dimanche 7 septembre 2008

Xavier Darcos frappe encore : vive l'UMP-lycées !

Hier, les Jeunes Populaire avaient annoncé la création d'une UMP-lycées, pour recruter des jeunes lycéens dans les rangs du parti de droite. Est-ce que cela me choque, cher lecteur ? Non. Tous les partis ont toujours eu des organisations de jeunesse, ce n'est pas nouveau. D'ailleurs, je les vois moi-même souvent devant mon lycée dit difficile. Les JC, les JCR et le PS font régulièrement des distributions de tract à destination des élèves et des enseignants. Pas dans le lycée, bien sûr, mais sur le trottoir, devant la porte. C'est tout à fait légal et il n'y a rien à redire.

Par contre, les établissements scolaires sont soumis au principe de laïcité. Cela concerne bien sûr la religion, ce qui est le plus connu et le plus souvent redit dans les médias, mais aussi la politique. Les enseignants n'ont pas le droit d'exprimer leurs opinions politiques devant leurs élèves, et ces mêmes élèves doivent conserver une certaine neutralité politique durant les cours. C'est d'ailleurs, cher lecteur, une des raisons qui explique mon anonymat sur ce blog : je n'ai pas particulièrement envie que mes élèves, toujours prompts à chercher sur internet trace de leurs professeurs, connaissent mes idées politiques de A à Z.

Par contre, depuis 1986, les élèves peuvent adhérer à des syndicats lycéens et ceux-ci peuvent discuter avec le gouvernement, comme les syndicats de leurs parents. Souviens-toi, cher lecteur, tu les as vu s'exprimer durant les manifestations de l'année dernière. Deux syndicats dominent aujourd'hui dans le monde lycéen : l'
U.N.L. et la F.I.D.L. Comme souvent dans les syndicats, ceux-ci sont nettement marqués politiquement et personne n'est réellement dupé par la neutralité syndicale. De toute façon, qu'on soit de gauche ou de droite, il me semble impossible de s'engager dans l'action syndicale sans avoir un minimum de pensée politique.

Or, voilà que Xavier Darcos a franchi une nouvelle
ligne rouge. Le ministre de l'Education s'est en effet félicité de la naissance de ce nouveau groupe de l'UMP, estimant que "nous avons des associations lycéennes qui ont leur légitimité, mais qui sont très, très marquées à gauche, qui sont très antigouvernementales et qui parlent un peu au nom des lycéens, alors qu'elles parlent surtout au nom d'un parti. L'UNL est très liée au Parti socialiste, et donc je souhaiterais qu'on fasse un peu contrepoids, que d'autres lycéens puissent s'exprimer".
Darcos a franchi trois lignes rouges qui ne devraient jamais être traversées par un ministre d'une démocratie :
  1. Il tente de déstabiliser des syndicats lycéens que l'Etat reconnaissait jusqu'à ce jour comme représentatif en les accusant d'être de gauche. Comme il sait que ces syndicats contestent sa politique qui fait régresser l'école, il s'agit pour lui de dire qu'ils le font non pas parce qu'ils croient en des valeurs ou qu'ils dénoncent une politique délétère, mais parce qu'ils sont de gauche et qu'ils contestent mécaniquement la politique gouvernementale.
  2. En taxant de gauchisme les syndicats lycéens, le gouvernement détruit les interlocuteurs légitimes qu'il a en face de lui. Je tiens à te rappeler, cher lecteur étourdi, que Sarkozy voulait faire de sa présidence le symbole du dialogue social. Il semble bien que ce dialogue soit réservé à ceux qui pensent comme le ministre, et pas aux autres.
  3. Enfin, voilà un ministre qui souhaite qu'un parti politique s'implante dans les lycées. Il s'agit d'une grave entorse à la laïcité. On a eu suffisamment de mal à faire sortir des établissements scolaires les religieux et les partis. On est encore à la peine, dans nos lycées dit difficiles, contre les agressions permanentes des islamistes contre le système scolaire, pour ne pas avoir un ministre qui propose à l'UMP de mener la même stratégie. N'oublions pas que l'UMP n'est pas un syndicat mais un parti qui cherche à accéder au pouvoir et à le conserver. Ce n'est vraiment pas la même chose. Peut-être que Darcos rêve de syndicats partisans qui permettraient un contrôle plus efficace des masses ? Cela me rappelle vaguement le FN-Police...

