mardi 7 juillet 2009

En France, tu peux tout faire, sauf contester, surtout quand tu es jeune : le cas de Tristan, élève de Maurice Ravel.

Ah, enfin, l'Éducation Nationale se décide à agir contre les personnes qui pourrissent la vie de nos établissements scolaires.

Depuis que je suis enseignant, je ne peux que constater les difficultés que nous avons à sanctionner les élèves qui dévissent, d'une manière ou d'une autre. Ce problème est d'abord marqué à gauche par un misérabilisme social qui explique les bêtises de certains gamins et justifie qu'on ne les sanctionne pas trop, renonçant à des objectifs ambitieux et intégrant de fait les inégalités sociales comme insurmontables. A côté, l'administration gêne nettement les processus de sanction. Un conseil de discipline est de plus en plus lourd à organiser. De plus, les chefs d'établissement doivent, sur instructions des recteurs, tenter de limiter les sanctions pour éviter que les statistiques des violences en milieu scolaire ne soient trop défavorables à l'Etat. Enfin, depuis la suppression de la carte scolaire, les chefs des établissements difficiles masquent les problèmes pour éviter la fuite des meilleurs élèves et de ceux ayant les réseaux pour partir.

Ainsi, des gamins posant parfois des problèmes importants peuvent se maintenir dans les établissements, gâcher la vie de classes entières et commettre parfois des actes que l'on peine à sanctionner. Il faut souvent en venir aux menaces de grève ou voir une délégation de la FCPE débarquer dans les bureaux de l'administration pour que quelque chose soit fait.

C'est d'autant plus dommage que l'école vise à apprendre aux élèves qu'une société se bâtit sur des règles, qui ne sont pas seulement des règles d'orthographe. Or, de plus en plus, cédant à l'individualisme forcené, à la pression des parents, des politiques et des élèves eux-mêmes, on rappelle de moins en moins souvent l'importance des lois communes.

Or, enfin, on se décide à agir : on décide de virer de Maurice Ravel, à Paris, un élève qui a osé mener un blocus contre son établissement scolaire.

Pour moi, le message est clair :

« Cher élève,

Si tu es un élève qui refuse de travailler, qui est absentéiste, qui tente d'échapper à l'obligation scolaire mais que tu n'embêtes personne, ne t'inquiète pas. Tu pourras quitter le système éducatif sans diplôme mais sans être inquiété.

Si tu es un élève pénible, qui empêche régulièrement les profs de faire cours, qui perturbe ses camarades, en particulier les plus faibles, tu auras peut-être un jour ou deux d'exclusion et une réprimande pour la route.

Si tu commets des actes relevant de la petite délinquance, avec un mouvement de grève des profs et une pétition des parents, on envisagera un conseil de discipline.

Par contre, si jamais tu oses te permettre de contester la politique menée par notre merveilleux gouvernement, mon petit gars, tu vas avoir des emmerdes !!! »

Je crois, cher lecteur, que le message adressé à la jeunesse comme aux citoyens est clair : faites tout ce que vous voulez, mais surtout, soyez docile lorsqu'on parle de politique.

12 commentaires:

  1. Oui. Ca manque un peu de justice, tout cela...

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  2. @ Nicolas : la règle n'existe pas non plus pour le politique, du moment que tu suis ce que dit le président...

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  3. Franchement, Mathieu, vous ne pouvez pas tout de même ne pas reconnaître, que ces jeunes n'ont pas été prévenus! L'affaire de TF1 était pourtant bien couverte par les médias, le message était très clair.

    Mais que voulez vous, ces jeunes de nos jours, ils n'écoutent rien, ne s'intéressent pas aux actualités de la société, bref, ils sont mal orientés! Mais que fait l'Education nationale?!

    On comprend pourquoi l'orientation est mise sur les devants de la scène. Il faut mieux les orienter pendant les études! Il faut pour cela prendre en compte le véritable profil de l'élève: ses aptitudes scolaires, certes, mais aussi sa personnalité, ses ambitions, ses penchants politiques.... (oups il ne fallait pas le dire, non? )

    Sérieusement parlant, je suis bien sûr d'accord avec vous: c'est injuste!

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  4. @ Anya : à un moment, j'y ai presque cru...

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  5. Ah, j'allais t'envoyer un mail pour te dire : "Mathieu t'a entendu parler de ce lycéen qui risque de ne pas être pris en terminale parce qu'il a une conscience politique ?" Je vois que tu es très réactif aussi.
    C'est tellement rare d'avoir des élèves qui réfléchissent et s'investissent dans la vie publique, si en plus ils sont pénalisés pour ça, l'avenir de l'enseignement français va devenir très sombre... Il faudrait montrer je pense que tous les profs sont loin d'être d'accord avec ce proviseur ; créer une pétition nationale ou multiplier les gestes envers ce lycéen (il n'y a pas une place à lui proposer dans ton lycée ?)Parce que c'est quasi certain, je crois-j'espère-qu'il va être admis dans sa terminale mais cette affaire est tellement grave qu'elle mériterait quand même que nous, les profs, on la dénonce haut et fort.

