samedi 8 mai 2010

Rigolons avec le gouvernement : la loi Grenelle 2 interdit le portable à l'école.

Plus précisément, pour compléter ce titre, cher lecteur, la loi interdit l'usage du portable durant les cours, pour des motifs sanitaires.

C'est marrant, cher lecteur. L'OMS nous a pourtant garanti que l'usage d'un téléphone mobile n'était pas dangereux, et qu'il fallait simplement maintenir une distance de 5 mètres avec les antennes-relais. Pourquoi dans ce cas l'interdire à nos chères têtes blondes ?

Je suis cependant entièrement d'accord avec cette interdiction, mais pas pour des motifs sanitaires, bien sûr.

J'enseigne, cher lecteur, depuis 2001. A cette date, les téléphones mobiles existaient déjà et j'ai été très surpris de découvrir que la plupart de mes élèves, pourtant issus de milieux très populaires, en avait un. A l'occasion, j'ai pu me renseigner auprès d'eux sur ce qui poussaient les parents à payer des forfaits à des adolescents de seize ans : "Ben, pour qu'ils puissent savoir où on est, Monsieur." Et ainsi, j'ai pu voir que durant les sorties ou les voyages scolaires, les parents n'hésitent pas à téléphoner régulièrement, parfois plusieurs fois par jour.

Bien évidemment, les gamins bénéficient de la situation et on n'a pas conscience des sommes investies par les parents. Depuis un an et la sortie de l'Iphone, les smartphones se sont multipliés chez nos élèves. Ainsi, pour faire plaisir à leurs gamins, des parents engloutissent des montants délirants, alors que la plupart d'entre eux touchent le SMIC ou le RMI, pour équiper l'enfant prodigue du dernier Iphone 3GS avec forfait adapté.

Tu pourrais me dire, cher lecteur, que cela ne concerne que les parents, mais nos cours sont atteints. En 2001, nous avions à lutter contre l'envoi de SMS durant les cours. J'ai même le souvenir d'avoir vu un élève décrocher son téléphone en plein pendant un de mes cours, suscitant une confiscation immédiate. Maintenant, les poches de nos élèves vibrent de messages Facebook, Messenger, Twitter qui ne cessent de les perturber et de les détourner de ce dont le prof est en train de parler. Régulièrement, nous évoquons en salle des profs l'idée de disposer quelques brouilleurs dans le lycée pour se débarrasser de cette plaie, mais cette tentative dictatoriale des enseignants est vite déjouée : la loi interdit cette action pour permettre l'appel des services de secours par le chef d'établissement en cas de besoin.

Dans mon lycée, comme dans la plupart d'entre eux, l'usage des téléphones est interdit partout, sauf dans la cour, aux enfants, et limité aux salles de repos et aux bureaux pour les adultes. Nous n'avons pas attendu le Grenelle de l'environnement pour limiter l'usage de cette merveilleuse technologie. Je me demande bien combien de temps les députés ont planché sur cet article...

Les élèves voient souvent cet appareil comme le moyen de rassurer leurs parents et d'être tranquille. Pourtant, quand j'étais gamin, je pouvais toujours me dire que, dès que j'étais sorti de la maison, je pouvais faire ce que je voulais sans avoir mes deux parents téléphonant systématiquement. De même, durant un voyage, je téléphonais quand je le souhaitais et je n'avais pas à subir cette pression parentale. Les gamins rassurent, mais ont-ils gagné une véritable liberté en répondant aux angoisses de leurs géniteurs ? Je doute...

10 commentaires:

  1. Ah, j'applaudis des deux mains avec tous mes doigts qui ne twittent pas à cet article.
    Confisquez, confisquez, confisquez tout ce qui sonne, qui vibre et qui dérange, et ne rendez l'objet qu'un mois après la date de confiscation, aux parents en personne. Faites signer un règlement intérieur en ce sens.

