lundi 10 août 2009

Le changement de statut de la Poste : bon moment pour la gauche pour se lancer dans la lutte politique contre Sarkozy et son camp.

Il y a quelques jours, je découvrais par mon camarade avien, habitant de ce village au nom si musical, que le magazine en ligne Marianne2 lançait une pétition pour obtenir un référendum sur le statut de la Poste. Actuellement, la pétition marche mollement, mais il est important pour l'ensemble de la gauche de travailler sur cette question.

La privatisation de la Poste avait été évoquée par le président de la République au milieu de l'année 2008. Heureusement, la crise économique est passée par là, entraînant un report sine die de cette mesure. Cependant, et contrairement à ce que le silence médiatique pourrait laisser penser, le gouvernement n'a pas complètement reculé sur cette affaire. Actuellement, un projet de transformation de la Poste en société de droit privé à capitaux publics est en examen, et devrait arriver devant le Sénat en octobre.

Le but officiel et affiché de cette loi est de permettre à la Poste de trouver de nouveaux capitaux pour développer ses activités face à la concurrence qui s'est mise en place en France sur certaines missions depuis 1997, du fait de l'application de directives européennes. Comme l'État est en ce moment incapable de financer quoi que ce soit, sauf les banquiers et les bourgeois, il serait impossible de procéder à un nouvel approvisionnement en capital de la Poste. L'idée est donc de permettre à la Poste de se réapprovisionner ailleurs. De plus, le passage au droit privé devrait permettre de se débarrasser du statut de fonctionnaires à la Poste en arrêtant définitivement d'en créer, même s'il en reste encore 200 000. La Poste reste un foyer régulier de mouvements sociaux et de contestations : embaucher les personnels en contrat de droit privé, plus flexible, permet de briser la contestation des salariés. A gauche, à part du côté syndical, la mobilisation reste faible.

Or, il est important de réagir sur cette question. La Poste couvre toute une série de missions de service public que le privé ne couvrira jamais. D'abord, elle opère toute une série de services financiers coûteux et peu rentables : n'oublions pas que la banque postale reste la seule banque publique et que cela lui a plutôt réussi durant la crise économique. De plus, la Poste est la seule banque qui ne peut refuser d'ouvrir un compte à un client. Cela permet aussi aux banques privées de ne pas prendre trop de risques avec les clients faibles, ce que les capitalistes oublient souvent de rappeler. De plus, la Poste assure la livraison du courrier sur l'ensemble du territoire, quel que soit le lieu d'habitation de nos concitoyens. Elle remplit donc de véritables missions de service public.

Cela n'empêche bien sûr pas, comme dans tous les services publics, de réfléchir à ses missions et de l'améliorer. Il faut prendre en compte l'impact fort de la révolution des NTIC pour concevoir l'activité actuelle de la Poste, ce que l'entreprise fait déjà d'ailleurs. Il est possible de le faire dans le cadre de la gestion publique, et à moindre coût. Même si le privé reprend les services, il sera forcément plus coûteux pour permettre le dégagement de profits, ou de moins bonne qualité pour maintenir le même prix.

L'idée du référendum est positive et vu que la constitution le permet, il faut le tenter. C'est une belle occasion pour la gauche de présenter sa vision des services publics, de parler des impôts qui y sont liés, et de la gestion des finances publiques et de l'Etat depuis l'accession du président actuel au pouvoir. La blogosphère de gauche pourrait aussi se mobiliser autour de ces questions. Nous n'avons rien à y perdre, et même si une défaite survenait : on ne brisera pas la doxa libéralo-conservatrice en trois mois.

Le projet de loi sera devant le Sénat en octobre. Vu l'agenda parlementaire très chargé, son adoption va sans doute prendre un peu de temps. Nous avons largement le temps de nous préparer et de commencer à préparer le terrain. Au travail !

11 commentaires:

  1. Très intéressant! Merci!

    Cependant, peut-on même parler de service public? Et la privatisation réduit-elle vraiment le nombre de points de vente? Cette analyse tend dire le contraire;

    http://www.unmondelibre.org/Poncins_services_publics_100809

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  2. @ Anonyme : la privatisation va réduire les points de vente dans les zones isolées, car peu rentables. Elle les augmentera là où la clientèle est importante, mais en privilégiant les services rentables avant tout.

    Pour moi, la notion de service public est une évidence, mais je comprends que le site libéral que vous citez puisse la nier, car la performance éventuelle des SP va contre son idéologie.

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  3. La Poste a commencé à disparaître. Les services financiers sont devenus La Banque Postale. La filialisation (déjà ancienne) est importante (chronopost,...).
    Les Français sont attachés à ce service.
    Rappelons ce qui s'est passé pour France Télécom, GDF, ... Toute ouverture du capital se traduit à plus ou loin long terme par une privatisation.
    Comme contribuable, on paie une première fois pour installer ces services, puis comme usager, puis comme client, puis le prix des services grimpe (voir le prix du timbre en Finlande par exemple) et l'on se prend à regretter le bon vieux temps. Mais c'est trop tard.

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  4. Dans les petites communes, le service public est déjà assuré par la mairie obligée de pâlier l'absence de personnel de la Poste.

    Les français devront bientôt aller chercher eux-mêmes leur courrier ou ils le recevront avec du retard.

    La gauche doit effectivement se mobiliser trés fortement contre ce projet.

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  5. @ Ferocias : ce sont les problématiques que la gauche devrait développer. Dommage qu'on n'entende pas tout cela dans les partis de gauche.

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  6. @ Pazmany Jeune Garde 87 : entièrement d'accord, et merci pour ces arguments supplémentaires.

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  7. Mon commentaire étant un peu long, je l'ai posté sur mon blog. Il résume quelques faits et craintes autour de cette privatisation que, je pense, il faut encourager (ou alors lutter contre l'ouverture à la concurrence du secteur postal, c'est selon).
    http://borisschapira.com/changement-de-statut-de-la-poste-des-craintes-plus-ou-moins-justifiees

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  8. @ Boris : merci pour le lien. J'irai le lire un peu plus tard, je suis sur la route aujourd'hui, et je le commenterai.

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  9. Quand la poste sera privatisée, avec le temps la notion de service public ne sera plus qu'un vague souvenir tout comme les années des 30 glorieuses.
    Les enfants pourront demander "Dis papa c'était comment un service public" .

    Et ceux qui vivent hors des grandes villes pourront voir un facteur,, dans les musées.

    Jarod

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  10. David75

    Avec tous les sujets brulants sur la table. Si la gauche ne trouve pas de quoi se faire entendre par les français à la rentrée en septembre ce sera vraiment à désespérer pour de bon et pour longtemps..

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  11. @ Jarod : c'est bien pour cela qu'il faut se bouger !

    @ David75 : je désespère ! Il n'y a que les primaires qui les intéressent.

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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