Pour la première fois, cher lecteur, je publie un écrit qui n'est pas de mon fait, et qui n'a pas été rédigé par l'un de mes deux compères. Clairette est membre de ma famille et exerce la profession d'orthophoniste. Tu remarqueras, cher lecteur, que nous sommes plusieurs à avoir le virus de l'écriture. Vous pouvez lui laisser des commentaires, auxquels elle répondra si elle le souhaite.
Bonne lecture !
J’avais promis à un patient de lui déposer dans sa boîte à lettres un compte-rendu d’examen emprunté pour besoin de photocopie.
23h : rentrant du cinéma, j’étais donc devant la porte de son immeuble, composant le code. Tiens, bizarre, aucune réaction ! J’ai dû faire une erreur en appuyant sur les touches. Je recommence ; rien. Je recommence lentement, précautionneusement ; rien. Je l’ai composé l’après-midi même et on ne m’a pas prévenu d’un changement prochain ; rien. Pourtant d’autant plus sûre de moi que par un hasard providentiel, il s’agit des 4 chiffres de la plaque d’immatriculation de ma voiture. Je commence à douter ; mon numéro d’immatriculation est peut-être le code d’un autre immeuble. La ronde des codes commence dans ma tête, dans le désordre d’abord et l’horreur m’envahit. Je décidai de récapituler chronologiquement tous les codes effectués depuis le matin, un mardi ordinaire.
8h : avant de quitter mon domicile, je branche mon téléphone portable – 1er code –
8h50 : j’arrive à mon cabinet d’orthophonie et j’allume mon ordinateur – 2ème code –
je me connecte sur msn - 3ème code –
je prends connaissance de mes messages sur orange.fr – 4ème code –
j’ouvre mon logiciel professionnel – 5ème code –
je branche l’appareil qui me permettra de télétransmettre et je tape mon code de professionnelle de santé - 6ème code-
13h : après une matinée de consultations je télétransmets les feuilles de soins – 6ème code une 2ème fois –
14h : 1ère maison de retraite ultra moderne ; après avoir pu stationner dans le parking souterrain en donnant dans un interphone l’objet de ma visite, il faut faire fonctionner l’ascenseur – 7ème code –
15h : ma consultation auprès d’une patiente Alzheimer terminée, il faut sortir de ce bâtiment. Tout d’abord, trouver un membre de l’équipe soignante possédant une clé permettant d’appeler l’ascenseur. Une fois dans l’ascenseur, se dépêcher de faire le code pour ne pas partir dans les étages ou rester coincée au même niveau. Quand il a été possible de retrouver sa voiture la partie est gagnée ; les 2 portes du parking actionnées par une cellule s’ouvrent seules. Il ne m’est encore jamais arrivé de rester coincée entre les 2 mais je ne désespère pas. Il m’est arrivé de partager la descente avec un résident parvenu à tromper la surveillance. Que faire ? L’empêcher de monter dans l’ascenseur ? Lui demander où il va ? Se cacher pour taper le code comme une petite fille à l’école refusant que des yeux indiscrets parcourent son cahier ? se demander s’il a été enfermé vivant ? l’aider à s’évader et lui souhaiter bonne chance ?
15h15 : 2ème maison de retraite de construction nettement plus ancienne que la précédente. Cette fois, le boîtier commandant l’ascenseur se trouve à l’extérieur au moment de l’appel de celui-ci. Nettement moins flippant. – 8ème code -
16h15 : J’arrive chez la 3ème visite à domicile – 9ème code –
17h15 : 4ème visite à domicile – 10ème code –
18h15 :je m’arrête au distributeur de la banque, histoire de payer ma place de cinéma – 11èmecode –
19h : je passe prendre une amie chez elle – 12ème et 13ème codes, un sur rue et un sur cour –
23h : je rentre chez moi déprimée et fourbue – 14ème et dernier code pour aujourd’hui –
J’appris le lendemain qu’à partir de 22h, le code sur rue n’est plus opérationnel ; une clé est nécessaire pour accéder aux boîtes aux lettres.
Au feu, les pompiers !
Ce fut une journée bien ordinaire. J’ai à peine utilisé la moitié de ceux que j’ai emmagasinés au fil des jours. Sans cet incident, aurais-je pris conscience de ce que je demande à ma mémoire ? Est-ce que ça prévient de la maladie d’Alzheimer ? J’ai un moyen mnémotechnique infaillible : les départements révisés à l’occasion de chaque escapade dans la province française. Pour mon fils, Ardennes-Territoire de Belfort, ma sœur, Finistère-Pyrénées atlantiques, mon téléphone portable, Aveyron-Vaucluse, etc…
Moins d’emplois mais c’est le progrès, on n’y peut rien. J’ai envie de chanter « j’fais des codes, des p'tits codes, encore des p'tits codes, »
Soudain, je m’arrête net : on va supprimer les numéros des départements !!!
Clairette
mmmmh maintenant que j'ai lu ça je vais prêter attention à mes propres codes...
RépondreSupprimerTrès bien mené ce petit texte! Bravo Clairette. J'ai beaucoup aimé la chute.
RépondreSupprimertoute cette histoire me fait penser qu'il faudrait que je me décide à passer mon code moi...
RépondreSupprimer@ Clémence : combien en as-tu compté ?
RépondreSupprimer@ Lène : cela me fait très plaisir...
@ Fabrice : au travail !
Clairette