En clair, j'estime que Darcos devrait démissionner, rien que sur cette affaire. Quand un ministre n'arrive pas à se taire sur ces sujets-là, il ne mérite pas son poste.

P.S. : En tout cas, pour revenir sur un ancien billet, je tiens à dire à mes deux commentateurs du moment que je confirme ce que je leur disais : tous ces gens ne sont pas des libéraux, car un libéral aurait plutôt tenté de détruire la logique collective pour imposer la logique individuelle. Ici, Darcos soutient une logique d'organisation collective de droite pour s'opposer à la logique d'organisation collective de gauche. On est bien loin des belles idées individualistes du libéralisme...

10 commentaires:

  1. Euh...en toute sympathie je trouve que tu n'es pas franchement objectif sur ce coup là. Moi non plus cela dit, je te rassure ;)

    Pour réagir aux points que tu avances :
    1. Il ne les accuse pas d'être de gauche, ils SONT de gauche. Et quand bien même ils défendent effectivement un certain nombre de valeurs, je suis intimement convaincu de leur particulière virulance vis à vis de la droite. Est-ce anormal? Cela remet-il en cause leur engagement ? Non, c'est juste que comme tu le dis "ils croient en des valeurs ou qu'ils dénoncent une politique délétère"...à leurs yeux ! Car cette vision est forcément subordonnée à leurs idées politiques. Un syndicat de droite ferait la même chose.

    2. Il ne les détruit pas; qui ignore qu'ils sont de gauche ? Qu'est ce que cela change ? Ils représentent quand même un certain nombre de lycéens. En revanche ils ne les représentent pas tous, contrairement à ce qu'ils essaient de faire croire. C'est important de rappeler qu'ils forment surtout une frange des lycéens très politisée et marquée à gauche. D'ailleurs un bon nombre de dirigeants UNL passent ensuite à l'UNEF, dont on connait le positionnement.

    3. Que le syndicat soit directement et statutairement relié à l'UMP serait peut-être ce qu'il y a de plus problématique, j'en conviens. A voir si c'est effectivement ce qui se passe.
    Mais finalement ce que tu reproches principalement c'est qu'ils ne s'embêtent pas avec la même hypocrisie que les autres syndicats, qui se défendent de tout ancrage politique; ce qui est presque plus dangereux je trouve.

    Et de là à demander une démission du ministre...Quand bien même il serait dans le faux, des excuses me paraitraient bien suffisantes.

    Pour finir, et au risque d'en faire hurler quelques uns : les syndicats lycéens sont à mon sens de toute façon une belle connerie.
    Que le gouvernement ait des interlocuteurs lycéens pour discuter, très bien, mais qu'alors ils soient élus par tous les lycéens ! Que ce soient de super-délégués de classe, et pas un syndicat où ne s'inscrivent de toute façon que les convertis.

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  2. Salut Elyas,

    Moi, objectif ?

    Alors, réponses à tes différents points:

    1. que ces syndicats-là soient de gauche, je le sais et je l'ai dit. Rien n'empêche cette masse de lycéens de droite de créer un syndicat librement et de se rendre représentatif, sans que cela soit l'UMP qui le fasse pour eux. Le PS et le PCF n'ont jamais officiellement annoncé la création des syndicats actuels, d'autant plus lors de leur présence au gouvernement.

    2. Et alors ? Comment un militant syndical peut-il ne pas être politisé ? Par expérience, je peux te dire que c'est impossible.

