jeudi 11 décembre 2008

Et si l'affaire Marini était téléguidée ? Sarkozy fait toujours de la politique politicienne.

Lundi matin, à grand renfort de médias mobilisés pour l'occasion, nous avons appris que le sénateur Marini proposait un amendement au budget 2009, actuellement discuté au Sénat, qui visait à octroyer un avantage fiscal aux victimes de l'effondrement boursier de ces derniers mois. Immédiatement scandalisé, j'ai dégainé un billet sur mon autre blog, comme d'autres blogueurs par ailleurs. Ensuite, Marini a retiré son amendement. Puis, quelques heures plus tard, le même Marini, qui ne se démonte pas si facilement, a proposé une autre idée, visant à supprimer une niche fiscale pour les parents d'enfants de plus de 26 ans vivant encore avec eux, pour remettre dans les caisses 1,7 milliards d'euros. Manuel a réagi assez vite sur ce texte, comme, là encore, d'autres blogueurs.

Hier, j'ai commencé, cher lecteur, à m'intéresser à la manière dont notre président continue, avec une constance admirable, à faire de la politique politicienne. Après mûres réflexions, je crois que ces deux affaires successives en sont aussi.

Philippe Marini n'est pas un personnage politique très connu du grand public. Certes, il fait partie de l'establishment politique de l'UMP, mais il a 58 ans (ce qui signifie que sa carrière politique est déjà derrière lui) et sa place de sénateur le met largement à l'abri des aléas des joutes électorales. On peut donc se demander ce qui a poussé ce sénateur à se lancer dans des propositions qui, dans le contexte financier actuel, excitent les opposants à la majorité et exaspèrent les Français commençant à sentir les effets de la crise.

Je lance, ici, une hypothèse. Je m'appelle Nicolas Sarkozy et je viens de lancer un plan de relance de faible ampleur. Cela s'est un peu vu : la prime à la casse a été débattue, les contradictions entre investissements dans les autoroutes et investissements dans le rail ont frappé, des comparaisons peu avantageuses avec le plan britannique sont ressorties dans la presse. Il faut donc que je redore mon image de relanceur en chef et que je fasse, par la même occasion, oublier que je défends surtout les riches.

Alors, je vais mettre en avant un sénateur inconnu, Philippe Marini, en lui promettant quelques fonctions, avec un amendement scandaleux vu le contexte. Si jamais cela passe sans bruit, tant mieux pour mon électorat. Mais si des contestations apparaissent, je fais réagir mon gouvernement et je m'étonne en affirmant à quel point ce n'est pas le moment, montrant ainsi que j'aime les Français.

Mais bon, je suis Sarkozy et je peux encore faire mieux. Là, je lance le même Marini (déjà brûlé, donc, autant l'achever) sur un deuxième amendement sur une niche fiscale qui est loin d'être une des plus scandaleuses de notre fiscalité, mais qui va toucher des gens moins aisés que le précédent. Là encore, si cela passe, tant mieux, et en plus, je dirige mes opposants contre un sénateur sans envergure et un peu masochiste. Si cela ne passe pas, je fais une nouvelle sortie pour défendre la veuve et l'orphelin, et mon image continue de remonter.

Dans ces histoires, on voit le danger de bloguer trop vite : on se laisse avoir par les manipulations politiciennes d'un président toujours aussi malin. Prenons notre temps, camarades blogueurs, et soyons vigilants.

8 commentaires:

  1. Tu te plantes assez largement dans ton analyse !

    Philippe Marini est le rapporteur général du budget, ce n'est pas n'importe qui et surtout, il est au sommet de sa carrière.

    C'est un libéral très libéral, qui milite pour la suppression de l'ISF. L'amendement "petit porteur", c'est de la roupie de sansonnet à coté de ce qu'il est capable de faire. Il n'a pas eu besoin de Sarkozy pour déposer ce genre d'amendement, qui, à mon avis, est une opération menée entre lui et Bercy, sans que ça aille plus haut. C'est quand ça merde que ça remonte !

