dimanche 23 novembre 2008

Souriez, vous êtes filmé au Stade de France.

Hier soir, cher lecteur, j'ai eu la chance d'aller voir France-Australie au Stade de France. Personnellement, je ne connais pas grand-chose au rugby et je ne suis pas un grand fan des stades mais j'apprécie particulièrement l'ambiance des matchs de rugby, et c'est un jeu nettement plus agréable à regarder que le football, souvent plus lent et long lorsqu'il y a de gros enjeux. Le rugby, ça bouge, il se passe des choses, et on est toujours en train de s'exciter sur ce qui se passe sur la pelouse. Les supporters sont cordiaux et amicaux : je suis persuadé que les quelques milliers d'Australiens perdus dans les tribunes du Stade de France ne se sont jamais sentis ni menacés ni agressés par le public français. Et, ici, malgré une certaine mixité dans les tribunes, on ne siffle pas les hymnes, et on applaudit les belles actions menées par les adversaires de la France.

Pourtant, je suis ressorti du Stade un peu troublé. Lorsqu'on se rend au stade, on y va pour se distraire, comme lorsqu'on va au théâtre, au cinéma, à l'opéra ou au bistro. Bon, je sais, cher lecteur, que j'accole ensemble des choses qui n'ont pas grand-chose à voir, mais, en y réfléchissant bien, je me dis que ce n'est pas si illogique : ces activités sont des moments durant lesquels on ne travaille pas et durant lesquels on prend du plaisir, malgré tout. Normalement, on est pas là pour provoquer des violences. Pourtant, le stade est tentant en soi. Il y a là 80 000 personnes, toutes dotées d'un portefeuille rempli de billets. Il faut dire que, si tu veux prendre un rafraîchissement ou une collation au Stade de France, accroche-toi à tes euros : un simple café coûte déjà 2 euros à lui seul. Quand on voit le prix des places, il y a de quoi perdre les derniers centimes qu'il vous reste après une journée de grève dans la semaine. D'autre part, les rixes entre supporters (surtout pour le football) sont toujours possibles. J'ai d'ailleurs aperçu de nombreux CRS rodant autour du cirque...

Pourtant, j'ai l'impression que les procédures de sécurité n'ont jamais été aussi fortes. Lorsqu'on arrive au Stade, on passe à la fouille : tous les sacs sont ouverts, on doit présenter des billets qui sont scannés par les portiers. Ensuite, on repasse un deuxième contrôle quand on entre dans les tribunes, pour pouvoir accéder à sa place. A chaque fois qu'on se déplace, on doit être muni de son billet. Enfin, les personnels du Stade ont tous des cartes autour du cou, avec plein de numéros écrits dessus, qui doivent correspondre aux lieux auxquels ils ont accès. En effet, le Stade semble très compartimenté, et on ne peut se déplacer où on veut.

Enfin, il y a des caméras partout. Certes, je comprends les craintes de nos officiels : 80 000 personnes au même endroit au même moment, avec une télédiffusion en plus, c'est plus que tentant pour n'importe quel islamiste qui voudrait faire un coup d'éclat. Cependant, il y a profusion de caméras, partout, tout autour du Stade, dans les travées latérales, au-dessus de toutes les tribunes. Je suis sûr que les personnes qui visionnent cela en direct voient tout : pendant un moment, j'ai hésité à me curer le nez, de crainte de me voir rediffusé ce soir en préfecture de police. De plus, je suis sûr qu'il est possible de lire sur les lèvres des spectateurs, voire même de capter les sons. Bon, d'un autre côté, j'imagine que ces gentils employés fixent plutôt les jolies filles, mais enfin...

Toute cette surveillance, comme partout ailleurs, a-t-elle une quelconque utilité, à part développer le sentiment de psychose chez nos concitoyens ? Je n'en crois rien. Je reste toujours autant persuadé qu'un terroriste déterminé pourra toujours mener son attaque, sans qu'on y puisse rien. Une bombe, c'est petit et cela se dissimule : une femme et/ou un homme convaincu sont indétectables et restent dangereux.

Je reste donc hérissé par cette surveillance dangereuse. Finalement, nous, citoyens, sommes responsables de cette dérive. Méritons-nous nos libertés, si nous sommes prêts à les brader dès que deux connards veulent faire sauter des bombes quelque part ? Pour une fois, je reste très inquiet du développement des moyens de l'État de mener des contrôles et de la surveillance. Cela m'a gâché mon match, encore plus que la performance finalement assez moyenne de l'équipe de France et que la rigueur de l'équipe australienne...

4 commentaires:

  1. Tu n'as pas souri (on t'a vu à la télé).

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  2. Bonsoir Mathieu,
    Je suis d'accord avec toi sur la dangereuse frontière qu'il faut placer entre sécurité et respect de la liberté...
    Dans le cas d'un stade, compte tenu de la masse de population et du type d'évènement, les caméras ne servent à mon avis pas que pour le terrorisme. Dans ce cas d'ailleurs, cela ne permet peut-être pas d'arrêter le terroriste avant, mais de savoir ce qui s'est passé après (maigre consolation je sens, mais qui peut être cruciale pour démanteler un réseau). Cela peut aussi servir à retrouver des supporters responsables de violences ou d'insultes comme avec la "banderole contre les ch'tis". Et même parfois prévenir dès le début des débordements de ce style.

    Mais il faut rester vigilant, je te l'accorde...

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  3. @ Elyas : chouette on est d'accord sur un sujet !

    Bon, je trouve que l'histoire de la banderole des Ch'tis ne mérite pas tout cela, mais enfin...

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Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

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