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  6. Il me semble Mathieu que tu amalgames un peu trop facilement conscience politique et actions illégales que l’on justifie par des pseudos convictions politiques !
    Le blocage d’un Lycée par des lycéens est non seulement une vaste connerie mais également tout à fait illégal …il ne me semble pas scandaleux que ce proviseur pose ses conditions avant de réintégrer un élève qui a été actif dans ….l’illégalité !
    Fort heureusement, on peut « réfléchir » et « s’investir dans la vie publique » tout en respectant les règles ! …ou à contrario, on peut être très actif politiquement, tel que tu l’entends (blocage de lycée) sans nécessairement bien réfléchir !
    Il me semble que c’est le genre de message que les prof devraient essayer de faire passer plutôt que de mettre sur un piédestal les comportement excessifs !
    Cela dit je suis tout à fait d’accord avec toi sur la première partie de ton billet, ça se gâte à partir de « … Pour moi, le message est clair : » :)

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  7. Je trouve que Nicolas007bis a raison et finalement j'appelle tous les lycéens et étudiants à dire (chut ! pas à crier)d'une voix douce et conciliante leur mécontentement la prochaine fois que leur ministre voudra encore davantage réduire l'égalité des chances du système scolaire en augmentant les effectifs par classe, en confondant facs et entreprises, etc. S'il vous plait, quand vous aurez l'impression qu'on se fout de vous et qu'on bousille votre avenir, restez en cours, écrivez un petit mot nous le remettrons aux personnes concernées. Pas d'agitation surtout, pas de vague ! N'oubliez pas qu'en France on ne sait même plus quand vos aînées font des grèves, alors tout doux petits étudiants !
    Sincèrement, moi ce qui m'horripile c'est la léthargie de nos élèves ; alors quand j'en entends un qui a un discours argumenté, qui est capable de convaincre, de participer à des réunions, qui sait mobiliser les autres et organiser des actions, enfin je respire !

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  8. @ Nathalie : je suis d'accord avec toi.

    @ Nicolas007bis : il existe dans l'éducation un système très complet permettant de sanctionner des gamins faisant des actes illégaux. On peut exclure temporairement un élève ou convoquer un conseil de discipline. Un proviseur peut aussi déposer plainte.

    Je ne vois pas pourquoi Tristan n'a pas subi tout cela et serait maintenant viré sans aucune forme de procès. Je m'étonne vraiment que tu soutiennes cela.

    Je ne soutiens pas les comportements violents, je dis juste qu'on ne sanctionne que peu les véritables comportements violents que connaît tous les jours l'Éducation. Par contre, on sanctionne le politique, et de manière illégale.

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  9. @Mathieu
    Tristan serait passé en conseil de discipline comme cela aurait du être le cas, tu te serais élevé (ainsi que Nathalie) tout aussi véhémentement contre cette sanction "politique" imposée par un proviseur à la solde du pouvoir !
    Le proviseur aurait effectivement du le faire l'année dernière mais probablement pour ne pas jeter de l'huile sur le feu, il ne l'a pas fait, ce en quoi il a probablement eu raison.
    Cela ne me choque donc pas, non pas qu'il soit "viré sans aucune forme de procès", mais qu'on lui demande l’assurance qu’il ne réitérera pas ces actes illégaux !

    @Nathalie
    Drôle de distinction entre ces larves d’élèves qui...étudient et les beaux et brillants baratineurs, actifs et engagés politiquement qui ….manifestent et bloquent les lycées pour protester contre la politique de nos gouvernants qui, comme tous les gouvernants qui se sont succédés depuis des décennies, ne cherchent qu’à « bousiller leur avenir » !
    Cette manière de présenter les choses est pour le moins réductrice et tendancieuse, j’ose espérer que vos élèves n’ont pas droit à ce genre de message !

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  10. @ Nicolas007bis : là encore, tu te trompes sur mon analyse.

    En cas de conseil de discipline, le proviseur n'est qu'une voix parmi d'autres. Lorsqu'on prend la décision, les parents, les élèves, les profs et l'administration sont à égalité. Si ce gamin avait été condamné, cela aurait été sur un accord de l'ensemble de la communauté, au moins des adultes. Il s'agit d'une institution démocratique. L'élève peut s'y présenter avec un avocat. En plus, il faut savoir qu'on peut faire appel devant le tribunal administratif.

    Si le proviseur ne l'a pas fait, c'est qu'il savait qu'il allait perdre, d'autant plus qu'il n'a pas le droit de virer un élève sans l'accord du conseil de discipline. C'est pourtant ce qu'il vient de faire. Le seul cas se produit en effet lors du changement d'année scolaire, mais alors, il faut le justifier sur des questions de niveau. Or, apparemment, Tristan est brillant.

    D'autre part, il est totalement anormal de demander un blanc-seing. Quant on est condamné, on purge sa peine, et ensuite, on est blanchi. La justice n'agit jamais à priori ! Donc, ce proviseur a anticipé quelque chose qui n'est peut-être pas vrai, et ça, c'est scandaleux et illégal. Une belle éducation pour nos jeunes...

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  11. Il est interdit d'avoir un désaccord manifeste avec les autorités. Dans nos cours et nos manuels, cela ne s'appelle pas "la dictature" ?

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  12. @ Grellety : non, parce que nous avons encore le droit de nous exprimer. Régime autoritaire peut-être ?

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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