    Et surtout, là où tu te trompes, c'est sur le pouvoir de Sarkozy face aux sénateurs. Ils ne font pas forcement de bruit, mais ils sont redoutablement efficaces et maintenant que le renouvèlement vient d'avoir lieu, ils sont libres. Sarkozy n'a finalement que peu de contrôle sur le Sénat.

    Je trouve que tu amorces une dérive inquiétante. Tu deviens de plus en plus "antisarkozyste pavlovien" au détriment d'une réflexion posée. C'est dommage, tu perd en originalité et surtout en crédibilité.

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  2. Je pense aussi que ta théorie frôle de très près la parano conspirationniste... Même si j'avoue y avoir pensé, l'explication d'Authueil me parait intéressante.

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  3. @ Authueil : je prends en compte tes critiques et je te remercie de m'apporter cette vision-là. Comme tu es plus en contact avec ces cercles-là, je sais que tu as une vision plus claire des choses. En fait, j'essaie juste de comprendre comment ces faits se mettent en place : je trouve que tout cela fait très désordre si rien n'est téléguidé. Dans ce cas, je vais te poser une question simple : pourquoi les médias ont-ils relayé à ce point cette information, qui d'habitude serait restée dans les oubliettes de l'AFP ? Est-ce le contexte ? Est-ce une intervention du dessus ? Est-ce l'opposition ?

    Je ne fais pas de l'anti-sarkozysme pavlovien. Je suis très inquiet de l'évolution de la situation, en particulier de ce que je vois comme évolution chez mes élèves de quartiers en difficulté en ce moment. Ces stratégies politiciennes, même si elles n'en sont pas, ont un impact dévastateur, et il faut y faire très attention en haut. Ces billets visent à montrer que nos politiques devraient arrêter ces comportements-là et faire attention à ce qui se passe en-dessous. J'en ferai bien un billet si je n'étais pas soumis au devoir de réserve du fonctionnaire.

    @ Manuel : bon, ok, je vais peut-être réfléchir plus pour être plus original. Les explications d'Authueil sont toujours intéressantes, mais attention, c'est un provocateur. Je t'avais dit de le mettre dans notre blogroll.

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  4. Oui, c'est très désordre. Mais c'est désordre parce qu'il y a plusieurs acteurs qui chacun jouent leur partition dans une certaine liberté. Il n'y a que dans les dictatures où il n'y a pas de "désordres".

    Ce genre de cahot de la machine politico-administrative est sain, car cela montre qu'il y a plusieurs options, qu'il y a débat et que tout ne se fait pas dans les couloirs, et que parfois, c'est public. Il faut savoir ce que l'on veut.

    Là où ça fait réellement désordre, c'est quand les guéguerres et les conneries continuent après l'arbitrage rendu en haut lieu. Cela veut dire qu'il n'y a plus d'autorité au sommet. et là, c'est très emmerdant car tout part en couille !

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  5. Rien ne t'empêche de le faire...

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  6. "J'en ferai bien un billet si je n'étais pas soumis au devoir de réserve du fonctionnaire."

    Un billet sur ce qui se passe dans l'éducation en ce moment, ça vaudrait le coût ! Comme ça tu seras fiché pour quelque chose :-))

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  7. @ Authueil : ok et merci pour les réponses. De toute façon, pour revenir au premier commentaire, je ne suis pas un grand fan de Sarkozy, tu le sais de toute façon. Je ne pense pas être pavlovien. Je sais cependant que tu me le diras dans le futur si je continue dans cette voie.

    @ Manuel : je m'en occupe ce week-end.

    @ Cloran : j'ai pas envie d'être convoqué à l'inspection d'académie, moi. Je parlais de ce que disent les élèves en ce moment sur les émeutes en Grèce...

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  8. @ Authueil
    Marini, "libéral très libéral" ?
    Son amendement visant à faire déduire des impôts les sommes perdues en bourse est de l'anti-libéralisme pur.
    Un libéral n'aurait jamais ne serais-ce que pensé à cela : ses maîtres mots sont liberté et responsabilité. Liberté de boursicoter, et de se casser la gueule tout seul comme un grand quand on a fait les mauvais choix.

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