lundi 10 mai 2010

Orientation post-bac : le lycée fait la différence.

Il y a des fois où il faut bloguer utile.

Ce matin, grâce au Café pédagogique, nous pouvons découvrir cette étude de Nadia Nakhili, chercheur de l'université de Grenoble, sur l'impact de l'établissement scolaire sur les orientations post-bacs. Les conclusions sont intéressantes.

Bien évidemment, l'auteur n'évacue pas les grands facteurs de choix que sont le bac choisi, les caractéristiques socio-démographiques (que ce soit les origines ou le milieu social du gamin) et le genre (les filles et les garçons font de fait des choix différents). L'étude essaie de vérifier si l'établissement scolaire a une importance.

La chercheur le montre clairement : la réponse est oui. Toutes choses égales par ailleurs, un élève scolarisé dans un établissement où les milieux favorisés sont majoritaires a tendance à choisir une orientation lui permettant d'aller vers des métiers très qualifiés. A l'inverse, un élève se trouvant dans des lycées dit difficiles a tendance à refréner ses ambitions. L'auteur ajoute que la présence dans le lycée de filières sélectives joue un rôle supplémentaire d'attraction.

Pour expliquer ces variations, l'auteur met en avant deux facteurs particuliers au-delà de ceux évoqués dans le troisième paragraphe ci-dessus :
  1. Il y aurait d'abord un "effet de pairs", les élèves ayant tendance à suivre leurs camarades de classe dans leurs choix. Pour nous enseignants, cette tendance-là est très difficile à mesurer, car les élèves ne nous disent jamais à quel point leurs camarades les influencent.
  2. La seconde raison est bien plus connue de nous. Les enseignants auraient un impact car ils adaptent leurs pédagogies, leurs discours et leurs attentes au public qu'ils ont en face d'eux. C'est une évidence. Nous ne pouvons pas faire cours de la même façon face à des élèves ayant des origines sociales différentes. Ce phénomène est d'autant plus marqué lorsque la classe est homogène.
Le rapport conclue sur le fait que l'État peut influer sur ces tendances, à la fois en répartissant différemment les formations sélectives et en jouant sur la répartition des groupes sociaux dans les établissements.

Or, notre gouvernement a fait le choix totalement inverse, en supprimant de plus en plus les contraintes d'affectation des élèves. Certes, la carte scolaire, du fait de l'évolution de nos villes, marquait déjà les inégalités sociales, mais le nouveau système n'a fait que donner la possibilité aux lycées de choisir leurs élèves, accroissant ainsi une ségrégation spatiale déjà marquée.

Cette étude démontre que c'est la mixité des établissements qui pourrait avoir un impact. Les études PISA ont déjà montré que la France, en favorisant un système trop ségrégé, défavorise ses élèves les plus faibles. Pour arriver à cette évolution, il faudra bien retravailler le concept de carte scolaire pour ramener dans l'ensemble des établissements une véritable mixité. Sans cela, on s'enfoncera dans une école qui ne permettra aucune ascension sociale, en continuant par la justifier par un "mérite républicain" qui n'a aucune existence réelle...

4 commentaires:

  1. « Nous ne pouvons pas faire cours de la même façon face à des élèves ayant des origines sociales différentes. »

    Voilà une phrase qui me reste tout à fait incompréhensible. Réellement.

    RépondreSupprimer
  2. @ Didier : ah bon ? Comment cela ?

    RépondreSupprimer
  3. Le genre de phrase qui reste incompréhensible à tous ceux qui professent effectivement le "mérite républicain", sans pratiquer le terrain...
    Elle m'aurait été également difficilement acceptable si je n'avais pas été professeur, depuis six ans, dans le 93

    RépondreSupprimer

Laissez-moi vos doléances, et je verrai.

La modération des commentaires est activée 14 jours après la publication du billet, pour éviter les SPAM de plus en plus fréquents sur Blogger.