Aujourd'hui, pendant que je surveillais le bac, j'ai eu la chance de me retrouver avec un collègue de droite, et... Euh, oui, je sais, cher lecteur, tout de suite, tu considères que mon billet n'est pas crédible, mais je te rassure tout de suite, il existe bien des profs de droite. Aux dernières présidentielles, 40% des enseignants ont voté Sarkozy, et cette proportion augmente régulièrement. Il faut donc revenir sur ton idée préconçue que tous les profs sont des infâmes gauchistes: le fait que je sois moi de gauche ne signifie rien du tout.
Enfin, bref, donc, je disais que la présence de mon collègue de droite m'avait permis de feuilleter quelque chose que je n'achète jamais: le Figaro!!! Eh oui, cher lecteur, je ne paie jamais pour avoir le Figaro. Je le lis en ligne parfois, rien que pour me marrer en lisant le courrier des lecteurs, qui contient des morceaux d'anthologie (mais ceux du Monde et de Libé ne valent pas beaucoup mieux...). Aujourd'hui, le Fig titrait en une sur le palmarès des villes les plus dangereuses de France. Voilà encore un beau classement, fait pour effrayer l'ensemble de la population, et qui insistait sur la croissance des violences gratuites, liée à un climat social déterioré... Pour une fois que le Figaro semble émettre une critique sur la politique du gouvernement, même minime, je ne boudais pas mon plaisir.
Très vite, mon attention a été attirée par une interview d'Alain Bauer, président de l'Observatoire International de la délinquance. Les conclusions ne semblaient pas très originales, jusqu'à la dernière question, qui demandait quelles étaient les éventuelles solutions à l'augmentation des violences gratuites. Pour les jeunes, Bauer signale qu'il faut lutter contre l'absentéisme scolaire, qui entraînerait les violences!!! Ah ben, là, je suis tombé de ma chaise et j'ai émis un râle qui a fait sursauter les candidats du bac. En clair, voilà que ce joyeux sociologue impute à l'école la délinquance des jeunes!!! Évacuées, la pauvreté, les responsabilités des familles, la vie des jeunes en dehors de l'école, la souffrance de l'adolescence!!! Seule l'école est responsable. Il est d'ailleurs intéressant de voir que cet intellectuel considère l'absentéisme comme une cause alors que nous le voyons comme une manifestation d'une souffrance, qui nous permet à nous de tenter des remédiations ou de signaler l'élève aux services compétents. Il a sans doute plusieurs causes, et parfois une rupture avec l'école, mais de là à considérer le système scolaire comme responsable de la délinquance, il y a un pas qui est franchi très rapidement.
Mais ce joyeux drille ne s'arrête pas là. Voilà qu'il affirme que l'école a une part de responsabilité en excluant les élèves durs. Alors là, on touche le fond. C'est vrai que les règlements intérieurs prévoient l'exclusion définitive de l'élève comme sanction ultime. Dans mon bahut dit "difficile", nous avons exclu un seul élève cette année, alors que nous recensons chaque jour des incidents. Pour nous, il ne s'agit pas d'une sanction en réalité, mais plutôt d'une mesure de protection qui évite à un jeune d'être dangereux pour ses camarades et de repartir ailleurs du meilleur pied. Nous ne virons que lorsque nous n'avons pas le choix, et, en plus, un élève exclu est immédiatement réinscris dans un autre bahut. Alors, Alain Bauer, carton rouge!!!
En clair, que demande le sociologue? Qu'on enferme les gamins délinquants dans l'école, et qu'on ne règle surtout pas le problème de fond. Le gai luron oublie-t-il que l'école s'arrête en fin d'après-midi, qu'il n'y en a pas le week-end et durant les vacances? Il faudrait trouver quelque chose à faire pour les loubards pour qu'ils n'aillent pas faire des violences gratuites: des stages d'été? Non, franchement, on touche le fond...
Ce qu'il manque le plus pour les jeunes d'aujourd'hui, ce sont ds repères ! Sociaux ou sportifs, il faut les occuper, ces gosses des quartiers difficiles ! Ils ressentent bien souvent un malaise social, il faut qu'ils se défoulent et une association sportive ou de loisirs permettrait non seulement de les canaliser, mais aussi de les orienter socialement, de leur poser des bases saines en tête et quelquepart, controler leurs mauvaises fréquentations.
