dimanche 18 octobre 2009

Les Canadiens vont-ils adopter le TGV ?

En ce moment, cher lecteur, la presse canadienne francophone est captivée par un sujet fondamental : l'arrivée potentielle du TGV sur le continent nord-américain.

Le Canada a une relation particulière avec le transport ferroviaire. Au XIXe siècle, la puissance britannique a utilisé ce moyen pour souder une colonie dont les provinces étaient très diversifiées et menacées par la puissance étatsunienne. Le transcanadien a ainsi relié Halifax sur la côte atlantique du Canada (port ayant l'avantage de ne pas être bloqué par les glaces durant six mois comme Québec ou Montréal) et Vancouver sur la côte ouest. Depuis, l'avion et la route ont supplanté le chemin de fer, mais celui-ci subsiste pour le transport de marchandises. En effet, dans un pays où les distances sont monumentales (en avion, il est plus rapide de se rendre à Paris depuis Montréal qu'à Vancouver), le train, même s'il est très rapide, ne peut concurrencer l'avion. Pour relier Montréal à Vancouver, vous devrez planifier un voyage de quatre jours en train, avec certes un seul changement, contre 5h30 en avion.


En Amérique du Nord, la problématique du train rapide pourrait se poser sur des distances assez courtes, entre des grandes métropoles. L'administration Obama a ramené le sujet sur le tapis pour la Floride et la Californie, avec des métropoles assez proches les unes des autres. Au Canada, ce qui intéresse le gouvernement est l'ensemble métropolitain se situant entre Québec et Windsor (en Ontario). Ce projet aurait l'avantage de pallier une carence importante des transports dans cette zone. En effet, la route est longue entre Québec et Toronto (près de 9 heures). Il existe bien un Express ferroviaire qui relie Montréal et Toronto en cinq heures, pour faire 500 km, mais on ne peut pas dire que la fiabilité soit son fort. J'ai eu l'occasion de l'emprunter, avec un minimum de 30 mn de retard, et près de 3 heures au retour ! J'avais d'ailleurs admiré le stoïcisme des Canadiens face à ces dysfonctionnements…


Le TGV pourrait faire cette distance en deux heures, et changer réellement l'équilibre des entreprises dans une région dominée par Toronto, où les villes québécoises jouent un rôle important, et où le contact avec les Etats-Unis est primordial. Tout d'abord, Air Canada a mis en œuvre un lobbying important pour lutter contre ce projet, craignant qu'une de ses lignes les plus rentables soient vidées de ces passagers, alors que la concurrence des low costs est déjà féroce. De plus, les compagnies de transport par car luttent aussi, du fait de leur importance sur un marché où le rail n'a plus d'importance depuis 50 ans. Enfin, un vrai débat sur la place de la puissance publique existe au Canada, et s'il semble avéré que c'est l'Etat qui financera les voies, les compagnies privées pourraient être tentées de devenir opérateur de TGV, concurrençant ainsi Via, la compagnie publique gérant actuellement le réseau. Parmi ces concurrents potentiels, on trouve… Air Canada.


Il est intéressant de constater que ce sont deux villes québécoises qui ont commandé à la SNCF une étude sur ce sujet : Montréal et Québec. Certes, la campagne municipale en cours n'y est certainement pas pour rien. Cependant, dans un contexte de crise économique, il est révélateur que ces deux cités s'imaginent reliées aux grandes villes de l'Ontario, et particulièrement à Toronto. Pour les Montréalais, la croissance de Toronto a signé, depuis la fin des années 1970, le déclassement de leur cité. Autrefois premier pôle économique du Canada, Montréal a vu partir de nombreuses compagnies pour Toronto, à la fois pour des raisons économiques et pour des craintes quant à une éventuelle indépendance du Québec. Les élites anglophones du Canada ont préféré continuer à faire du business en terrain tranquille.


Aujourd'hui, si les villes du Québec restent dynamiques, elles souhaitent tout de même bénéficier des impulsions des villes anglophones. Or, il n'y a pas si longtemps, les Québécois s'imaginaient se tourner davantage vers les Etats-Unis, et en particulier vers Boston et New York. Ce virage marque une prise de conscience de l'intérêt de l'ancrage à l'intérieur du Canada.


En réalisant une liaison rapide à l'Est du Canada, le TGV pourrait bien symboliser une intégration économique de plus en plus forte du Québec dans le Canada, loin des désirs indépendantistes d'une moitié de la population de la Belle Province. Le train pourrait ainsi être à nouveau un ferment d'unité d'un pays qui se demande toujours comment s'inventer en tant que nation.


Pourtant, une question me taraude. En France, le TGV fonctionne par une alimentation électrique par les caténaires. Or, au Canada, tout le système ferroviaire s'appuie sur des locomotives s'alimentant sans caténaire, à cause des hivers qui abattraient les câbles. Le TGV peut-il fonctionner avec une alimentation par rail uniquement ?

2 commentaires:

  1. A la fin de l'article il faut lire caténaires plutôt que cathéters.

    Il n'y pas d'alimentation par les voies du TGV.
    Le métro parisien est lui alimenté par un rail supplémentaire au milieu de la voie.

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  2. @ Remy : merci pour les infos. le billet est corrigé. A bientôt.

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