samedi 5 septembre 2009

Contribution au débat sur la taxe carbone.

En ce moment, cher lecteur, le monde politique est centré sur le débat autour de la taxe carbone. C'est tout à fait normal. Lorsqu'on met en place un nouvel impôt, il faut que les citoyens s'en saisissent pour qu'il ait une légitimité. De mon côté, j'ai un avis totalement partagé sur cette taxe. J'en comprends la logique mais j'entends aussi complètement le discours de ses détracteurs. Je voudrais ici apporter ma petite pierre à un débat déjà très dense.

Le but de cette taxe est de pousser les Français à réduire leurs émissions de carbone. L'un des principaux objectifs est de s'attaquer à l'usage de l'automobile, qui n'est pourtant pas le principal pollueur de notre planète : l'industrie est devant et le MEDEF donne de la voix sur cette question. Pour nous, citoyens lambdas, c'est bien sur la voiture (et sur le chauffage, mais je n'en parlerai pas ici) que va peser cette taxe.

Un problème important se pose : pour que le Français puisse diminuer sa consommation de CO2, il faut qu'il emploie des moyens de remplacement pour se déplacer. Une première solution serait qu'il se rapproche de son lieu de travail, mais la structure de l'immobilier et son niveau de revenus va l'en empêcher. L'autre solution consiste à utiliser des moyens de transport public. Certes, ceux-ci utilisent du gasoil ou de l'électricité nucléaire, mais ils permettent au moins de diminuer les émissions de carbone. Or, pour qu'une personne renonce à sa voiture, il y a deux questions importantes : est-ce que cela me coûte moins cher ? Est-ce que j'y gagne en qualité de vie ? En tant que Parisien, le métro est tout de suite concurrentiel à l'intérieur de la capitale. Par contre, lorsque nous avons le malheur de vivre en banlieue, les choses changent totalement. Je suis moi-même dans cette situation. Je vis en Seine-Saint-Denis et j'y travaille. Mon logement et mon lycée dit difficile sont séparés d'une dizaine de kilomètres. En voiture, le trajet me coûte un plein de gasoil par mois (le coût a varié, depuis 2006, entre 40 et 65 € le plein), et dure environ 30 mn. La RATP est l'autre possibilité. Une carte orange mensuelle trois zones me coûte 74,40 €, mais la moitié est prise en charge par mon employeur : l'impact réel est donc de 37,20 €, soit un coût moindre que la voiture. Par contre, j'ai souvent privilégié la voiture, parce que le trajet en transport en commun dure presque une heure pour un aller, pour faire 10 km ! La seule chose qui me fait me raisonner est le temps que je mets à me garer en rentrant… Pour que je change de mentalité, il faudrait vraiment que le trajet en transport devienne plus court ou beaucoup moins cher, ou que le prix de l'essence devienne prohibitif.

On peut aussi parler des trajets longs. En France, l'Etat a choisi de privilégier les liaisons ferroviaires les plus fréquentées avec la construction de TGV. Le dernier plan mis en place avec la crise confirme cette orientation. De nombreuses parties du territoire restent donc mal desservies. Cependant, on peut souvent choisir le train lorsque le contexte le propose. J'ai connu le cas durant ces vacances.

Comme je te l'avais raconté, avec un groupe de camarades, nous avons randonné sur l'Aubrac. Notre première idée était de prendre le train puisque la petite ville d'Aumont-Aubrac, d'où partait notre parcours, est dotée d'une gare. Nous nous connectons donc sur le site de la SNCF pour obtenir un devis. Or, je découvre effaré (je me suis occupé de cela 3 semaines et demi avant le départ) que pour quatre personnes, l'aller-retour nous revenait à près de 500 € ! En voiture, en prenant uniquement l'autoroute et un véhicule diesel, le trajet durait le même temps, mais n'a coûté que 140 € tout compris : il n'y a pas de péage sur l'A75, et le péage de l'A71 coûte environ 34 €. Logiquement, et malgré une petite culpabilité pour l'environnement, nous avons donc choisi la voiture. Au moins la moitié du groupe n'avait pas les moyens d'aligner 125 € pour se payer un billet de train.

La mise en place de la taxe carbone doit certes s'accompagner de pédagogie, mais si le but est de se débarrasser du CO2, elle doit s'accompagner d'un vigoureux plan de réinvestissement des structures de transport public, autant dans les agglomérations que dans les trajets longue distance, et sur tout le territoire ! Certes, il restera toujours le problème des campagnes les plus isolées et peu peuplées, mais par définition, étant peu peuplées, ces zones produisent peu de pollution. Les villes et les déplacements importants des citadins restent le vrai problème.

Or, le dernier plan d'investissement de l'Etat ne se positionne pas ainsi. Au contraire, il relance des autoroutes et des TGV. Il faut absolument réinvestir dans des liaisons locales et dans les banlieues des grandes villes, pour espérer réellement faire diminuer nos émissions de gaz. Sinon, cette taxe ne sera en effet qu'un nouvel impôt de plus.

J'avais aussi développé l'idée qu'il faudrait aider les pauvres et les classes moyennes en relevant un peu les salaires. Sur d'autres blogs, on m'a asséné que ceux-ci iraient en priorité vers la consommation et donc vers la pollution. Sans doute, mais l'écologie a un coût, et si les pauvres n'y ont pas accès, on ne règlera aucun des problèmes environnementaux… Pourquoi ne pas envisager la gratuité des transports publics, et les faire payer par cette taxe carbone ou par d'autres impôts ? Evidemment, cette logique va contre la libéralisation des transports, mais il est encore temps de faire marche arrière.

PS : tiens, personne ne parle des émissions des élevages bovins, gros émetteurs de CO2. C'est dommage car cela détendrait un peu l'atmosphère.

7 commentaires:

  1. Jolie contribution... A rajouter dans un best of "Taxe Carbone" ton très bon billet.

    Bon weekend

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  2. Hé ho ! Je n'ai pas asséné ! J'ai juste relevé en trois mots une espèce de contradiction entre le fait de vouloir faire en même temps consommation (donc croissance) et écologie. Je ne t'ai pas engueulé, juste relevé un dilemme.

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  3. @ Faucon : merci et bon week-end à tois aussi.

    @ Nicolas : je sais, je fais un peu de second degré. Il faut bien que je trouve des moyens de faire des liens...

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  4. Merci de m'avoir cité, surtout que mon billet était lapidaire et loin d'être le meilleur sur le sujet.
    :)

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  5. @ POISON-SOCIAL : de rien, j'ai fait un petit relevé des billets les plus récents. Ton billet ne m'a pas semblé infamant pour toi en tout cas.

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  6. Un autre élément au débat, sur la tendance économiciste de ce type de mesure, tendance qui semble d'ailleurs gagner l'ensemble des politiques environnementales ("questions écologiques, réponses économiques", comme dirait l'auteur) : http://yannickrumpala.wordpress.com/2009/08/01/ce-que-revele-la-%c2%ab-taxe-carbone-%c2%bb/

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  7. @ Anonyme : le lien est intéressant, merci.

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