lundi 29 mars 2010

Quelle augmentation ?

Homer me demande ce que je pense des annonces de Luc Chatel sur l'augmentation de salaires des profs, faites hier soir sur RTL. Il s'avère que je ne suis pas concerné.

D'abord, en préalable, je voudrais revenir sur la manière dont les médias traitent la question. Ils annoncent une augmentation alors qu'il s'agit simplement d'une hausse de la grille de salaire des professeurs qui seront recrutés à partir de l'an prochain. Et après tout, c'est normal, car on a tout de même élevé le niveau de recrutement de deux années d'étude. Qu'auraient-on dit si le ministre avait déclaré qu'on recrutait à niveau plus élevé sans valorisation financière ? Déjà que les futurs collègues n'auront plus de formation professionnelle...

Cependant, cette hausse suscite plutôt la colère des syndicats, et ce pour plusieurs raisons :
  • D'abord, on peut s'étonner de la faiblesse de la hausse, car un certifié, qui démarrait jusque là à 1 250 € par mois net avec un recrutement à BAC+3, touchera 1 400 € net à BAC+5. Le ministre espère combler ainsi les manques de certaines disciplines, dont les diplômés sont attirés vers le privé, comme la physique ou les langues, mais je doute que l'équation soit intéressante. En effet, pourquoi faire deux années d'étude en plus pour un salaire pareil ?
  • Ensuite, il faut voir l'évolution de la grille sur les 40 années de carrière. Avec cette augmentation, un enseignant recruté au niveau master se retrouvera avec le même salaire que les profs ancien modèle lorsqu'il arrivera au 7ème échelon. La hausse a donc eu lieu lorsque le salaire est le plus bas, mais disparaît ensuite.
  • Évidemment, les autres profs ne sont pas concernés, alors que les enseignants ont perdu un tiers de leur pouvoir d'achat depuis 1980.
  • Enfin, et pour casser les restes d'attractivité du boulot, la future réforme des retraites s'annonce dévastatrice. Les salaires étant bloqués par les grilles indiciaires, le gouvernement se prépare à mettre les fonctionnaires sur le système des 25 meilleures années, ce qui équivaudra à une diminution des pensions de retraite d'un tiers à la moitié par rapport à la situation actuelle. Les retraites étaient un des rares points d'attraction de ce boulot, car elles pouvaient compenser le blocage des rémunérations durant la carrière.
En clair, cette mesure est un placebo qui ne devrait pas changer grand-chose à l'évolution générale du métier.

Ce qui est amusant, c'est que nous sommes au courant de ces annonces depuis plusieurs mois, puisque ce montant de 150 € pour les certifiés, je le connaissais déjà, sans doute par des publications syndicales. Les journalistes ont fait une découverte, hier, semble-t-il. Étonnant...

4 commentaires:

  1. Exactement ! C'est tout à fait où je voulais en venir !

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  2. @ Homer : j'ai essayé de te répondre en effet.

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  3. Disons que cette revalorisation en début de carrière correspond tout simplement à la disparition des 1er et 2 échelons dans les grades. Le certifié ou PLP ou PE stagiaire commencera son service à 18 ou 26 heures comme un titulaire et non plus à 4-8 heures, mais il sera payé exactement comme un néo-titulaire qui passait automatiquement au 3e échelon à la fin de son année de stage. En revanche, les stages au niveau du master professionnel ne seront pas rémunérés sous forme d'un traitement mensuel (avec congés payés attenants), mais d'une indemnité forfaitaire exactement comme pour des contractuels. Bref, il s'agit d'un tour de passe-passe budgétaire et d'une opération blanche (si ce n'est positive pour la disparition de la rémunération comme temps plein du sous-service des anciens stagiaires).

    Un autre point qui n'est presque jamais abordé par la presse, c'est le fait que la masterisation crée une catégorie de personnels qui possèderont le diplôme pour enseigner, mais qui ne seront pas titulaires du concours et ceux-là pourront être employés comme contractuels. La prétendue revalorisation ne s'appliquera pas à eux : paiement à l'heure effectuée sur une base très faible, congés maladie ou congés payés au prorata des heures faites et calcul pour la retraite à l'avenant. Il y a aura deux catégories de titulaires du master, et on pourra ajouter les gens qui auront réussi le concours théorique et raté le master. Cela donne une fonction publique totalement éclatée. Le but n'est pas seulement de faire des économies d'échelle, mais aussi de créer la division.

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  4. @ Dominique : la question des étudiants ayant un master mais sans concours pose en effet un autre problème considérable.

    Bizarrement, l'administration feint d'ignorer complètement la question...

    On peut juste se dire que l'absence de master d'enseignement pour le secondaire permet d'envisager que ces étudiants pourront quand même faire autre chose et ne seront pas corvéables à merci par l'Ed Nat. Cependant, il n'en sera pas de même pour nos collègues du primaire...

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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