    3. Pas d'accord, car un syndicat ne vise pas à accéder au pouvoir, alors qu'un parti le veut. L'UMP-lycées aidera donc le parti à accéder au pouvoir, ce que les syndicats lycéens ne feront jamais. C'est fondamentalement différent.

    Sur ta dernière remarque, en désaccord aussi, car les syndicalistes sont de vrais militants qui ont des valeurs. Les délégués sont les meilleurs copains de la classe, qui désignent d'autres meilleurs copains. Ils n'ont souvent aucune politisation. En plus, pour organiser des élections nationales, il faudra bien des mouvements pour organiser les élèves.

    A bientôt,

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  3. Ouais, les syndicats de lycéens sont de gauche parce qu'ils sont actifs sur leurs revendications. Et comme la notion de syndicat et d'activisme sont étroitement associées à "gauchiste", ils sont de gauche. Et la création d'un syndicat, historiquement, est un acte de gauche.
    Pour caricaturer un peu plus, les syndicats de lycéens se battent avant tout sur des idées sociales liées à l'éducation, forcément plus des valeurs de gauche. Que ferait un syndicat de "droite" sinon du prosélytisme pour un parti ? défendre l'argent et le capital ?

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  4. @ CC : ce que tu dis n'est pas faux, mais je tiens à signaler qu'il existe des syndicats dominés par des idées de droite. Dans l'éducation, c'est le cas du SNALC-CSEN. Et puis, les syndicats patronaux ne sont pas vraiment gauchistes. Cette démarche est donc possible aussi à droite, n'allons pas trop dans l'autre sens non plus...

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  5. Oui, bien sûr, les syndicats de droite existent, mais souvent en réaction aux pré-existant syndicats de gauche, non ?
    PS : je croyais que le SNALC était indépendant, ie ni de gauche ni de droite, comme quoi...

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  6. @ CC : en fait, le SNALC se dira indépendant, mais c'est mon opinion lorsque je lis leurs brochures, qui n'est que subjective bien sûr. ;)

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  7. @Mathieu
    1. Effectivement. Mais compte tenu du fort ancrage des militants et des liens avec le PS ou le PCF, je ne suis pas sûr que cela change quelque chose en soi. Le syndicat ne sera peut-être pas estampillé UMP d'ailleurs, je ne pense pas que ce soit dans son intérêt de toute façon. Se dire "de droite" tout court sera plus rassembleur; ou même juste communiquer sur leurs valeurs, ce qui fera venir des lycéens ne s'identifiant pas forcément comme "de droite" ou même "UMP".

    2. Alors là pas d'accord avec ta vision des choses. Certes un militant est bien souvent politisé; cela ne veut pas dire qu'il doive faire du prosélytisme politique. Et surtout cela veut encore moins dire que son syndicat doive être politisé, dans un seul sens en plus !
    Pour moi un syndicat n'a absolument pas à faire de politique. Si on veut faire de la politique, les partis politiques sont là pour cela.
    Un syndicat a pour rôle de défendre les intérêts de ceux qu'il représente : étudiants, salariés,... Autant que faire ce peut cela doit être fait de façon équilibrée et apolitique.
    Ainsi en fac aux élections étudiantes on avait le choix notemment entre l'UNEF (gauche), l'UNI (droite), mais aussi l' Inter-Asso. Cette dernière se déclarait apolitique, et présentait des listes de représentants issus de diverses assos étudiantes, et en terme d'idée politique il y avait vraiment de tout.
    Un peu comme avec la PEEP et la FCPE, en fédérations de parents d'élèves (même si on classe parfois la PEEP comme de droite, un peu abusivement je trouve).

    Généralement je trouve que c'est ce qui permet de mieux défendre les intérêts des syndiqués, car être apolitique permet de dépasser les clivages idéologiques.
    Car au final on se retrouve sinon avec des syndicats non seulement à gauche, mais même TRES à gauche...et 7 ou 8 % de la population syndiquée seulement.

