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  8. Bon anniversaire!
    (et j'espère qu tu as été voter ;) )

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  9. @ Ferocias : merci ! Oui, j'ai voté, vers 12h45, avant d'aller picoler chez ma mère pour sa fête et mon anniversaire.

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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