mardi 13 octobre 2009

Quel ancrage idéologique du président sur l’éducation ? Première analyse du discours sur la réforme des lycées.

Comme je te l'avais annoncé, cher lecteur, Nicolas Sarkozy a montré une nouvelle fois qu'il s'intéressait aux jeunes en annonçant, par un long discours, la réforme des lycées. L'initiative est forte. C'est en effet la première fois qu'un chef d'Etat prend le risque de se mettre en avant dès le début d'une réforme de l'éducation. A l'évidence, l'enjeu est important et le président cherche à gagner un nouveau titre : celui du président de droite qui est parvenu à réformer quelque chose dans l'éducation sans trois mois de grève et un changement de Premier ministre.

Il y aurait beaucoup à dire de ce que l'on trouve dans ce discours, et j'y reviendrai dans un futur proche. Pour le moment, je souhaite te faire partager, cher lecteur, une courte analyse des fondements idéologiques du discours présidentiel.

Il a commencé par un petit historique extrêmement rapide du lycée. Rappelant les origines napoléoniennes de cette institution (1802), Sarkozy a remis en contexte le lycée de l'époque : voici une institution imaginée par l'empereur pour aider à la création d'une nouvelle élite, principalement issue de la bourgeoisie, permettant de concurrencer l'ancienne noblesse déclassée par la Révolution. Longtemps, le lycée a été cette voie royale réservée à nos élites. Sarkozy a ensuite rappelé que, depuis le milieu des années 1980, le lycée s'était massifié en s'ouvrant à la majorité de la population (65% d'une classe d'âge aujourd'hui). Et le président de fustiger ce système qui ne parvient pas à amener les 35% restant au baccalauréat et à des diplômes de haut-niveau…

Ce qui est intéressant, c'est que le président ne dit pas que, si le pourcentage de bachelier s'est étendu, c'est uniquement grâce aux filières technologiques et professionnelles. Le lycée général a un peu augmenté, mais on reste à 35% des élèves contre 30% dans les années 1980. Or, Sarkozy est maintenant lié par la loi de 2005 imposant de réussir à atteindre le taux de 50% d'une classe d'âge au niveau BAC+3. Il souhaite donc une chose : permettre aux élèves du professionnel et du technologique d'accéder au supérieur.

Toutes ces propositions sont accompagnées d'une violente charge contre les élites qui souhaitent rester entre elles. Or, Sarkozy propose simplement d'étendre le système des non-élites en essayant d'amener certains de ces jeunes jusqu'au supérieur. Se dessine ainsi un lycée général qui resterait dans la même position, avec des élites dedans, mais qui serait renforcé par des lycées professionnels et technologiques beaucoup plus puissants et capables de mener loin des élèves. En clair, il se maintiendrait un lycée d'élite et deux lycées pour les autres, mais rassurez-vous, vous pourrez vous en sortir.

Ces propositions sont matinées d'individualisation des parcours. Le président a annoncé la reconnaissance d'un droit à l'erreur et la possibilité pour les élèves de changer de filière en cas d'échec. Evidemment, je me suis tout de suite imaginé l'effondrement de la traditionnelle autorité de l'éducateur en France et l'apparition d'une liberté très forte de l'élève. Or, en allant plus loin dans le discours, on ne peut que constater qu'il n'en est rien. Un élève ayant de bons résultats mais se rendant compte d'une erreur ne pourra pas changer de voie : c'est le conseil de classe qui décidera, et il ne pourra le faire que si l'élève est faible. De même, un soutien obligatoire pour tous est mis en place, mais attention, avec des différences. Si tu es bon, on te renforcera. Si tu es moyen, on te soutiendra. Si tu es mauvais, on t'aidera à refaire un projet pour aller voir ailleurs si l'herbe est plus verte.

On ressort du discours assez troublé. Derrière une logorrhée très volontariste et presque socialisante parfois, le président n'a fait que confirmer que la sélectivité du système se maintiendrait, avec des aménagements pour les pauvres, et que l'individualisation serait le nouveau mot, ce qui ne changera sans doute rien à l'égalité des chances que le président chercherait à (re)trouver. En clair, la vie des élèves de ce pays ne va pas beaucoup changer, quoique… Cette individualisation risque de réellement modifier leur perception d'eux-mêmes, de leurs réussites mais aussi de leurs échecs. Là, l'éducation peut réellement bouger, mais est-ce dans le bon sens ?

5 commentaires:

  1. Ok, mais que penses-tu des différentes propositions ?
    Sarkozy est un super-pragmatique, essayer d'analyser les idéologies qu'il y a derrière ses idées est vain à mon avis...

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  2. @ Paul : je prends le temps de la réflexion avant de publier là-dessus. Encore un peu de patience.

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  3. Ce commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.

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  4. Bonjour, ce commentaire qui fait la "pub" de mon ouvrage fleurit sur le top politique wikio, je tiens à signaler que je n'en suis pas l'auteur et que je n'aime pas le procédé, David Réguer

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  5. @ D. Réguer : merci de l'info. Je supprime donc le commentaire.

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