    3. Bof, je ne vois pas trop en quoi l'UMP lycée aidera l'UMP à obtenir le pouvoir... Je ne la vois pas trop balancer des pétitions à tour de bras ni faire des grosses manifs pour faire pencher la balance, ce n'est pas trop la culture de droite je pense...Et puis l'énorme majorité des lycéens n'a même pas le droit de vote, alors !

    @CC
    Tu sais, la droite a des valeurs aussi, même si elles peuvent différer de celles de la gauche. Donc un syndicat de droite pourra défendre la responsabilisation des parents, le respect de l'autorité du professeur, la meilleure préparation des élèves à la compréhension du monde (cf l'enseignement en Sciences Eco et sociales)...

    Et puis si syndicats de gauche et de droite sont d'accord sur telle ou telle mesure, l'impact sera plus profond vis à vis du gouvernement...

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  8. Salut Elyas,

    1. Pour le moment, on en est à UMP-lycées, ce qui veut dire une organisation de jeunesse visant à défendre les idées de ce parti. Si il devait y avoir création d'un syndicat, il faudrait accepter qu'il puisse aussi être en désaccord avec le ministre parfois puisqu'il défend les opinions des lycéens. Or, comme je l'ai indiqué en liant l'article du Monde, Darcos veut des soutiens, pas de nouveaux adversaires.

    2. Je n'ai pas dit le contraire, je dis juste que l'engagement syndical est lié à une conscience politique, quand bien même elle ne s'exprime pas systématiquement dans les discours et les actes syndicaux. Car être syndiqué implique une vision du monde et une pensée politique. En effet, même sur les intérêts dont tu parles, les représentés ont souvent des visions très divergentes de leurs intérêts, et c'est bien pour cela que même dans les gros syndicats, on trouve des tendances.

    La FCPE est traditionnellement classée à gauche et l'APEEP à droite. Là encore, je ne vois pas bien le problème, d'autant plus qu'elles sont parfois d'accord sur certains débats.

    3. Je précise : l'UMP-lycées, si elle prend appui pour aborder les lycéens sur la vie des lycées, vise à enrôler des militants pour les amener vers le parti et en faire des électeurs. Un lycéen a certes 16 ans, mais vote deux ans après ! Par contre, un syndicat n'amène pas à l'engagement politique immédiatement. C'est le parcours du militant qui peut l'amener à s'engager. Même la CGT n'impose plus à ses militants d'être encartés au PCF.

    Des syndicats d'extrême-gauche ? Il y en a mais ils sont minoritaires. De plus, je ne crois pas que c'est parce que les syndicats sont de gauche majoritairement que les Français n'y adhèrent pas. 47% des Français ont voté à gauche en 2007 et pourrait donc être intéressés, si on suit ton idée, mais ils ne sont pas syndiqués non plus. Le problème vient plutôt de l'histoire syndicale et sociale française, mais je ne vais pas développer ici, c'est beaucoup trop long.

    A bientôt,

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  9. DARCOS DEMISSION
    Le ministre de l'Education Nationale est-il un incapable qui ne connait rien à l'enseignement, notamment en primaire, où tout simplement un Ministre qui veut simplement à tout prix, laisser sur le bas-côté de la route scolaire des milliers d'élèves. Peut-être est-il les deux à la fois ?

    Une chose est certaine, Darcos est un chantre du mensonge. Lors d'une interview au journal Le Monde du 24 juillet 2007, il déclare « Les RASED (Réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté) ont montré leur efficacité, mais au collège il est bien tard pour veiller à des rééducations ou à des dépistages » Il faisait alors passer le message qu'il n'était pas question de les supprimer à l'école primaire.

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  10. @ Vince : Darcos ne pense à rien de tout cela. Il a juste été nommé pour supprimer des postes de fonctionnaire, ce qu'il fait avec efficacité depuis son arrivée...

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