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  2. @ Suzanne : le règlement intérieur est déjà signé. En général, on garde les portables entre une heure et sept jours, sauf si les parents viennent les chercher, ce qui arrive dans la plupart des cas.

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  3. Je dirais presque : mouarf. Mettre ça dans le Grenelle...

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  4. Tous les règlements intérieurs de collège que j'ai visités interdisent l'usage des portables dans les salles de classe au moins. Il y avait juste une difficulté pour les écoles maternelles et primaires, ce ne sont pas des EPLE et elles ne possèdent donc aucun règlement intérieur voté par un conseil d'administration, approuvé par un conseil de la vie lycéenne et ainsi de suite. Le tout est à la discrétion des maires, des présidents de collectivités locales du type Communauté de communes, ou des directeurs qui en fait ne sont pas chefs d'établissement et qui sont dépourvus de toute autorité hiérarchique. Je suppose que beaucoup de communes diffusent des règlements intérieurs de forme très réduite par rapport à celui de certains collèges (vu déjà 48 pages en petit format, corps huit*), mais si cela a été décidé en commun avec les parents d'élèves et les enseignants, c'est parce qu'elles l'ont bien voulu. Elles peuvent parfaitement s'en passer (sauf si l'inspection pédagogique a tiqué).

    La loi impose donc aux communes de faire ce qu'elles faisaient déjà, sauf si le problème ne se posait pas. Elle l'impose aussi aux collèges qui l'avaient aussi décidé dans un cadre règlementaire (on a élaboré des pages et des pages de documents pour interdire la casquette ou les strings apparents par exemple bien avant que ce ne soient des sujets pour la télé, et pourtant je suis en cambrousse).

    L'argument sanitaire par l'âge est idiot par excellence ! Quelle différence entre un élève de 4e Segpa en LP ou EREA et un élève de 4e Segpa en collège ? En LP, avec des élèves de 4e-3e technos (il y en a encore quelques-uns), on se trouve à devoir aussi filtrer les sorties des élèves pour aller fumer leur clope comme ceux qui sont en bac pro ou en STS. Et il y a comme une aberration de statut dans ces établissements hybrides.

    * Cela promet pour le surveillant imbécile qui demande de recopier le règlement intérieur. Il devait faire deux pages quand j'étais collégien...

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  5. @ Nicolas : mouarf aussi !

    @ Dominique : oui, et cet article de loi ne coûte d'autant plus rien au gouvernement. En fait, on peut vraiment se demander à quoi il sert.

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  6. Je trouve que rassurer ses parents n'est qu'un prétexte pour que les gamins aient un portable "comme tous mes copains quoi" et qu'ils ne soient pas laissés dehors par leur groupe d'amis. Malheureusement, les enfants aussi bien que les ados (pour ne pas mentionner mes chers collègues étudiants, qui pourant sont censés être des adultes) ne savent pas où il faut s'arrêter.
    A mon époque (mon Dieu que je me sens vieille, mais ces quelques années ont changé tellement de choses) nous étions une dizaine à avoir des portables, tous après 17 ans, et aucun n'osait l'allumer en dehors des pauses...

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  7. Une solution TRES simple. Que j'utilise depuis des années:

    TOUS les portables de mes élèves sont sur leur table, bien en vue. Ceux qui les cachent savent ce qui les attend. Je les utilise même pour des opérations simples. Bref je fais de l'objet honni un allié.

    Et vous svez quoi? Ca marche!

    www.profencampagne.com

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  8. @ Denisa : c'est sans doute un prétexte pour les gamins, mais les parents tombent dans le panneau quand même. Ils sont donc consentants et acceptent ces arguments.

    @ Anonyme : qu'en fais-tu ? C'est pour les maths ?

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  9. @Mathieu: bah, s'ils sont bêtes... Franchement, il y a des portables à 1€ avec certains abonements, il faut être fou pour acheter autre chose à un gamin!

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  10. @ Denisa : entièrement d'accord.

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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