RépondreSupprimerHomer, les gosses des quartiers difficiles n'ont pas besoin qu'on les "occupe", ils ont besoin qu'on les aide à voir à sens à la vie, le sport comme media de l'émancipation et comme tisseur de lien social était une chimère, on a trop longtemps misé sur cela pour apaiser les tensions, on en voit aujourd'hui l'échec...
RépondreSupprimerLes repères dont vous parlez ne peuvent se concevoir que lorsqu'on a défini sa place au sein d'une société, et on ne définit sa place que lorsque l'on se voit un avenir, le malaise de la jeunesse tient beaucoup à ce manque de lisibilité sur le futur qui est réservé aux jeunes de cités, entre les discriminations à l'embauche et la paupérisation galopante, pourquoi se soucier du bien et du mal, de l'autre et de demain alors qu'on est pas sûr d'en avoir un (de lendemain) ?
Et si, au lieu de vouloir les "occuper", on cherchait plutôt à les aider à s'émanciper grâce à ce petit truc complètement oublié de nos jours : la culture. Oh, pas la culture des milieux parisiano-parisiens, chez qui Beigbeder a autant sa place (voire plus) que Céline ou Sartre, non, celle qui permet d'élever l'âme, de rêver à autre chose qu'à son quotidien, et qui donne le goût à l'apprentissage (goût bien utile pour poursuivre des études paraît-il) ? Mais là on irait contre la loi du "Bling Bling", en politique comme en musique....
Wow, Fab est en forme littéraire...
RépondreSupprimerRedonner de l'espoir aux jeunes, je partage ton point de vue, c'est à mon avis là que réside une partie de la solution.
Maintenant je suis incapable de proposer des solutions.
Ici, depuis mon adolescence j'observe un négativisme incroyable envers les jeunes (dont moi à une époque).
Y'a pas de boulot, racisme, et c..
A force de répéter ça, on se met à y croire, et on se met à ne plus rien faire pour s'en sortir et on aboutit à la situation actuelle.
C'est la faute aux profs... je rigole, mais pas tant que ça.
Qu'on propose une orientation logique, qu'on propose des métiers qui payent et qui offrent des débouchés (métiers souvent manuels).
Qu'on dise à l'élève moyen ou mauvais qu'il peut bien gagner sa vie et évoluer dans la société.
Et bien non, on va chercher des plombiers polonais..
Si on est en situation d'échec scolaire, j'ai l'impression qu'il n'y a pas d'alternative proposée.
Alors racisme il y a , bien sûr, mais c'est pas que ça.
Je rejoins Manuel sur le problème récurrent de l'orientation dans le cursus scolaire, à trop considérer certaines filières comme "l'élite" et les autres comme "dévalorisante" on a conduit l'ensemble des élèves à considérer le travail manuel comme un échec, en supprimant ce sentiment d'échec lié à l'orientation vers des filières "pro" on éviterait qu'ils n'y voient qu'une voie sans issue, donc bonne à être gâchée, alors qu'un plombier, chauffagiste, mécanicien ou autre touche bien souvent mieux sa vie qu'un prof....
RépondreSupprimerMerci à tous pour les commentaires.
RépondreSupprimerIl me semble clair que le problème central est que les jeunes des "quartiers" réussissent moins que les autres, surtout s'ils sont issus des milieux d'immigration récente. Ce sont les simples statistiques du bac, et c'est un lourd problème. D'autre part, cette différence se retrouve partout, y compris au brevet des collèges et dans les bacs pros.
Je rejoins Fabrice sur la nécessité d'ouvrir des perspectives à l'ensemble de la jeunesse, qui se sont manifestés dans les mouvements lycéens de l'année d'ailleurs. Je crois aussi que nous devons valoriser tous les métiers qui ont une utilité dans notre société, même s'ils ne gagnent pas forcément des milles et des cents.
Le racisme a un rôle, mais ce n'est pas le seul problème. Il y a aussi des problèmes dans les familles, des conflits culturels importants avec le modèle républicain (d'autant plus que les gamins n'en voient pas forcément les bénéfices), le discours médiatique toujours négatif, les craintes des employeurs et des salariés plus classiques... Les facteurs sont multiples, et ces questions demandent du temps et de la réflexion. Le système scolaire y a sa part de responsabilité, et je ne chercherai absolument pas à l'exonérer.
A bientôt,
Oh la honte
RépondreSupprimerLa méga honte
Un S à mille ?????? La règle a changé ou mon prof d'histoire préféré a oublié que mille est invariable ? ;)
Fabrice 25 juin 2008, relis nos deux posts.
RépondreSupprimerOups! Pardon pour la faute...
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